Vingt ans après de douloureux programmes d’ajustements structurels, les dirigeants africains venus à la réunion annuelle du FMI ont salué un changement d’approche des institutions financières, à l’heure où le continent tente de résister aux tourments économiques occidentaux
« Nous ne recevons plus de consignes du FMI ou de la Banque mondiale pour nous dire +faites ceci ou cela+ (…). C’est un changement majeur et l’Afrique revient sur les marchés internationaux », a souligné le ministre des Finances rwandais, John Rwangombwa, samedi lors d’une conférence de presse en marge du sommet des grandes argentiers mondiaux.
Dans les années 1980 et 1990, de nombreux pays d’Afrique subsaharienne avaient souffert des directives des institutions-soeurs de Bretton Woods accompagnant les plans d’aides, accusés d’imposer une libéralisation des marchés trop draconienne et peu adaptés aux systèmes locaux.
Deux décennies plus tard, « il y a plus de confiance entre ces institutions et nos pays », estime Kerfalla Yansané, ministre de l’Economie de Guinée.
Le continent a su traverser la tempête financière de 2008 sans chavirer, nombre de ses gouvernements actionnant des leviers budgétaires pour soutenir la demande intérieure. Mais avec des dettes aujourd’hui plus élevées, les pays africains pourraient ne plus avoir les ressources suffisantes pour renouveler ces politiques en cas de besoin.
« Nous espérons que la communauté internationale saura nous accompagner », souligne M. Yansané.
D’après des prévisions actualisées en début de semaine, la croissance de l’Afrique subsaharienne, attendue à 5% en 2012, pourrait accélérer à 5,7% en 2013 grâce à la flambée des prix des matières premières.
« Aujourd’hui, l’Afrique est un continent qui sait mieux gérer ses affaires et qui sait mieux gérer les incertitudes de l’économie mondiale », se félicite M. Rwangombwa.
Le maintien du marasme dans les pays occidentaux et d’une croissance moins forte en Chine – tous gros importateurs de matières premières – pourraient toutefois mettre en difficulté le continent.
En Guinée, « nous avons besoin d’un taux de croissance à deux chiffres pour réduire la pauvreté qui touche 55% de notre population », prévient M. Yansané.
Du côté des financements, outre une promesse des pays riches d’honorer leurs promesses d’aide au développement, le FMI a annoncé samedi pouvoir débloquer 1,1 milliard de dollars de capacité de prêt pour les pays à faible revenu, en grande majorité africains, tirés du produit de ses ventes d’or.
Fin septembre, le Fonds avait décidé qu’une somme distincte, 2,7 milliards de dollars, dégagée aussi d’un bénéfice imprévu sur l’or, serait allouée à la lutte contre la pauvreté. Quelques exigences techniques doivent toutefois être franchies avant que cette tranche supplémentaire ne soit disponible.
Elizabeth Stuart, de l’organisation non gouvernementale Oxfam, salue cette promesse qu’elle met toutefois en parallèle avec les 456 milliards de dollars d’engagements obtenus au printemps par le FMI pour renforcer son assise financière.
« Les pays africains continuent d’avoir cruellement besoin de financement pour les infrastructures éducatives et sanitaires », souligne-t-elle.
La France a proposé de verser pour l’aide au développement 10% du montant d’une taxe sur les transactions financières que onze pays de la zone euro, dont l’Allemagne et la France, se sont engagés à créer.
Au-delà des questions monétaires, Oxfam appelle la Banque mondiale à aider techniquement les pays africains à se doter de systèmes publics de sécurité sociale, et à stopper « l’accaparemment » des terres agricoles africaines par des spéculateurs étrangers.
AFP