vendredi, mars 29, 2024
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RDC: à Nakiele, des femmes victimes de viol rejetées par leur mari

RDC: à Nakiele, des femmes victimes de viol rejetées par leur mari
"Mon mari refuse aussi les repas que je lui prépare. Il mange ce que mes soeurs lui font. Je ne comprends pas pourquoi on doit m’abandonner", poursuit la jeune femme âgée de 19 ans, mère d’un enfant de 6 mois.
A Nakiele, un village de 12.300 habitants perché sur la crète d’une colline dans les moyens plateaux du territoire de Fizi, dans la province du Sud-Kivu (est), 121 femmes ont déclaré au médecin de l’hôpital avoir été victimes de viols commis dans la nuit du 11 au 12 juin par des soldats ayant fui un centre militaire.
Depuis, plus d’une dizaine d’entre elles ont été rejetées par leur mari.
Le 11 juin en fin de matinée dans ce village isolé — la piste étroite qui y mène s’arrête 2 km plus loin –, à l’arrivée de plus de 150 soldats déserteurs commandés par un colonel, ancien membre d’une milice Maï Maï, les hommes ont fui dans la brousse.
Ils ont abandonné femmes et enfants par peur d’être utilisés comme porteur par les militaires qui les frappent s’ils refusent. Seuls une poignée sont restés, dont le chef du village et le médecin de l’hôpital avec ses infirmiers. 

RDC: à Nakiele, des femmes victimes de viol rejetées par leur mari
Lors des opérations militaires successives menées depuis 2009 contre les groupes armés dans la région, les soldats passent dans les villages et "demandent des rations, une chèvre, et les femmes restent en toute quiétude. Mais cette fois ça a tourné mal", explique à l’AFP le chef de la localité de Nakiele, Losema Etamo Ngoma.
Quand son mari est revenu chez lui le matin du 12 juin après le départ des soldats, Sifa, 20 ans lui a dit avoir été violée.
"Il m’a dit que maintenant j’étais une femme de militaire, que je devais suivre les soldats et ne pas rester ici. Mais il ne m’a pas encore chassée. Je ne comprends pas pourquoi il dit ça", dit-elle en nouant et dénouant machinalement le noeud de l’étoffe qui enserre dans son dos son enfant d’un an.
Souvent en RDC le viol reste un tabou. Les victimes se taisent par crainte d’être rejetées par leur mari, leur famille et aussi leur communauté.
A Nakiele, "les femmes ont eu le courage de le dire, il y a eu un phénomène collectif, et la sensibilisation d’ONG pour qu’elles se déclarent", relève Eugène Byamoni, un psychologue qui a entendu une cinquantaine d’entre elles les 16 et 17 juin.
"J’ai honte de passer dans le village. Je suis l’objet de critiques, de moqueries, on dit que je suis une femme de militaire, porteuse de maladie (ndlr: le Sida)", dit d’une voix faible Dekila, 28 ans. Son mari lui a dit "de partir et de laisser le lit".

RDC: à Nakiele, des femmes victimes de viol rejetées par leur mari
Il faut réunir les hommes et les femmes, les sensibiliser, expliquer que le malheur qui est arrivé n’est pas de la faute des femmes", ajoute-elle. "Depuis que ce problème a éclaté, j’ai réuni un groupe de dix sages pour parler avec ces hommes, pour qu’ils puissent encore vivre avec ces femmes, leur dire que ce qui est arrivé aux femmes l’a été par la force, contre leur gré, et qu’ils doivent supporter cela", se désole le chef du village.
A la fin de l’entretien avec le journaliste, il dit avoir une "recommandation": "le groupe de sages n’a pas la méthodologie, il faudrait que des spécialistes viennent leur apporter des méthodes, le plus vite possible, sinon les foyers vont continuer à se disloquer".
Dans deux autres villages proches, 127 femmes ont aussi dit avoir été violées par les soldats. 

Diasporas-News —  AFP

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