dimanche, novembre 24, 2024
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France: Haine en ligne, l’Assemblée s’attaque à « l’impunité », des doutes sur l’application

Responsabiliser les plateformes internet, sans pour autant qu’elles s’érigent en juges et censurent à tour de bras: l’Assemblée nationale s’empare mercredi après-midi d’une proposition de loi LREM sensible qui durcit la lutte contre la haine sur internet.

Mesure phare de ce texte de la députée Laetitia Avia, sur le modèle allemand: plateformes et moteurs de recherche auront l’obligation de retirer les contenus « manifestement » illicites sous 24 heures, sous peine d’être condamnés à des amendes jusqu’à 1,25 million d’euros.

Sont visées les incitations à la haine, la violence, les injures à caractère raciste ou encore religieuses.

La proposition de loi, objet de 370 amendements, est au programme jusqu’à jeudi soir, avant un vote solennel le 9 juillet.

Internet est « le premier lieu d’expression de la haine aujourd’hui », or « l’impunité règne », dénonce la députée Avia, elle-même victime d’insultes pour « le seul fait d’être noire ».

« C’est un problème qu’aucun pays dans le monde n’a réglé », relève le secrétaire d’Etat au Numérique Cédric O, reconnaissant auprès de franceinfo qu' »il faut être assez humble, on pose une première brique (et) on espère qu’elle sera efficace ».

Fruit d’un travail depuis 2018 dans le cadre du plan gouvernemental contre le racisme et l’antisémitisme, le texte de Laetitia Avia reprend des préconisations d’un rapport au Premier ministre coécrit avec l’enseignant franco-algérien Karim Amellal et le vice-président du Conseil représentatif des institutions juives (Crif) Gil Taïeb.

« Liberté d’expression » –

Outre les retraits sous 24 heures, il est prévu un « bouton » identique pour les signalements par les utilisateurs.

Les plateformes devront rendre compte des « actions et moyens » mis en œuvre. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) veillera au respect du devoir de coopération et pourra, en cas de manquement persistant, imposer une sanction allant jusqu’à 4% du chiffre d’affaires annuel mondial.

Le président du Crif Francis Kalifat salue auprès de l’AFP des dispositions allant « dans le bon sens ».

De leur côté, les trois principales organisations françaises de professionnels du numérique – Tech in France, Syntec Numérique et l’Asic – estiment que les députés visent trop large dans les contenus, « au risque de compromettre » l’application.

Les grandes entreprises du numérique affichent leur soutien au renforcement de la lutte contre la haine en ligne, mais l’obligation de retrait inquiète. Car elle obligera les plateformes à décider très rapidement, au risque d’une cascade de polémiques et conflits juridiques.

Facebook en particulier, grand allié d’Emmanuel Macron pour une meilleure régulation d’internet, a fait part de son inquiétude.

Cédric O a indiqué que si « les injures racistes, antisémites ou homophobes » devront être retirées, les contenus « gris » nécessitant une interprétation seront étudiés par « un groupe de travail entre les plateformes, des magistrats ou encore des représentants de l’administration et de la société civile » afin de donner des lignes directrices.

Les députés « marcheurs » disent leur « fierté » de défendre cette « vraie proposition de loi d’origine parlementaire », leurs alliés du MoDem se félicitent de ses « outils » qu’ils veulent encore améliorer.

Parmi les oppositions, Les Républicains, comme les élus UDI, PS ou PCF, veulent eux redonner sa place au juge, et non aux algorithmes des plateformes, pour apprécier ce qui est illicite.

Si la plupart des groupes politiques soutiennent la lutte contre la cyber-haine, les communistes déplorent que « la régulation soit confiée aux Gafa (Google, Amazon, Facebook et Apple) et non pas à une puissance publique ». Les Insoumis jugent le dispositif « dangereux pour la liberté d’expression », craignant « des possibilités de censure par une plateforme privée ».

Les députés RN sont également « hostiles » à un texte qui « porte en germe une certaine dangerosité pour les libertés publiques ».

« Censures à la carte? »: munis d’une pancarte portant cette interrogation, une poignée de « gilets jaunes » se sont rassemblés aux abords de l’Assemblée mercredi matin, a constaté une journaliste de l’AFP.

Eric Ciotti (LR) veut lui « arrêter avec ce défoulement de haine qui se cache souvent derrière l’anonymat » des réseaux sociaux. Par un amendement, il demande de « rendre obligatoire pour les opérateurs de plateforme en ligne la vérification de l’identité de leurs membres ».

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