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Affaire Habré : Vers la tenue d’un procès au Sénégal

Affaire Habré : Vers la tenue d’un procès au Sénégal
L’accord intervenu doit permettre la création d’une juridiction ad hoc, basée à Dakar pour juger Hissène Habré des crimes de génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et la torture. « Vu les circonstances et les problèmes rencontrés à la tenue du procès, la juridiction Ad hoc semble être la solution. C’est une juridiction non permanente créée exceptionnellement pour de tels cas » explique Aissatou Ndong, avocate sénégalaise au barreau de Paris.
Un tribunal Ad Hoc à Dakar
En clair, il s’agit de la création d’un tribunal spécial pour juger Hissène Habré au Sénégal. L’accord a été signé en juillet à Dakar après quatre jours de réflexions entre des experts de l’Union africaine et des juristes sénégalais. Le texte prévoit la création de quatre chambres extraordinaires au sein de la juridiction sénégalaise. Ces chambres vont statuer sur les différents chefs d’accusation. Chaque chambre sera composée de magistrat africains, de juges sénégalais et d’un représentant de l’Union africaine. Le recrutement des juges doit permettre la mise en place des chambres spéciales pouvant aboutir au jugement de Hissène Habré. « C’est la première fois, non seulement en Afrique mais dans le monde, que les tribunaux d’un pays jugent un ancien dirigeant d’un autre pays pour des crimes présumés de droits humanitaires » a constaté Reed Brody, conseiller de l’organisation de défense des droits humains, Human Right Watch, dans la presse française. Rappelant le cas Pinochet, c’est une position que nuance Samba Kandji, juriste en droit international qui a soutenu un mémoire de DEA sur « la compétence universelle : entre obligation et faculté pour les Etats ». La compétence universelle qui est souvent soulevée dans l’affaire Habré.
« La compétence universelle c’est la faculté donnée à un Etat de juger un étranger qui a commis un crime sur des étrangers à l’étranger ». Le lien : Habré habite au Sénégal depuis 1990. Dans ce cas, la compétence universelle s’exprime en deux manières soit on juge l’individu soit on extrade.
Un éventuel procès qui pose questions
Inculpé une première fois par la justice sénégalaise en 2000, Hissène Habré devrait être poursuivi pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et torture. L’ancien président tchadien au pouvoir de 1982 à 1990, est réfugié au Sénégal depuis 22 ans.
La justice sénégalaise sous Abdoulaye Wade s’était alors jugée « incompétente » pour le traduire en justice. Rebondissement en 2006, l’Union africaine demande alors au Sénégal de juger l’ancien président tchadien « au nom de l’Afrique ». Abdoulaye Wade avait réclamé 5 milliards 600 millions nécessaires pour l’organisation du procès au Sénégal. Une somme conséquente que certains mettront sur le compte d’une « dérobade supplémentaire » après son refus d’extrader Hissène Habré en Belgique où une information judiciaire avait été ouverte après le dépôt de plainte de « victimes ».
Aujourd’hui quelle est la compétence des autorités Sénégalaises pour juger Hissène Habré? « On suit la règle de l’extradition à la lettre : phase judiciaire suivie d’une autre administrative. A mon sens la politisation va beaucoup nuire à la tenue d’un procès véritablement équitable » s’inquiète Samba Kandji.
La question du timing se pose également. Est-ce que, comme l’avait annoncé en juin le nouveau président sénégalais Macky Sall, le procès pourra débuter avant la fin 2012 ? Les délais semblent assez courts pour une instruction sérieuse et un procès digne de ce nom. « Le délai est court mais il s’agira dans un premier temps de poser les actes concrets mais le procès va prendre certainement beaucoup de temps » assure Samba Kandji.
Rappelons que la Cour internationale de justice (CIJ) de la Haye, saisie par la Belgique il y a trois ans avait ordonné au Sénégal, en juillet 2012, de juger Hissène Habré ou de l’extrader. Il est recensé près de 40 000 présumés victimes de l’ancien dictateur tchadien.

Moussa Diop
 

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