dimanche, octobre 13, 2024
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Côte d’Ivoire: le divorce entre Laurent et Simone Gbagbo, une rupture familiale et politique

Tout juste rentré en Côte d’Ivoire, l’ex-président Laurent Gbagbo a demandé le divorce d’avec son épouse, Simone, avec laquelle il a formé un redoutable tandem au pouvoir pendant dix ans, jusqu’à leur arrestation en 2011. Une rupture familiale et politique.

Le communiqué de l’avocat de Laurent Gbagbo est tombé lundi. L’ancien chef de l’Etat s’est « résolu » à demander le divorce devant le tribunal « en raison du refus réitéré depuis des années de dame Simone Ehivet de consentir à une séparation amiable ». Ils sont mariés depuis 1989 et ont eu deux filles ensemble.

L’affaire passionnait déjà les Ivoiriens et alimentait les débats avant le retour de Laurent Gbagbo, le 17 juin, après dix ans d’absence. Simone Gbagbo irait-elle à l’aéroport accueillir son mari, acquitté en mars par la justice internationale? Tous savaient qu’il devait voyager avec Nady Bamba, une ex-journaliste de 47 ans, sa compagne depuis le début des années 2000, à laquelle il est uni par un mariage coutumier.

Simone Gbagbo s’est bien rendue à l’aéroport d’Abidjan, est allée à la rencontre de son mari visiblement peu enthousiaste, lui a dit quelques mots dans la cohue, puis est repartie.

Ils ne s’étaient pas vus depuis dix ans: en 2011, ils avaient été arrêtés après leur refus de reconnaître la victoire à la présidentielle de leur rival Alassane Ouattara. Une crise qui avait fait plus de 3.000 morts dans les deux camps.

Laurent Gbagbo a été envoyé à La Haye pour être jugé pour crimes contre l’humanité. Il a été définitivement acquitté en mars.

Simone Gbagbo a elle été condamnée en Côte d’Ivoire en 2015 à 20 ans de prison, puis amnistiée en août 2018 après sept ans de détention.

L’une des premières sorties à Abidjan de Laurent Gbabgo a eu lieu dimanche dans un endroit très symbolique: la cathédrale. « Gbagbo redevient catholique », titraient en Une des journaux lundi. En d’autres mots, il n’est plus évangéliste, ce mouvement religieux si cher à Simone.

Si cela a tant d’importance, c’est que Simone Gbagbo, 72 ans, n’est pas seulement une ancienne Première dame, mais une femme politique de premier plan. Si tous se demandent le rôle que va jouer Laurent Gbagbo, âgé de 76 ans, à l’avenir, la question se pose aussi pour elle.

– « Conflit de leadership » –

Ils ont tous deux été de fervents opposants à Félix Houphouët-Boigny, le premier président du pays, de 1960 à 1993 et se sont battus pour le multipartisme. Ils se sont construits dans le militantisme, ont fait de la prison. En 1982, elle a participé à la création du Front populaire ivoirien (FPI) par Laurent Gbagbo. Il en est toujours le président, et elle, deuxième vice-présidente.

« Le parti ne s’est pas encore réuni pour parler de la question (du divorce), mais c’est sûr que ça va avoir des répercussions », admet une source au sein du FPI, une formation déjà divisée.

Pour Rodrigue Koné, analyste à l’Institute on security studies (ISS), il va y avoir « un sérieux conflit de leadership » et « ça ne va pas être facile pour Laurent Gbagbo ». « Du tandem politique, on passe au face à face », estime-t-il. Simone Gbagbo a su s’imposer en alter ego politique de son mari. « Elle disait tout haut ce que Laurent Gbagbo pensait tout bas », selon lui.

Surnommée « la Dame de fer », elle a été accusée d’être liée aux « escadrons de la mort » contre les partisans d’Alassane Ouattara, qu’elle a toujours détesté. Et elle a été entendue par la justice française concernant la disparition du journaliste franco-canadien Guy-André Kieffer en 2004 à Abidjan.

« Elle est soupçonnée d’avoir porté une ligne jusqu’au-boutiste, radicale », résume Rodrigue Koné.

« Elle a une force considérable », renchérit Rinaldo Depagne, analyste à l’International Crisis Group (ICG). Issue d’un milieu très populaire, elle « a fait son chemin dans un monde de riches et d’hommes ».

Simone Gbagbo reste surnommée « Maman » par ses partisans. Pour M. Depagne, elle est toujours « très écoutée », mais « dans un cercle très réduit ». « Le parti, c’est lui. L’idole, c’est lui. Si ça avait été elle de retour d’exil, il n’y aurait pas eu cette ferveur dans les rues ».

Selon lui, le « risque » pour le FPI, c’est son « personnel d’encadrement vieillissant ». Charles Blé Goudé, 49 ans, a ainsi des chances sérieuses de « jouer un rôle important » à l’avenir. Mais cet ex-pilier du régime de Laurent Gbagbo, acquitté par la justice internationale en même temps que lui, n’est pas rentré en Côte d’Ivoire, faute de passeport.

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