samedi, novembre 23, 2024
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Le pape en visite au Maroc, défend « la liberté de conscience »

Le pape François a entamé samedi une visite éclair au Maroc, en défendant fermement « la liberté de conscience », sur une immense esplanade devant des milliers de Marocains et le roi Mohammed VI, « Commandant des Croyants », qui prône un « islam modéré ».

« La liberté de conscience et la liberté religieuse – qui ne se limitent pas à la seule liberté de culte mais qui doivent permettre à chacun de vivre selon sa propre conviction religieuse – sont inséparablement liées à la dignité humaine », a souligné le souverain pontife, en appelant les croyants à « vivre en frères ».

Le sujet reste sensible au Maroc. En juin dernier, le ministre marocain d’Etat chargé des droits de l’Homme, l’islamiste Mustapha Ramid, avait ainsi estimé que la liberté de conscience était « une menace » pour la « cohésion » du Maroc.

Le chef spirituel des 1,3 milliard de catholiques a été invité par le roi et Mohammed VI pour cette visite « placée sous le signe du développement du dialogue interreligieux », selon les autorités marocaines. Un thème prioritaire pour le pape, même si les scandales sexuels de l’Eglise focalisent l’attention.

Bâtiments repeints, rues pavoisées, pelouses manucurées, forces de l’ordre renforcées… tout a été fait pour le recevoir en grande pompe à Rabat, la capitale de ce pays à 99% musulman.

– « Jour exceptionnel » –

Le roi a accueilli le pape à sa descente d’avion, avec des dattes et du lait d’amande, comme le veut la tradition.

Avant d’arriver sous les applaudissements sur une grande esplanade de Rabat bordée par une mosquée et par un mausolée, pour prononcer leurs discours, ils ont parcouru plusieurs kilomètres en cortèges parfaitement parallèles sur de larges avenues. Le pape en papamobile protégée de la pluie, le roi sous la capuche de sa jellaba jaune clair debout stoïquement dans une limousine décapotable.

« Ce jour est exceptionnel », a souligné Mohammed VI devant la foule. Le monarque de 55 ans a souligné que « l’union de tous les Marocains » se « matérialise par des mosquées, des églises et des synagogues qui, depuis toujours, se côtoient ». « Je protège les juifs marocains et les chrétiens d’autres pays qui vivent au Maroc », a précisé Mohammed VI.

« Les radicalismes, qu’ils soient ou non religieux, reposent sur la non-connaissance de l’autre, l’ignorance de l’autre, l’ignorance tout court », a-t-il martelé. « Ce que tous les terroristes ont en commun n’est pas la religion, c’est précisément l’ignorance de la religion. Il est temps que la religion ne soit plus un alibi pour ces ignorants, pour cette ignorance, pour cette intolérance ».

Après un tête-à-tête avec Mohammed VI au palais royal, le pape se rendra notamment à l’Institut de formation des imams qui accueille des Marocains, mais aussi des étrangers d’une dizaine de pays, dont la France. Ils sont 1.300 étudiants, hommes et femmes, à suivre des cursus de deux ou trois ans dans cet établissement, fer de lance de « l’islam modéré » prôné par le roi.

C’est la première fois qu’un pape sera accueilli dans un institut de formation d’imams.

Avant cette visite, le pape s’est dit heureux de visiter ce centre destiné à » fournir une formation adéquate et saine contre toutes les formes d’extrémisme, qui conduisent souvent à la violence et au terrorisme et qui, en tout cas, constituent une offense à la religion et à Dieu lui-même ».

A cet égard, « une préparation appropriée des futurs guides religieux est nécessaire, si nous voulons raviver le véritable sens religieux dans les coeurs des nouvelles générations », a-t-il ajouté.

– « Solidarité de tous les croyants » –

Le roi et le pape ne prendront pas la parole mais écouteront les témoignages de deux étudiants, l’un d’Afrique, l’autre d’Europe, ainsi qu’une déclaration du ministre marocain des Affaires islamiques. Un concert de musiques puisées dans le répertoire des trois religions monothéistes, islam, judaïsme et christianisme, est également prévu.

Début février, lors d’une visite historique aux Emirats arabes unis, le pape et le grand imam d’Al-Azhar, cheikh Ahmed al-Tayeb, avaient co-signé un « document sur la fraternité humaine », appelant en particulier à la liberté de croyance et d’expression, à la protection des lieux de culte et à la pleine citoyenneté pour les « minorités » discriminées. Ce texte commun valorise « la culture de la tolérance », sans toutefois aller jusqu’à admettre le droit à ne pas adhérer à une religion.

Le pape, qui le distribue désormais à tous les chefs d’Etats, a d’emblée fait référence à ce document. Notant qu’il est « indispensable d’opposer au fanatisme et au fondamentalisme la solidarité de tous les croyants, ayant comme références inestimables de notre manière d’agir les valeurs qui nous sont communes ».

Au Maroc, où l’islam est la religion d’État, les autorités aiment souligner la « tolérance religieuse » qui permet aux chrétiens étrangers et aux juifs d’exercer librement leur religion.

Reste que pour les Marocains, considérés automatiquement comme musulmans quand ils n’appartiennent pas à la communauté juive, l’apostasie est désapprouvée par la société et le prosélytisme condamné par la loi.

Si le renoncement à l’islam n’est pas explicitement mentionné dans le code pénal, ceux qui sont soupçonnés d' »ébranler la foi d’un musulman ou de le convertir à une autre religion » peuvent être poursuivis. Longtemps dans l’ombre, la petite minorité des convertis plaide ouvertement depuis 2017 pour vivre sa foi « sans persécution » et « sans discrimination ».

En fin de journée, François rencontrera des migrants dans un local de l’organisation catholique humanitaire Caritas.

AFP

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