lundi, décembre 9, 2024
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A Istanbul, le tourisme de la moustache bat son plein

A Istanbul, le tourisme de la moustache bat son plein
On connaissait les bains turcs, le café et les fameux « délices » sucrés. La moustache est désormais en passe de les rejoindre au rang des spécialités mondialement reconnues de la Turquie, où de plus en plus d’hommes en mal de poils viennent se faire greffer les respectueuses bacchantes dignes de leur rang.
Si elle disparaît à l’ouest, la moustache reste un attribut masculin très en vogue en Turquie et au Moyen-Orient. Au point que les hommes les moins bien dotés par la nature n’hésitent plus à remettre le sort de leur système pileux déficient entre les mains de chirurgiens esthétiques.
Le Dr Selahattin Tulunay est l’un d’eux. A la tête d’un prospère cabinet privé jusque-là spécialisé dans les transplantations de cheveux, ce chirurgien esthétique s’est rapidement adapté à cette nouvelle demande.
 

A Istanbul, le tourisme de la moustache bat son plein
« Cela fait environ trois ans que je fais des implants de moustaches », confie-t-il, « beaucoup d’hommes sont venus me voir en me disant +j’ai 40 ans, je suis à la tête d’une grosse entreprise et à l’étranger, on ne me prend pas au sérieux, je veux que l’on voie que j’ai des poils ».
Tout juste trentenaire, Engin Koç s’est longtemps désespéré de son visage glabre. Avant de s’offrir, il y a sept mois, la « brosse » de ses rêves sur une table d’opération. « J’ai voulu ressembler aux anciens Turcs, aux Ottomans, et comme j’ai l’âme assez nostalgique et une admiration pour cette époque, j’ai fait ces implants », raconte-t-il avec fierté, « la moustache est un symbole de la virilité turque ».
Depuis des lustres, la moustache est effectivement une affaire très sérieuse en Turquie. Un dicton populaire y affirme d’ailleurs qu’un « homme sans moustache est comme une maison sans balcon ». Sa forme y est même lue politiquement.
« Broussailleuse, façon Staline, elle est plutôt l’apanage de la gauche ou des Kurdes », explique l’anthropologue Benoît Fliche, de l’Institut français d’études anatoliennes d?Istanbul. « Mince, comme celle du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, elle devient religieuse et conservatrice (…) Et si elle descend en forme de crocs de part et d’autre de la bouche, elle est alors marquée à l’extrême droite ».
Forfaits moustache
Même si elle séduit aujourd’hui un peu moins les Turcs des grandes villes, plus tournés vers la mode occidentale, la moustache et la barbe restent un « must » pour la gent masculine des pays arabes ou des républiques turcophones d’Asie centrale, qui font le voyage d’Istanbul pour satisfaire leur appétit de poils.
« Les séries télévisées turques diffusées dans le monde arabe ont une grande influence », assure le Dr Tulunay, « c’est en voyant nos acteurs que ces patients sont venus nous demander les mêmes barbes ou les mêmes moustaches ».
Ces clients constituent l’essentiel de ce nouveau marché de la « pilosité faciale ». Rien qu’à Istanbul, quelque 250 cliniques ou cabinets privés se livrent une concurrence acharnée pour vendre leurs services, à grands coups de promotions.
La plupart se sont associés à des agences de voyage et proposent des formules qui incluent l’opération et le séjour à l’hôtel de leurs patients, qu’elles prennent en charge dès l’aéroport… Les plus compétitifs proposent des forfaits « moustaches » très avantageux à partir de 2.000 euros, bien moins chers que chez leurs concurrents européens ou américains.
Le tourisme du poil bat son plein donc, confortablement assis sur la progression constante du nombre de visiteurs étrangers qui se pressent en Turquie. Plus de 35 millions en 2012, selon les estimations.
« Chaque semaine, nous accueillons entre 50 et 60 patients pour une greffe de cheveux, et 5 à 6 pour une greffe de moustaches », se réjouit le Dr Meral Tala, chirurgienne au Istanbul Hair Center, « et comme nos résultats sont bien meilleurs qu’avant, nous prévoyons une très grande augmentation des demandes ». Les chirurgiens esthétiques d’Istanbul n’ont pas fini de se friser les moustaches. 

AFP 

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