Les cardinaux ont achevé lundi la préparation du conclave au cours duquel ils éliront le successeur de Benoît XVI après sa démission historique et, selon les derniers pronostics, un Italien et un Brésilien seraient dans le peloton de tête, aucun « papapile » ne faisant toutefois consensus.
Le cardinal Tarcisio Bertone, secrétaire d’Etat de Benoît XVI et président du conseil de surveillance de l’Institut pour les oeuvres de religion (IOR), a exposé devant ses 114 pairs les efforts d’intégration de cette banque dans le système bancaire international, les contrôles et les études effectués par le groupe d’experts du Conseil de l’Europe, « Moneyval ».
L’IOR a été dans le passé au coeur de scandales retentissants mêlant mafia, services secrets, loge maçonnique. Benoît XVI avait décidé de rendre transparentes les finances du Vatican.
En mai dernier, le patron de l’IOR nommé par Benoît XVI, le banquier italien Ettore Gotti Tedeschi avait été limogé par surprise. Il a été remplacé en février seulement par l’industriel allemand Ernst von Freyberg.
Vingt-huit cardinaux ont pris la parole pendant cette ultime et dixième « congrégation ». « Certains auraient aimé parler plus », mais le collège des cardinaux a voté pour avoir l’après-midi libre afin de se préparer au Conclave mardi.
Au total 162 interventions se sont succédé depuis lundi dernier, permettant d’exprimer « les attentes en ce qui concerne le prochain pape », a dit le père Federico Lombardi, porte-parole du Saint-Siège, au cours de sa conférence de presse quotidienne.
Six candidats environ se seraient dégagés, selon des sources informées.
Les prises de parole ont été tous azimuts, des questions étant posées sur la collégialité insuffisante et les moyens d’améliorer le gouvernement central de l’Eglise.
Lundi après-midi, tout le personnel qui assure le service et la logistique des pères du Conclave, de l’hôtellerie de Sainte-Marthe aux maîtres de cérémonie et aux techniciens chargés de la maintenance de la Chapelle Sixtine, en passant par les infirmiers et les conducteurs de navettes, prêtera serment de ne rien dévoiler, sous peine d’excommunication. Il s’agira d’un total de 90 personnes, hommes et femmes.
Ou au contraire une situation de blocage apparaîtra-t-elle vite, en présence de blocs de voix égaux mais insuffisants pour atteindre le seuil nécessaire d’électeurs ? Dans ce cas, le jeu serait ouvert aux « outsiders » : les noms qui circulent alors sont entre autres les archevêques de Boston et New York, Sean O’Malley et Timothy Dolan, les cardinaux hongrois, Peter Erdö, autrichien Christoph Schönborn, ou mexicain Francesco Robles Ortega.
Pour être élu 266e pape de l’histoire, il faudra obtenir 77 voix, soit les deux tiers des suffrages du collège des 115 électeurs.
Les 5.600 représentants des médias présents place Saint-Pierre multiplient les émissions spéciales, s’interviewant entre eux, cherchant des petites anecdotes à raconter sur les anciens conclaves, faute d’avoir du solide à se mettre sous la dent.
Dimanche, les cardinaux ont célébré des messes dans les églises de Rome dans lesquelles ils sont « incardinés » (une église leur est attribuée quand ils sont faits cardinaux). Ils n’ont rien laissé transparaître de leurs discussions, malgré l’insistance des médias.
Celui qui était lundi le numéro un sur la liste des favoris, Angelo Scola, qui restituerait l’Eglise universelle aux Italiens après un intermède polonais et allemand de 35 ans, a célébré une messe dans l’Eglise des Saints Apôtres, au coeur de Rome.
« Donne-nous un pasteur saint qui bâtisse l’Eglise avec le témoignage de sa vie », a-t-il dit dans son homélie, mettant l’accent sur la crédibilité du « témoignage ».
Cet archevêque conservateur, défenseur de la famille traditionnelle, très proche de Benoît XVI, mais ouvert au monde –il dirige une fondation et une revue, Oasis, de dialogue avec l’islam– a souhaité que le futur pape « suive les traces des grands papes des 150 dernières années » et inscrive donc son pontificat dans la continuité.
Le cardinal Scherer a été suivi aussi par des dizaines de journalistes et de photographes, mais il n’a rien révélé, esquivant les questions sur sa candidature.
Cet homme de 63 ans, énergique, carré, bon administrateur de son immense diocèse — le plus grand du continent latino-américain — et qui a travaillé pendant sept ans à la Congrégation des évêques à Rome, aurait la préférence de personnalités importantes dans la vieille garde de la Curie romaine autour du cardinal Giovanni Battista Re.
Le cardinal Ouellet a lui aussi célébré la messe dimanche à Rome. Lui qui a présidé sous Benoît XVI la Congrégation des évêques (un poste sensible et essentiel) et a longtemps travaillé en Amérique Latine, pourrait rassembler sur son nom des suffrages sud-américains.
Conservateur sur les questions des moeurs, intransigeant sur le contenu de la foi, combatif dans le domaine de la justice sociale, il a un profil typique « ratzingérien », comme la plupart des « papabili ».
AFP