Les islamistes armés qui contrôlent depuis plus de six mois le nord du Mali ont fusillé mardi en public à Tombouctou un homme accusé de meurtre, ont affirmé à l’AFP des témoins joints depuis Bamako.
« L’exécution s’est déroulée entre deux hôtels de la ville de Tombouctou » vers 17H30 locales et GMT, « j’ai vu l’homme tomber après les coups de feu », a déclaré à l’AFP un premier témoin.
L’exécution a été confirmée à l’AFP par un conseiller municipal de Tombouctou, qui en a également été témoin. Selon lui, une centaine de personnes ont assisté à la fusillade.
L’homme exécuté est un membre de la rébellion touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) « qui avait tué par balle un pêcheur à 30 km de Tombouctou », a affirmé de son côté un troisième témoin, qui s’est identifié comme Bamoussa.
Ville mythique, Tombouctou est contrôlée depuis début avril par Ansar Dine (Défenseurs de l’islam) et Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), deux des groupes islamistes armés qui se partagent le vaste nord malien avec le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao).
Ces groupes jihadistes en ont évincé leurs ex-alliés du MNLA et ont commis depuis plusieurs exactions et violences au nom de leur interprétation rigoriste de la charia (loi islamique) dont ils prônent l’application dans tout le Mali.
Mardi également, selon des témoins, quatre habitants de Douentza, ville de la région de Mopti (centre) située à la limite du Nord, ont reçu chacun 40 coups de fouets par un responsable du Mujao, qui contrôle Douentza. La flagellation s’est déroulée devant « des centaines d’habitants », d’après un des témoins.
Un élu de la région, autre témoin, a précisé que les quatre hommes avaient été arrêtés la semaine dernière dans un débit clandestin de boissons. Le propriétaire, un chrétien, a fui la ville et était recherché par les islamistes, a-t-il indiqué.
Dans un rapport intitulé « Mali: Les groupes armés islamistes sèment la peur dans le Nord » publié fin septembre, l’organisation Human Rights Watch (HRW) a dénoncé les « graves abus à l’encontre des populations » commis dans ces régions par les salafistes.
« Les lapidations, les amputations et les flagellations sont devenues courantes dans une tentative évidente de forcer la population locale à adopter leur vision du monde. Pour imposer leur interprétation de la charia, ils ont également organisé une parodie de justice tragiquement cruelle et ont recruté et armé des enfants dont certains n’avaient que 12 ans », affirme HRW.
Le 10 septembre, cinq hommes accusés de vol ont été amputés, chacun d’une main et d’un pied, par le Mujao à Gao (nord-est).
Le 29 juillet, des membres d’Ansar Dine avaient lapidé à mort, en public, à Aguelhok (nord-est) un homme et une femme auxquels ils reprochaient d’avoir eu des enfants sans être mariés.
D’autres couples jugés « illégitimes », des hommes accusés d’avoir bu de l’alcool, de fumer, ou encore d’être des voleurs ou des violeurs ont aussi été fouettés en public par les islamistes dans plusieurs villes, notamment à Tombouctou où ils ont aussi détruit des tombeaux de saints musulmans vénérés par la population.
AFP