Trop élevés? Trop nombreux? Aux Etats-Unis, les impôts sur le revenu occupent le coeur du grand débat sur la réduction des déficits, mais ils se situent en fait au plus bas depuis la fin de la présidence de Ronald Reagan il y a 20 ans.
A l’approche du « mur budgétaire », le « Big Bang » fiscal qui doit entrer automatiquement en vigueur en janvier et relever brusquement les impôts, toute la classe politique de Washington s’est pourtant engagée à maintenir les impôts au niveau actuel, historiquement bas, pour la quasi-totalité des Américains.
Les Etats-Unis sont le troisième pays le moins imposé des 34 pays de l’OCDE, après le Chili et le Mexique, avec seulement 25,1% de prélèvements obligatoires sur la richesse nationale (produit intérieur brut)–contre 44,2% en France, le troisième pays le plus taxé de ce groupe de pays riches en 2011.
Les recettes fiscales du seul Etat fédéral n’ont même jamais été aussi faibles depuis 1950, selon la Maison Blanche.
La récession de 2008 et la mollesse de la reprise expliquent en partie la faiblesse des rentrées fiscales.
Mais pour les Américains les plus riches, l’impôt sur le revenu n’avait pas été aussi bas depuis la fin des années 1980 et début des années 1990.
Dans les années 1950, le taux de la tranche la plus élevée de cet impôt atteignait 91%. Jusqu’en 1981, le taux maximal dépassait 70%.
Il est ensuite descendu à 50% puis à 28% sous la présidence de Ronald Reagan; il est remonté sous Bill Clinton à 39,6%, puis redescendu depuis le mandat de George W. Bush à 35%, un niveau que le président Obama a maintenu. En France, la tranche la plus élevée était de 41% jusqu’à la création récente d’une tranche supplémentaire à 45% pour les revenus de plus de 150.000 euros.
Face à la crise, Barack Obama a aussi ajouté une baisse des cotisations sociales.
Les successions de baisses d’impôts ont accentué la divergence fiscale entre les Etats-Unis et les pays d’Europe de l’Ouest.
Un célibataire sans enfant gagnant le salaire moyen paie en moyenne 28% d’impôts en France, contre 22% aux Etats-Unis, selon l’OCDE. A cela s’ajoutent taxes et impôts locaux.
Cette différence est accentuée par une originalité américaine de taille: les Américains ne paient pas de TVA fédérale (taxe sur la valeur ajoutée), contrairement à la quasi-totalité des pays riches, comme la France où les consommateurs acquittent 19,6% de TVA sur leurs achats.
De nombreux Etats et villes américaines ont une taxe sur la consommation, mais elle est inférieure, souvent entre 5% et 10%. Elle est même régulièrement suspendue, par exemple à New York sur les achats de vêtements de moins de 110 dollars (86 euros).
A l’inverse, l’impôt sur les sociétés est l’un des plus élevés du monde riche, à 35%, un taux que le président Barack Obama a promis de réduire.
D’innombrables avantages fiscaux grèvent ensuite le budget américain. Les ménages déduisent par exemple de leurs revenus imposables les intérêts d’emprunts sur l’achat de leur logement –une déduction qu’avait brièvement mise en place Nicolas Sarkozy en France.
Le « mur » de janvier prévoit une hausse des impôts de 20% pour tous les ménages, selon le Tax Policy Center, et une baisse des dépenses publiques de près de 10%, dans le but de réduire un déficit record.
Pour l’éviter, des déductions pourraient disparaître ou être plafonnées.
Barack Obama exige surtout le relèvement des impôts pour les 2% d’Américains les plus riches, ce que les républicains refusent. Mais la hausse des taux pour le reste des ménages américains ne fait même pas partie de la négociation.
AFP