La Côte d’Ivoire continue de pleurer son Premier ministre Hamed Bakayoko (56 ans), décédé le 10 mars à Fribourg (Allemagne) d’un cancer foudroyant du foie. L’enfant de Séguéla (Nord- Ouest) a bénéficié d’un hommage national de huit jours et de témoignages poignants aussi bien de chefs d’Etats, de camarades de parti, de sportifs, d’hommes de culture et de toute la population. Il était l’ami de tous…
Premier ministre ivoirien, fidèle du président Alassane Ouattara et pilier du régime, Hamed Bakayoko repose en paix à Séguéla depuis le vendredi 19 mars. Son décès d’un cancer foudroyant du foie, le 10 mars dans l’après-midi à Fribourg, quelques jours après avoir été transféré à Paris, où il était soigné depuis le 18 février, attriste tous les Ivoiriens. Celui qui a passé neuf mois à la Primature, venait de fêter, le 8 mars, ses 56 ans. Hambak, l’un de ses surnoms, laisse inconsolable une épouse Yolande et quatre enfants (Karl, Yohann, Yerim, Maya). Il incarnait l’enfant du peuple qui, par sa volonté et une fidélité sans faille à son mentor Alassane Ouattara, avait su gravir presque toutes les marches du pouvoir. Très touché par cette nouvelle disparition de son autre « fils », le président Alassane Ouattara, ému, a indiqué : « C’était un grand homme d’Etat, un modèle pour la jeunesse, une personnalité d’une grande générosité et d’une loyauté exemplaire ». En effet, avec la mort de l’ancien Premier ministre Amadou Gon Coulibaly, le président ivoirien perd en huit mois ses deux Premiers ministres, ses deux plus fidèles, ses deux piliers. Également surnommé « Golden boy » pour ses réussites en affaires, il était pourtant vu comme le successeur d’Alassane Ouattara en 2025. Hélas…
Adepte du travail, Hamed Bakayokorépétait inlassablement : « Le plus important pour moi, c’est le travail. Le travail bien fait. Être capable de saisir les opportunités et d’en tirer profit. Moi, j’ai presque tout fait. Boîte de nuit, restaurant, radio, journal, studio d’enregistrement, production d’artiste etc. Je n’ai malheureusement pas fait de longues études et ce déficit, qui peut être vu comme un handicap dans le milieu où j’évolue. À chaque fois que je suis nommé quelque part, on dit : « le poste est trop gros pour lui ». Par la suite, mes résultats me donnent raison et quand on m’enlève de là ces mêmes personnes se plaignent : « Pourquoi vous enlevez Hamed de là ». J’ai toujours vécu avec le complexe du « Il ne peut jamais faire » et au final, je fais. Vu que je n’ai pas de grands diplômes, on est deux fois plus exigeant envers moi alors que je travaille trois fois plus pour être au-dessus des challenges qu’on me confie. Je n’ai pas fait les grandes écoles mais j’ai fait la plus essentielle, celle de la vie. N’ayez pas honte d’où vous venez. Travaillez ! Le travail corrigera tout ça ». Personnalité atypique et charismatique, bon vivant, Hamed Bakayoko était très populaire et apprécié non seulement par ses camarades du parti mais aussi par ceux de l’opposition.
D’abord militant politique, puis homme de médias dans les années 1990, l’enfant d’Adjamé était devenu ministre au début des années 2000. Depuis, le fils d’Anliou et de Mayama était de tous les gouvernements pendant près de 20 ans. En 2003, à 38 ans, il devenait ministre des Télécommunications et des nouvelles technologies, un poste qu’il gardera dans tous les gouvernements d’union nationale, sous le régime de l’ex-président Laurent Gbagbo. Avec l’arrivée au pouvoir d’Alassane Ouattara en 2011, Hamed Bakayoko avait hérité du stratégique ministère de l’Intérieur, qu’il avait conservé sous trois gouvernements jusqu’en 2017. En juillet 2017, il avait été nommé Ministre d’Etat, ministre de la Défense et numéro deux du gouvernement, où il avait eu la lourde tâche de gérer plusieurs mutineries dans l’armée. Elu maire d’Abobo en 2018, son nom avait circulé comme présidentiable, avant la désignation d’Amadou Gon Coulibaly comme candidat du pouvoir pour la présidentielle d’octobre 2020. Depuis la mort de ce-dernier, Hamed Bakayoko occupait la Primature. Quatre jours avant sa mort, Hamed Bakayoko avait été largement réélu député de Séguéla, aux législatives du 6 mars.
Le monde du show-biz, qu’appréciait Hamed Bakayoko, s’est également montré attristé par son décès. « En dehors du fait qu’il ait été un grand homme politique, je perds personnellement un grand frère, un ami et un parrain. Il a été un grand amoureux de la musique », a réagi le lead vocal du groupe Magic System, Asalfo. Mécène, le nom d’Hamed Bakayoko était régulièrement cité dans les chansons d’artistes d’horizons divers. Innoss’B, chanteur congolais, qui lui a récemment fait une dédicace dans son titre à succès Olandi, est malheureux. Au-delà de la culture, c’est le monde de la culture qui pleure le Golden Boy. « Il aimait la culture et les artistes. Repose en paix Hamed Bakayoko. Condoléances à toute la Côte d’Ivoire », a tweeté Mamane, L’onde de choc reste terrible en Côte d’Ivoire et même au-delà.
Bon voyage Hambak !
Guy-Florentin Yameogo, paru dans le Diasporas-News n°124 d’Avril 2021