Le président ivoirien Alassane Ouattara a engagé un bras de fer avec les autorités ghanéennes, ordonnant la fermeture des frontières entre les deux pays, après une attaque commise en Côte d’Ivoire par des hommes venus du Ghana, nouvel épisode de tension entre Accra et Abidjan.
Les frontières terrestres, maritimes et aériennes entre la Côte d’Ivoire et le Ghana sont fermées depuis vendredi et jusqu’à nouvel ordre, une décision prise après l’attaque du poste-frontière de Noé, à environ 170 km à l’est d’Abidjan, par des assaillants venus du Ghana, selon les autorités ivoiriennes.
« Ouattara se fâche et ordonne la fermeture des frontières », titrait samedi le quotidien Soir info, évoquant « une première dans l’histoire des deux pays ».
A Accra, le vice-ministre de l’Intérieur, Kobby Acheampong, a assuré que son pays travaillait étroitement avec les autorités ivoiriennes pour répondre aux problèmes de sécurité soulevés par Abidjan.
« Il n’y a rien que nous puissions faire, si ce n’est coopérer avec le gouvernement ivoirien pour apaiser la situation. Nous considérons qu’il s’agit d’une situation grave. Les violences contre la population ivoirienne sont inacceptables », a-t-il déclaré à l’AFP
Sur place, plusieurs centaines d’Ivoiriens, en provenance du Ghana, du Togo ou du Bénin, sont bloqués dans la ville frontière ghanéenne d’Elubo, en face de Noé.
Tous les hôtels de la ville sont pleins et nombre d’entre eux ont dormi à la belle étoile ou dans des écoles, selon des témoins joints par l’AFP.
« Qu’est-ce qui arrive à Ouattara, ces choses ne se font pas dans la précipitation », a témoigné une commerçante, en colère.
Les attaques visant les forces de sécurité sont attribuées par le pouvoir à des partisans de l’ancien président Laurent Gbagbo, ce que ceux-ci ont démenti.
De nombreux responsables politiques et militaires du régime Gbagbo ont trouvé refuge au Ghana, qui partage une frontière de près de 700 km avec la Côte d’Ivoire, provoquant la colère d’Abidjan.
Certes, Alassane Ouattara a pris soin de saluer « la franche collaboration et la coopération exemplaire entre les deux pays », mais la fermeture des frontières ressemble à une « déclaration de guerre », selon des observateurs.
Vendredi soir, le ministre de la Défense Paul Koffi Koffi avait d’ailleurs jugé « inacceptable » le fait que les assaillants soient venus du Ghana et s’y soient repliés, en toute impunité.
Dans le collimateur figure notamment le porte-parole en exil de Laurent Gbagbo, Justin Koné Katinan, adversaire virulent du nouveau pouvoir, accusé de « crimes économiques » par Abidjan, qui a été arrêté le 24 août à Accra.
La justice ghanéenne examine depuis cette date son extradition vers la Côte d’Ivoire, suscitant l’impatience au sein du pouvoir ivoirien.
Le nouveau président ghanéen John Dramani Mahama avait promis, lors d’une visite à Abidjan le 5 septembre, lors d’une visite à Abidjan, qu’il ne permettrait que son pays serve de « base arrière » pour déstabiliser la Côte d’Ivoire.
Des observateurs soulignent que la fermeture des frontières, très pénalisante sur le plan commercial, n’a qu’une efficacité relative sur le plan sécuritaire, en raison de la porosité de la frontière terrestre entre Côte d’Ivoire et Ghana, parsemée de pistes empruntées par des contrebandiers.
Cinq assaillants ont été tués et cinq arrêtés dans les combats autour du poste de Noé, selon les autorités, qui ont fait état d’un blessé parmi les militaires ivoiriens.
Quelques heures plus tôt, deux commissariats et une gendarmerie avaient été visés par des tirs dans le sud d’Abidjan, faisant trois morts. Le ministre de la Défense Paul Koffi Koffi a assuré que les deux assauts n’étaient pas liés, attribuant les incidents à Abidjan à de « vulgaires bandits ».
Ces attaques, survenant après un mois d’accalmie, se sont produites le jour même où une cérémonie a rendu hommage à quinze militaires victimes de précédents assauts en août, marquant le plus grave regain de tension en Côte d’Ivoire depuis la fin de la crise post-électorale de décembre 2010-avril 2011, qui a fait quelque 3.000 morts.
AFP