Au moins huit civils ont été tués samedi au cours d’un raid français en Somalie, qui a échoué à libérer un otage notamment parce que les insurgés islamistes avaient été prévenus de l’arrivée des commandos, ont rapporté dimanche des témoins sur place.
Quatre de ces civils ont été tués lors de la progression au sol des commandos français vers la localité de Bulomarer, où l’otage était réputé être détenu.
Quatre autres civils sont morts dans les combats qui ont suivi entre ces commandos et les insurgés islamistes à Bulomarer, ont rapporté ces témoins, interrogés par téléphone depuis Mogadiscio.
« Quatre civils, dont trois d’une même famille, sont morts. Ils ont été tués hors de Bulomarer, là où les commandos français ont atterri avant d’entrer dans cette ville », a affirmé un de ces habitants, Adan Derow.
« Nous ne savons pas pourquoi ces civils ont été tués » hors de Bulomarer, a indiqué pour sa part Ali Moalim Hassan, un notable local, ajoutant que leurs corps ont été retrouvés près d’un lieu appelé Dhaydog. « Quatre autres civils ont également été pris dans les échanges de tirs et sont morts dans la localité de Bulomarer », a ajouté cet habitant.
Les quatre civils tués hors de Bulomarer, dans des conditions qui demeurent obscures, sont un couple, leur fils, et un autre homme, selon la population sur place. A Bulomarer même, une femme, son enfant et le gardien d’un marché local figurent parmi les victimes, selon ces sources.
Les commandos français ont perdu pour leur part au moins un soldat dans le raid, et les autorités françaises ont fait état de 17 « terroristes » tués.
Le gouvernement français estime que « tout donne à penser que (l’otage) Denis Allex a été abattu par ses geôliers » lors de l’assaut, alors que les islamistes shebab affirment pour leur part que ce dernier est toujours vivant, sans en avoir apporté la preuve à ce stade.
Selon un des témoins interrogés, les insurgés islamistes ont été prévenus par des habitants de l’atterrissage de plusieurs hélicoptères d’assaut à trois kilomètres environ de Bulomarer.
« Des gens ont vu (les commandos français) débarquer dans des champs, les shebab ont été informés que des hélicoptères avaient atterri et qu’ils avaient débarqué des soldats, et ainsi ils (les islamistes) ont pu se préparer », a déclaré M. Derow.
Un commandant local islamiste a confirmé à l’AFP avoir été prévenu de l’arrivée des soldats français, sans préciser comment.
« Les combattants moudjahidine étaient déjà au courant de l’attaque et nous étions prêts à nous défendre, grâce à Dieu », a déclaré au téléphone à l’AFP Cheikh Mohamed Ibrahim.
Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a reconnu samedi que la résistance avait été « plus forte que prévu » pour les commandos français qui étaient, selon une source dans les milieux du renseignement français, une cinquantaine à avoir éte amenés dans le sud somalien à bord d’au moins cinq hélicoptères.
Plusieurs habitants interrogés par l’AFP exprimaient leur colère au lendemain du raid français.
« Ils ont tué des civils innocents et ils sont repartis sans avoir rien obtenu, les gens ici sont très déçus du gouvernement français en raison de ces victimes civiles », a déclaré un autre habitant de Bulomarer, Moalim Ahmed Nur.
« Ces gens (les commandos français) étaient fous », a estimé un employé somalien d’une agence humanitaire locale, s’exprimant sous couvert d’anonymat. « On nous dit qu’ils étaient environ une quarantaine face à plus de cent combattants shebab lourdement armés. Leur mission était impossible et très peu professionnelle », ajoute-t-il.
AFP