dimanche, décembre 22, 2024
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Un Burkinabè passionné de cinéma à la conquête des Carpates

Un Burkinabè passionné de cinéma à la conquête des Carpates
Burkinabè passionné de cinéma, Theodore Somda n’avait jamais imaginé vivre en Roumanie. Devenu volontaire de la francophonie dans ce pays, il contribue à faire connaître la culture africaine dans les Carpates et voit ses clichés sur l’Europe de l’Est exploser.
« En ce moment, je ressens une immense fierté car le cinéma africain est à l’honneur en Roumanie et je me dis que j’y ai un peu contribué », confie à l’AFP, avec un immense sourire, ce trentenaire diplômé de cinéma et d’informatique venu de Ouagadougou.
Chargé de projets cinéma et audiovisuel à l’Institut français de Cluj (nord-ouest) pendant un an, Theodore a contribué à organiser le Festival du film francophone avec une équipe multiculturelle dirigée par Boglarka Nagy, Roumaine de la minorité hongroise.
Consacré à l’Afrique, le Festival propose actuellement au public roumain 15 films dont plusieurs primés au dernier Fespaco, le grand rendez-vous du cinéma africain.
Les habitants de Bucarest ou de Transylvanie, découvrent ainsi la balade dans Dakar d’un homme qui va mourir (« Aujourd’hui », d’Alain Gomis, Etalon d’or au Fespaco) ou le périple tragique de migrants africains en quête d’une vie meilleure en Europe dans « La Pirogue » de Moussa Touré.
Et se dessinent des liens inattendus entre l’Afrique et la Roumanie.
« J’ai ressenti une grande empathie avec les migrants de « La Pirogue ». J’ai pensé aux gens qui ont tenté de fuir la Roumanie sous la dictature communiste », dit à l’AFP Oana Manole, une spectatrice de Bucarest.
« Je comprends cette impulsion de partir vers l’Occident à tout prix, en dépit du danger », ajoute-t-elle, notant que « les Roumains voient eux aussi parfois l’Europe de l’Ouest comme un eldorado ».
« Partir loin de sa culture »

Un Burkinabè passionné de cinéma à la conquête des Carpates
Plus de deux millions de Roumains ont émigré ces dernières années pour échapper à la pauvreté.
Le réalisateur sénégalais Moussa Touré, présent à Bucarest, trouve aussi des similitudes: « les Roumains comme les Africains ont souffert du regard condescendant de certains en Europe de l’Ouest mais en même temps, ils ont une culture de l’accueil », remarque-t-il.
Dans une Europe qui se crispe face à l’étranger, Theodore a été surpris par le bon accueil en Roumanie.
« Je me demandais comment j’allais être intégré dans un pays où il n’y a pas beaucoup de Noirs », dit-il en racontant « ne pas en avoir vu un seul » durant trois semaines après son arrivée à Cluj.
Selon des chiffres officiels, à peine un peu plus de 4.300 citoyens de pays africains résident légalement en Roumanie (21 millions d’habitants).
« Mais mon expérience est positive. La couleur de ma peau n’est généralement pas un problème. Les gens me regardent mais c’est de la curiosité normale, ils n’ont pas l’habitude. Il n’y a pas d’agressivité », dit-il.
Theodore rappelle que la dernière gagnante du concours « La voix de la Roumanie », Julie Mayaya, est une jeune noire roumaine de père congolais.
A la télévision, plusieurs présentateurs sont noirs ou métis. Un des chanteurs de folklore roumain est aussi d’origine congolaise.
« Avant de venir, j’avais encore l’image de la Roumanie communiste, d’un pays froid, gris… mais c’est très différent: il y une diversité des paysages et un côté multiculturel que je n’avais pas imaginé », dit Théodore. La Roumanie compte près de 20 minorités nationales (Hongrois, Roms…).
Favoriser les échanges tout en soutenant le développement des pays du Sud et de l’Est est l’un des objectifs du programme de volontaires de l’Organisation internationale de la francophonie. 50 jeunes partent chaque année pour un an.
Cette expérience a servi à Rufin Mbou, ex-volontaire à Cluj, pour un documentaire sorti en 2012, « Tsofa », contant l’aventure de 34 Congolais recrutés par une firme roumaine pour être chauffeurs de taxi. Exploités, certains attaquèrent leur employeur en justice, perdirent leur contrat et furent expulsés. D’autres ont voulu rester en Roumanie.
Theodore espère que son séjour dans un pays connu pour la qualité de son cinéma le fera aussi avancer vers la réalisation d’un long métrage, son rêve: « Partir loin de sa culture met en danger nos certitudes et nous enrichit ». 

AFP 

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