Le constructeur automobile japonais Honda a annoncé mardi la fermeture en 2021 de son usine de Swindon au Royaume-Uni, à la stupeur du gouvernement britannique en plein brouillard du Brexit.
Cette usine, la seule en Europe du géant nippon, est le principal employeur de la ville du sud-ouest de l’Angleterre, avec 3.500 personnes.
« C’est une décision terrible pour Swindon et le Royaume-Uni », a réagi le ministre britannique des Entreprises Greg Clark, affirmant vouloir se battre avec les élus locaux et les syndicats pour limiter les dégâts en termes d’emplois.
Un porte-parole de Downing Street a ajouté que la Première ministre Theresa May avait échangé avec le président de Honda pour « lui exprimer sa déception ».
La nouvelle tombe d’autant plus mal que le gouvernement conservateur de Theresa May se bat pour maintenir l’attractivité du pays malgré le Brexit et a fait du secteur automobile l’un des axes majeurs de sa stratégie industrielle.
Bien que Honda n’ait pas lié sa décision à la prochaine sortie du Royaume-Uni de l’UE, Greg Clark a admis que cela avait pu peser dans la balance dans une intervention devant le Parlement. « L’industrie automobile, les investisseurs japonais et Honda en particulier ont été clairs depuis de nombreux mois sur le fait que le Brexit est une inquiétude supplémentaire », a-t-il dit.
Syndicats et habitants y voient aussi l’ombre du Brexit.
Pour Des Quinn, un responsable du puissant syndicat Unite, c’est le flou entretenu par Mme May sur la future relation avec l’UE qui agit comme un repoussoir pour les investisseurs.
« Ce n’est pas bon vraiment. Ils ne vont jamais l’avouer mais la raison c’est qu’ils partent à cause du Brexit », renchérit Michael Barkley, 32 ans, gérant d’un commerce dans le centre-ville de Swindon, où l’heure était à la consternation mardi.
« C’est le plus gros employeur de la ville. C’est terrible », résume Jason Foster, 46 ans, fonctionnaire, également interrogé par l’AFP.
Honda a justifié sa décision par la nécessité de revoir son modèle de production dans un contexte mouvant du marché mondial de l’automobile. Le siège européen du groupe restera toutefois au Royaume-Uni.
« Ce n’est pas le Brexit, mais le choix du principal lieu de production de la prochaine Civic qui a présidé à cette décision », a insisté le directeur général de Honda, Takahiro Hachigo, lors d’une conférence de presse à Tokyo.
– 150.000 voitures/an –
La production dans l’usine de Swindon a débuté en 1989 pour les moteurs et 1992 pour l’assemblage d’automobiles. Elle fabrique actuellement les Civic Hatchback et Civic Type R, selon les précisions données par le groupe, à raison de 150.000 voitures par an.
« Compte tenu des changements sans précédent qui affectent notre secteur, il est essentiel que nous accélérions notre stratégie d’électrification des véhicules et que nous restructurions nos activités mondiales », a déclaré Katsushi Inoue, patron de Honda en Europe, cité dans un communiqué.
Honda va aussi cesser de produire en 2021 des Civic en Turquie, où 38.000 véhicules sortaient chaque année des lignes.
Ces véhicules seront à l’avenir exportés depuis le Japon et la Chine. En revanche, pour le marché américain la Civic continuera d’être produite aux Etats-Unis.
– Décisions « douloureuses » –
Pour Peter Wells, professeur à l’Université de Cardiff, interrogé par la BBC, la décision de Honda est liée au fait qu’il « n’est pas vraiment parvenu à s’installer sur les marchés européens comme il le souhaitait ».
La décision de fermer le site de Swindon est un nouveau camouflet pour Londres.
Début février, un autre constructeur japonais, Nissan, avait renoncé à produire le crossover X-Trail, dans son usine de Sunderland (nord-est de l’Angleterre). Il a lui évoqué indirectement le Brexit même si le secteur de l’automobile au Royaume-Uni est aussi secoué par de nombreux autres défis, avec la désaffection du diesel face à une réglementation plus dure, ou encore le ralentissement du marché chinois.
Fin janvier, Airbus avait averti de décisions « très douloureuses » en cas de Brexit sans accord, une mise en garde également exprimée par le Premier ministre nippon, Shinzo Abe.