
Le président du syndicat PENGASSAN, dont les dirigeants sont réunis à Port Harcourt, la capitale pétrolière dans le sud du pays, a demandé « à toutes les plateformes de production de se mettre en alerte rouge en prévision d’un arrêt total de la production ».
Un autre membre de ce syndicat a déclaré espérer que la décision d’interrompre la production sera prise d’ici mercredi soir.
« Nous envisageons l’arrêt de la production du pétrole », a également annoncé le chef du second syndicat de travailleurs du pétrole, le NUPENG (Syndicat nigérian des ouvriers du pétrole et du gaz naturel).
Les grévistes demandent le rétablissement des subventions aux carburants dont la suppression, le 1er janvier, a entraîné un doublement des prix de l’essence, frappant la majorité, démunie, des 160 millions de Nigérians.

Depuis lundi, des manifestations pacifiques ont rassemblé des dizaines de milliers de personnes dans la grande métropole économique Lagos, dans un climat pacifique.
Ils étaient de nouveau plusieurs milliers ce mercredi dans les rues de Lagos à manifester dans le calme. Seuls quelques incidents isolés ont eu lieu dans un quartier chic de la ville, où des protestataires ont attaqué un véhicule de police à coups de bâtons et ont arraché des panneaux de signalisation.
A Kano, la plus grande ville du Nord, la manifestation a également rassemblé des dizaines de milliers de personnes et s’est déroulée sans incident majeur.
A Minna en revanche, capitale de l’Etat de Niger dans le centre du pays, des violentes émeutes ont éclaté dans la journée. Plusieurs bâtiments officiels ont été attaqués et un policier en faction devant l’un de ces immeubles a été tué.
A la suite de ces violences, les autorités locales ont imposé un couvre-feu de 24 heures dans l’ensemble de l’Etat de Niger.

Avec la suppression des subventions sur le carburant, les autorités comptent réaliser 8 milliards de dollars (6,3 milliards d’euros) d’économies pour financer des infrastructures.
Nombre de Nigérians interrogés par l’AFP se disent partagés: ils veulent la fin de la grève mais aussi la baisse des prix à la pompe.
Un climat de guerre civile
A ce climat d’intenses revendications sociales, s’ajoutent la poursuite des violences inter-religieuses entre musulmans et chrétiens.
Dans une nouvelle attaque contre des chrétiens dans le nord-est musulman, quatre personnes ont été tuées mercredi par balles à Potiskum (nord-est) par des membres présumés du groupe islamiste Boko Haram, selon des témoins.
Les victimes tentaient visiblement de fuir cette ville de l’Etat de Yobe, où l’état d’urgence est en vigueur depuis le 31 janvier, et qui est l’un des fiefs de Boko Haram.
La veille, toujours à Potiskum, huit personnes, dont cinq policiers, avaient été tuées dans l’attaque d’un bar.
Toujours dans le nord-est, mais cette fois dans l’Etat d’Adamawa, un policier a été tué dans l’attaque à l’arme automatique d’un poste de police à Yola.
Les attaques, surtout antichrétiennes, revendiquées par Boko Haram ou qui lui sont attribuées, ont fait quelque 140 morts au moins dans le nord depuis le 25 décembre.
Le sud n’est cependant plus épargné, avec deux mosquées attaquées et en partie incendiées lundi et mardi à Benin City, laissant craindre une généralisation des violences à tout le pays.
Deux intellectuels nigérians internationalement renommés ont ainsi exprimer leur crainte de voir leur pays glisser vers la « guerre civile ».
Pour le prix Nobel de littérature Wole Soyinka, le Nigeria « se dirige vers une guerre civile », alors que certains dirigeants politiques attisent l’intolérance religieuse, a-t-il accusé.
Le romancier Chinua Achebe a quant à lui dénoncé des attaques susceptibles de « déstabiliser tout le pays », en créant « une peur généralisée, voire l’anarchie et la guerre ».