Membres du clergé copte et représentants des fidèles votent lundi en Egypte pour choisir un nouveau chef spirituel, après le décès en mars de Chenouda III qui a laissé derrière lui une communauté inquiète pour son avenir dans un pays où les islamistes dominent le pouvoir.
La mort à l’âge de 88 ans du patriarche Chenouda, défenseur intransigeant de cette communauté pendant quatre décennies, a ouvert le mécanisme de succession de cette Eglise qui représente 6 à 10% des quelque 83 millions d’Egyptiens, dans leur grande majorité musulmans sunnites.
Cinq candidats –deux évêques et trois moines- sont en lice pour devenir le 118ème « Pape d’Alexandrie, Patriarche de toute l’Afrique et du siège de Saint Marc ».
Les membres d’un collège de près de 2.500 personnes -des ecclésiastiques mais aussi des personnalités politiques, économiques ou culturelles laïques de confession copte- sont appelés à voter lundi.
Les noms des trois candidats arrivés en tête seront ensuite écrits sur des morceaux de papiers séparés et placés dans une boite sur l’autel de la cathédrale Saint Marc du Caire, siège de l’église copte orthodoxe.
Le 4 novembre prochain, un enfant aux yeux bandés se verra demander de tirer un des papiers. Le patriarche ainsi choisi au travers d’un enfant sensé guidé par Dieu sera intronisé lors d’une cérémonie le 18 novembre.
Les candidats sont l’évêque Raphaël, 54 ans, un médecin de formation et responsable des églises du centre du Caire, l’évêque Tawadros, 60 ans, de la province de Beheira, dans le delta du Nil, le père Raphaël Ava Mina, 70 ans, le père Seraphim al-Souriani, 53 ans, et le père Pachomius al-Souriani, 49 ans.
Les Coptes, présents en Egypte ou membres de l’importante diaspora vivant à l’étranger, se sont vu demander de jeûner trois jours avant le vote, et une deuxième période de jeûne doit commencer le 31 octobre.
L’évêque Bichoy, autrefois souvent cité pour succéder à Chenouda III, ne figure finalement pas parmi les candidats. Réputé tenant d’une ligne dure, son absence pourrait refléter une volonté de l’Eglise de maintenir des personnalités controversées en dehors de la course.
Mgr Bichoy, qui avait soulevé une polémique après avoir contesté l’authenticité de certains versets du Coran, a été pénalisé pour ses propos qui « auraient pu provoquer des troubles confessionnels dans le pays », a estimé le journal gouvernemental Egyptian Gazette dans un récent éditorial.
Les chrétiens d’Egypte -parmi lesquels les Coptes orthodoxes sont très largement majoritaires- représentent la plus importante communauté chrétienne du Moyen-Orient.
Présents en Egypte depuis l’aube du christianisme, ils dénoncent fréquemment des discriminations et une marginalisation, notamment dans l’appareil politique et la haute fonction publique, ainsi que des violences à caractère confessionnel parfois meurtrières.
L’élection en juin du président Mohamed Morsi, issu des Frères musulmans, a aggravé l’inquiétude de cette communauté qui avait officieusement mais largement soutenu son concurrent Ahmad Chafiq, un ancien premier ministre de Hosni Moubarak.
La mise en cause de Coptes vivant aux Etats-Unis dans la réalisation d’un film islamophobe, à l’origine de tensions dans le monde musulman en septembre dernier, a également mis les chrétiens d’Egypte en situation délicate.
Bien que M. Morsi ait promis d’être « le président de tous les Egyptiens », les Coptes restent largement sur leurs gardes, notamment vis-à-vis de l’influence des islamistes dans le processus en cours de rédaction d’une nouvelle Constitution.
« Nous rejetons la notion d’Etat religieux qui nous empêcherait de bénéficier de nos libertés en tant que Coptes », a déclaré l’evêque Morcos, qui dirige l’influente commission des médias de cette Eglise. « L’Etat doit être gouverné par la loi, pas par la religion », a-t-il ajouté dans le journal gouvernemental Al-Ahram.
AFP