lundi, novembre 11, 2024
AccueilNon classéLe Rwanda veut intéresser les touristes à son histoire douloureuse

Le Rwanda veut intéresser les touristes à son histoire douloureuse

Le Rwanda veut intéresser les touristes à son histoire douloureuse
A côté de ses sublimes paysages et de ses emblématiques gorilles, le Rwanda veut aussi montrer sa douloureuse histoire récente aux touristes visitant ce petit pays d’Afrique centrale, théâtre en 1994 d’un génocide qui fit quelque 800.000 morts en trois mois.
Accompagnée d’une amie, Anne Porbadnigk, Berlinoise de 30 ans déambule, audio-guide à l’oreille, dans le jardin du mémorial du génocide de Gisozi à Kigali, entre fontaines, fleurs et sépultures communes, où reposent quelque 250.000 victimes des massacres.
« Nous sentions que si nous voulions comprendre la société rwandaise d’aujourd’hui, il était très important de comprendre non seulement ce qui s’était passé, mais comment les gens font pour vivre avec », explique la touriste allemande, arrivée depuis quatre heures à peine au Rwanda.
« En Allemagne, nous aussi avons une histoire très lourde », souligne-t-elle en référence à l’Holocauste. « Pendant mon enfance, une question m’a perturbée pendant des années: comment puis-je vivre dans un pays dans lequel ceci est arrivé? (…) Je marchais dans des rues dans lesquelles des gens avaient été tués et en me retrouvant ici, je me demande à quoi le Rwanda pouvait ressembler pendant le génocide ».
Au cours des dix dernières années, le secteur touristique au Rwanda a connu une croissance exponentielle. Le Rwanda a reçu 1,08 million de visiteurs en 2012 contre 27.000 en 2004. Les revenus liés au tourisme sont parallèlement passés de 15 à 282 millions de dollars.
Le Rwanda bénéficie d’innombrables attraits: panorama superbes de collines embrumées à perte de vue, zone de forêt vierge exceptionnellement conservée, lacs étincelant sous le soleil et l’une des capitales les plus propres et les plus sûres du monde.

Le Rwanda veut intéresser les touristes à son histoire douloureuse
Les gorilles de montagne des Volcans des Virunga, rendus célébres par Diane Fossey, restent la principale attraction touristique. Mais chaque année, des dizaines de milliers de visiteurs du monde entier se rendent aussi sur les sites du génocide.
« Ce qui nous a surtout attirés ici, c’est la nature et (…) les gorilles », explique Jackie Brown, attablée à la terrasse d’un café de Kigali avec son mari, sa fille et leur guide.
« Le mémorial faisait partie du programme recommandé par notre voyagiste (…) mais nous voulions y aller de toute façon », assure cette Canadienne, inspectrice de police près de Toronto, qui dit avoir commencé à s’intéresser au Rwanda en 2012, lors d’une conférence de Roméo Dallaire, qui commandait les Casques-Bleus durant le génocide et a évoqué dans plusieurs livres son impuissance face aux massacres visant essentiellement la minorité tutsi.
« L’Histoire va parler »
Selon David Brown, porte-parole de la Fondation Aegis qui gère le mémorial de Gisozi, la plupart des visiteurs sont Européens et Nord-Américains et viennent dans le cadre d’un voyage organisé. « Il y a à la fois des gens qui font un arrêt (dans le cadre d’un circuit plus large) et ceux qui veulent réellement apprendre l’histoire du Rwanda », explique-t-il.
Gouvernement rwandais et voyagistes disent partager le même objectif: montrer aux étrangers le chemin parcouru par le pays, passé en deux décennies des ruines laissées par le génocide à un taux de croissance annuel moyen de 8,2% sur les cinq dernières années.
Rica Rwigamba, chargé du Tourisme à la Commission du développement du Rwanda, assure qu’il « n’y a pas de stratégie particulière de promotion des sites mémoriaux ». « Mais nous pensons que c’est important que les gens comprennent notre pays », ajoute-t-elle.

Le Rwanda veut intéresser les touristes à son histoire douloureuse
La plupart des compagnies de tourisme au Rwanda incluent la visite de mémoriaux du génocide dans leurs circuits, explique de son côté Manzi Kayihura, tour-opérateur et président de l’Association des voyagistes du Rwanda: « nous pensons que cela remet le Rwanda en perspective » en montrant « la tragédie du génocide rwandais et la reconstruction, la renaissance d’une Nation ».
« En 10 ans seuls deux couples ont décidé de ne pas se rendre au mémorial du génocide », assure-t-il à l’AFP.
Tusafiri Africa Travels, qui a des agences au Kenya et aux Etats-Unis, propose ainsi un circuit de six jours appelé « L’Histoire du Rwanda va parler » incluant la visite de deux mémoriaux dans les environs de Kigali, avant un départ à la découverte des gorilles.
Une publicité monochrome sur son site internet montre un enfant en haillons devant un champ de croix de bois ou un alignement de crânes sur une étagère d’un mémorial.
Les sites de mémoire du génocide cherchent désormais à ajouter, via du texte, des photos ou de la vidéo, la pédagogie à l’émotion qui saisit le visiteur face à l’empilement d’os, de crânes et de vêtements laissés dans le lieux mêmes des massacres, comme dans les églises de Ntarama et Nyamata, ou face aux squelettes à l’état brut du mémorial de Murambi.
Ou encore, sur un mur du mémorial de Gisozi, face aux photos d’enfants et de bébés souriants, accompagnés d’une fiche indiquant simplement leurs nom, âge, nourriture ou sport favori, rêves… Et la façon dont ils furent brutalement massacrés.
afp

RELATED ARTICLES

Most Popular

Recent Comments