samedi, avril 20, 2024
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Des perruques mieux remboursées: une avancée, pas un « luxe » face au cancer

Pas un « luxe » ni une « coquetterie »: certaines perruques destinées aux femmes atteintes de cancer seront mieux voire intégralement remboursées par la Sécu à partir de mardi. Une avancée pour les associations, qui regrettent toutefois le déremboursement des prothèses haut de gamme.

« Mes cheveux, c’était une partie de mon identité », raconte Vanessa Bonheur à l’AFP. C’est « pour être en accord avec le reflet dans le miroir », aussi par « peur du regard des autres », qu’elle a choisi de porter une perruque pour traverser sa chimiothérapie.

Chaque année, environ 50.000 patients recourent à des prothèses capillaires: des femmes dans plus de neuf cas sur dix, pour des prix parfois exorbitants, bien au-dessus du forfait de 125 euros jusqu’alors pris en charge par l’Assurance maladie.

Pour Vanessa, créole, la recherche d’un modèle adapté à ses cheveux d’origine et à son tour de tête, trop petit, s’est avérée un « calvaire ».

Montant de la facture: 644 euros, dont 375 euros pris en charge par sa mutuelle, auxquels s’ajoutent les 125 euros de la Sécu.

A compter du 2 avril, les perruques en fibres synthétiques dites de classe 1 seront remboursées à hauteur de 350 euros, montant qui sera aussi le prix plafond de ces articles. De quoi permettre une offre « sans reste à charge » et de « qualité », une « formidable avancée » pour le ministère de la Santé.

Pour les prothèses de classe 2 (au moins 30% de cheveux naturels), le remboursement atteindra 250 euros pour des tarifs plafonnés à 700 euros.

Une bonne chose face à « un injustice sociale », estime Elise. Diagnostiquée d’un lymphome à 29 ans alors qu’elle était enceinte de jumeaux en 2015, elle a déboursé « 500 euros de sa poche » pour sa prothèse, afin notamment d’éviter des réflexions déplacées sur sa condition de femme malade et enceinte. « Il faut avoir les moyens, j’ai eu cette chance ».

A l’association RoseUp aussi, on se réjouit de « ces avancées qui vont bien au-delà de l’engagement du dernier plan cancer de doubler les remboursements », explique Céline Lis-Raoux, sa directrice.

« Le cancer, c’est une série de pertes de la féminité dont celle des cheveux est la plus visible. Essayer de garder le visage qu’on avait avant, cela vous tire vers le haut », ajoute celle qui a milité pour débloquer ce dossier remis à l’ordre du jour par la ministre de la Santé Agnès Buzyn en juin.

« Inégalité face à la maladie » –

Problème: plus aucun remboursement n’est prévu pour les prothèses dépassant 700 euros, et donc pour les perruques en cheveux naturels, dont les prix vont de 800 à 2.000 euros. Une « erreur », selon Céline Lis-Raoux.

Et une « nouvelle inégalité face à la maladie », s’insurge la Ligue contre le cancer. Sans participation de la Sécu, « les mutuelles ne vont plus intervenir », redoute Emmanuel Jammes, responsable du pôle plaidoyer de la Ligue, inquiet notamment pour « les adolescentes, très sensibles à leur image » et désireuses de garder « des cheveux longs », ce qui est impossible avec les modèles synthétiques.

De son côté, le ministère de la Santé vante un encadrement des prix bénéfiques aux patientes et correspondant à « la très grande majorité (plus de 95%) des perruques prises en charge ».

Mais « cela laisse penser que les femmes qui font des demandes supérieures à la norme ont les moyens », déplore Emmanuel Jammes, la prothèse devenant de fait « un produit de luxe alors qu’elle correspond à un véritable besoin ».

L’achat d’une perruque à près de 1.000 euros, intégralement financée par la mutuelle généreuse de son époux, a permis à Céline Onillon de continuer son travail d’agent général d’assurance en vue d’une titularisation, sans que ses « clients ne se rendent compte de rien ».

A l’inverse Marie Pons, qui aurait voulu une perruque pour être « une maman normale » aux yeux de ses enfants, a renoncé à consacrer 1.000 euros minimum à un produit qu’elle devait faire réaliser sur-mesure en raison d’un tour de tête supérieur « aux standards ».

« C’est aberrant. Mais on a quand même de la chance d’être en France », où les soins sont pris en charge, relativise-t-elle.

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