
Le corps du patriarche, portant une tiare et revêtu d’habits sacerdotaux richement ornés, était disposé assis sur un trône de bois sculpté dans la cathédrale Saint Marc du Caire, siège de l’Eglise copte. Face à lui, de nombreux fidèles étaient en larmes et se lamentaient.
Dehors, la file des fidèles vêtus de noir s’est étendue sur plus d’un kilomètre et malgré les efforts des forces de l’ordre pour canaliser la foule, trois personnes sont mortes étouffées, selon des sources au sein de l’Eglise qui n’ont pas donné plus de précisions.
La télévision d’Etat a appelé les fidèles à ne pas tous se rendre dès dimanche à la cathédrale, leur assurant qu’ils avaient jusqu’à mardi, date des funérailles, pour rendre hommage au défunt.

« C’est une grande perte pour l’Egypte », a déclaré à l’AFP le ministre du Tourisme, Mounir Fakhry Abdel Nour, un Copte proche de Chenouda. « Il était sage et très écouté. Il va nous manquer en ces temps où nous avons besoin de sagesse et d’esprit patriotique ».
« L’Egypte pleure », a titré le quotidien indépendant Al-Masry al-Youm, tandis que de nombreuses personnalités ont rendu hommage au patriarche, dont la silhouette fragile était familière aux chrétiens comme aux musulmans.
« L’Egypte a perdu un de ses plus grands hommes », a déploré Al-Azhar, plus haute institution de l’islam sunnite.

Les évêques coptes d’Egypte et du reste du monde sont désormais attendus au Caire pour les obsèques et les préparatifs en vue du choix du nouveau chef de cette Eglise orthodoxe.
Le processus, sans limite de temps, avait pris sept mois avant la nomination de Chenouda III en 1971. En attendant, l’évêque Pachomius (Pachôme), de la province de Beheira (delta du Nil), doit assurer l’interim pendant deux mois.
La mort du patriarche intervient dans un contexte de « profonds changements politiques et sociétaux en Egypte », a relevé le réalisateur copte Daoud Abdel Sayed, appelant à la désignation d’un successeur « capable de faire aboutir des réformes ».
Très conservateur sur les questions de dogme –il était farouchement opposé à tout assouplissement de l’interdiction du divorce chez les Coptes–, Chenouda III était aussi considéré comme un ardent défenseur de sa communauté, qui représente 6 à 10% de la population égyptienne.
Pour de nombreux Egyptiens, il était un élément de stabilité dans un pays à l’avenir politique toujours incertain. Le raz-de-marée des partis islamistes aux récentes législatives a en effet ravivé les craintes de la communauté copte, marginalisée et cible de violences parfois meurtrières.
A l’étranger, le pape Benoît XVI a rendu hommage à un « grand pasteur » et le président américain Barack Obama a salué la mémoire d’un « avocat de la tolérance et du dialogue religieux ».
Israël a évoqué « un dirigeant spirituel important » qui a apporté sa « contribution à la fraternité et à la coexistence en Egypte » et l’Iran a salué son action « en faveur de la justice et de la paix ».
AFP