mardi, avril 23, 2024
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Éditorial Juil-Août 2021 : Les idées ou les jupons, telle est la question

Le retour de l’ancien président ivoirien, Laurent Gbagbo, après une dizaine d’années de détention à La Haye a finalement fait pschitt. Le 17 juin dernier aurait dû être une sorte de retour du fils prodigue, un des rares chefs d’état au monde à être entré à la Cour pénale internationale comme accusé, et en être ressorti en homme libre, disculpé, blanchi. Ses partisans attendaient donc ce jour et voulaient le marquer d’une pierre blanche, pour le célébrer comme un vrai héros. Tous les panafricanistes aussi, d’ailleurs.

Avant cette date, son parti, le Front populaire ivoirien (FPI), avait fait de Gbagbo le chantre de la vraie réconciliation entre les Ivoiriens qui, quoi qu’on dise, se regardent en chiens de faïence depuis la crise post-électorale de 2010 et les 3.000 morts, au moins, qu’elle a occasionnés. Le peuple de Côte d’Ivoire, où l’ancien président a encore de nombreux suiveurs, espérait beaucoup de ce retour. Hélas, mille fois hélas !

Les espoirs d’une frange importante de la population ivoirienne ont été douchés. Car, en lieu et place d’un retour triomphal, c’est à un spectacle des plus ridicules que les Ivoiriens ont assisté. Laurent Gbagbo était au milieu d’une scène digne des télénovelas brésiliennes. Son épouse, celle qui l’est au regard de la loi, Simone Ehivet, et sa seconde épouse, Nady Bamba, celle qui l’est coutumièrement, étaient de la partie. Si Nady a vécu avec lui durant son exil, Simone dont on dit qu’il est séparé officieusement, reste son épouse tant que le divorce n’est pas prononcé, d’autant plus que la Côte d’Ivoire ne possède aucune loi admettant la polygamie. On assista donc à un déballage des plus troublants, consternants voire honteux, les deux femmes voulant accaparer l’homme pour paraitre aux yeux de la foule comme plus légitime.

Là où le retour de Laurent Gbagbo aurait dû, ipso-facto, jeter les bases d’une guerre des idées pour faire avancer le pays sur le plan de la démocratie, c’est à une guerre de jupons que les Ivoiriens, désabusés, assistent depuis la mi-juin. Les deux camps s’invectivent à longueur de journée à travers publications écrites et vidéos sur les réseaux sociaux. Les pro-Gbagbo, pro-Simone et pro-Nady se renvoient tous la patate chaude. Honteux et triste scénario !

Si d’aucuns pensaient que le retour de Gbagbo aurait un tant soit peu mis le président Ouattara en difficulté, la guerre de jupons déclarée entre les deux femmes du patron du FPI donne à l’actuel président de se délecter de la situation. Parce que dans l’histoire, seul le PFI sera perdant. De nombreux militants, déçus, commencent déjà à se retirer du parti. D’autres n’ont d’yeux désormais que pour Charles Blé Goudé, compagnon d’infortune de Gbagbo, à qui les dix ans de privation de liberté semblent avoir donné une vraie stature d’homme d’état. Quand la politique se déroule en-dessous de la ceinture, c’est que tout le monde y est perdant. Houphouët-Boigny est peut-être en train de se retourner dans sa tombe !

Malick Daho, paru dans le Diasporas-News n°127 de Juillet-Août 2021

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