
Un désordre chaotique a fait place à la cérémonie organisée par l’Instance électorale indépendante (Isie) en présence de représentants politiques et d’artistes. Protestations et cris ont étouffé la musique et la poésie prévues au programme.
« L’expression de la souffrance que je viens d’entendre est la plus belle des musiques », lance le poète Seghaier Ouled Ahmed, quittant les lieux, où il devait déclamer ses vers avec l’Egyptien Ahmed Foued Nejm.
Un grand drapeau tunisien avec les noms de martyrs inscrits dessus avait été installé sous la coupole du stade El Menzah.

Amenés par bus de Sidi Bouzid, du Kef, de Kasserine et d’autres villes de l’intérieur, les parents de morts devaient se faire remettre des blasons avec l’inscription: « En hommage aux martyrs de la révolution, l’Isie décerne ce blason à la famille de … ».
« Comment peut-on nous inviter à faire la fête lorsque nous n’avons pas fait notre deuil », s’étonne Sihem Jeffel, 37 ans, dont le mari Tahar a été abattu sous ses yeux le 13 janvier dans un quartier proche du Palais présidentiel de Carthage.
La jeune femme serre sontre elle Mohamed Taha, son bébé aux yeux bleus né trois mois après la mort de son père. « Je suis ici pour lui et pour mes deux autres enfants ».
Selon un décompte de l’ONU, 300 Tunisiens ont été tués et 700 blessés durant le soulèvement de décembre-janvier.
« Nos blessures ne se fermeront pas tant que les assassins de nos enfants ne seront pas connus et punis », affirme Hayet Laroussi, 30 ans, au milieu de femmes agglutinées autour du président de l’Isie ne sachant plus où donner de la

« Nous avons droit à la vérité, je ne renoncerai jamais », sanglote une mère de trois enfants.
« Merci à M. Jendoubi, rendre hommage à nos martyrs est un bon geste », tempère toutefois la mère de Bouazizi.
Pour une autre mère endeuillée, « les familles ont en ras le bol, les gens n’ont pas compris le sens de cet hommage, M. Jendoubi a essuyé la colère mais il n’y est pour rien », raisonne-t-elle.
« C’est de l’Assemblée constituante que nous devons exiger la vérité sur le sang versé de nos martyrs », ajoute cette femme de Kabaria, un des quartiers les plus pauvres au sud de Tunis.
Sur un stand traînent toujours une centaine de coffrets contenant des blasons qui n’ont pas trouvé preneurs.
AFP