Les pays n’ont pas d’amis, ils ont des intérêts, c’est connu. Le 18 aout 2020, énième coup d’état au Mali, la France « prend acte et souhaite une transition la plus courte possible afin que les civils reviennent au pouvoir ». Le 24 mai 2021, les auteurs du premier coup d’état ayant du mal à se partager le gâteau malien, les plus lésés décident de refaire un autre coup d’état, cette fois-ci contre la …transition. La France se fâche et décide d’arrêter sa coopération militaire avec un pays dont la tradition des coups d’état n’est plus à démontrer. Comme si elle découvrait seulement maintenant que le Mali était un « spécialiste des coups d’état » en Afrique de l’Ouest.
Entre les deux, il y a eu un autre, mais plus classieux, coup d’état au Tchad. Idriss Deby est débarqué. Mort, il passera pour un héros tombé les armes à la main. La France est représentée, au plus haut niveau, aux funérailles d’Idriss Deby, et par la même occasion adoube le nouveau dépositaire du pouvoir à Ndjaména, Mahamat, le fils du défunt. Voilà à quoi servent les cours de géopolitique dans les grandes écoles. À comprendre l’incompréhensible ! D’un côté, on condamne sur le bout de la langue mais on laisse faire ; mieux on s’affiche avec les putschistes. De l’autre, on condamne aussi mais c’est plus sévère. On bombe le torse et les sanctions tombent.
La France, donc, « a décidé de suspendre les opérations militaires conjointes avec les forces maliennes », après le récent coup d’État du 24 mai et « dans l’attente de garanties » sur un retour des civils au pouvoir à l’issue d’élections prévues en février, a annoncé jeudi le ministère des Armées. La France a suspendu à titre conservatoire les opérations militaires conjointes avec les forces maliennes, a-t-on appris jeudi 3 juin 2021 d’une source au ministère des Armées, précisant que cette décision était liée à la transition politique en cours au Mali et qu’elle serait réévaluée dans les prochains jours.
« Des exigences et des lignes rouges ont été posées par la CEDEAO et par l’Union africaine pour clarifier le cadre de la transition politique au Mali », et « dans l’attente de ces garanties, la France a décidé de suspendre, à titre conservatoire et temporaire, les opérations militaires conjointes avec les forces maliennes ainsi que les missions nationales de conseil à leur profit », souligne le ministre dans un communiqué. Surtout, ne vous méprenez pas ! On vous dira qu’au Tchad, la situation était d’un autre tonneau. Quoi qu’il en soit, un coup d’état ne ressemble jamais à un autre coup d’état ; voilà ce que la France veut nous faire comprendre. Au Tchad, on laisse couler, au Mali, on sanctionne. Deux poids, une seule mesure.
En attendant, Barkhane continuera d’opérer. Forte de 5100 militaires au Sahel, elle continuera ses activités pour lutter contre le terrorisme, mais pour l’heure en solo, précise-t-on au ministère des Armées. En revanche, la force Takuba initiée par la France, composée d’unités de forces spéciales européennes et censée former l’armée malienne au combat face aux jihadistes, compte parmi les activités suspendues. On sauve la face comme on peut. Et comme le ridicule de la situation ne tue pas !
Malick Daho, paru dans le Diasporas-News n°126 – Juin 2021