Barack Obama ne fait plus autant rêver, mais les Européens continuent de plébisciter le président démocrate face à son challenger républicain Mitt Romney, dont l’élection ne modifierait pourtant pas fondamentalement les relations entre les Etats-Unis et l’Europe.
Alors que la course à la Maison Blanche est particulièrement serrée, Barack Obama serait réélu haut la main par les Européens. Selon une enquête menée par le German Marshall Fund, il écraserait son concurrent avec 75% des voix, contre seulement 8% à Mitt Romney. Un score qui frôle les 90% en France et en Allemagne.
Et malgré une chute de 12 points entre 2009 et 2012, la cote du président américain reste à un niveau exceptionnellement élevé: 71% des Européens approuvent la façon dont il gère les affaires du monde.
Publiquement, les dirigeants européens gardent un silence prudent. A l’exception de la France, qui a clairement affiché sa volonté d’une victoire de Barack Obama, notamment par la voix de son Premier ministre Jean-Marc Ayrault qui la « souhaite totalement ».
Quatre ans après le déferlement de l’Obamania sur l’Europe, la popularité du président américain s’est émoussée. Les Européens mettent à son actif la fin de la guerre en Irak et la réforme du système de santé. Mais son bilan est terni par son incapacité à résoudre le conflit israélo-palestinien et par le maintien de la base de Guantanamo.
Il reste que Barack Obama « est ce qu’il y a de plus proche de la social-démocratie » européenne, souligne Jan Techau, directeur du Centre Carnegie Europe. « Il existe une proximité fondamentale » entre lui et les Européens.
Longtemps considéré comme un modéré, Mitt Romney a considérablement durci son discours durant la campagne et s’est rapproché des néoconservateurs proches de l’ancien président George W. Bush, un très mauvais souvenir pour les Européens.
Si ces derniers se passionnent toujours pour les élections américaines, leur intérêt n’est pas payé de retour. Certes, la politique étrangère n’est jamais l’enjeu principal des campagnes américaines, centrées plus encore cette année sur l’économie et l’emploi. Mais l’Europe est au mieux ignorée dans les débats, au pire un contre-modèle. Dans une allusion peu flatteuse, Mitt Romney a accusé Barack Obama de conduire les Etats-Unis sur la « route de la Grèce ».
Pour certains, cette absence est un bon signe, celui que l’Europe, même en crise économique, n’est pas un sujet d’inquiétude majeure pour les Etats-Unis, comme peuvent l’être l’islamisme ou l’Iran.
Cela signifie surtout que les Etats-Unis, qui ont fait de l’Asie-Pacifique le pivot de leur diplomatie, « tournent le dos à l’Europe », estime Steven Blockmans, du Centre for European Policy Studies (CEPS).
Les deux blocs « perdent leur intérêt stratégique pour l’autre, mais aussi la capacité de travailler ensemble et, plus grave, d’élaborer des réponses communes aux problèmes du monde », ajoute Ulrike Guérot, de l’European Council on Foreign Relations.
D’autres experts sont plus nuancés. « Quel que soit le vainqueur » le 6 novembre, « la prochaine administration continuera à considérer l’Europe comme une région importante du monde », assure Clara Marina O’Donnell, du Centre for European Reform.
Pour les deux spécialistes, un second mandat d’Obama ou une administration Romney « auraient beaucoup en commun », notamment en matière de relations avec le Vieux continent. L’Amérique continuera à pousser l’Europe à prendre plus de responsabilités en matière de sécurité internationale, à se recentrer elle aussi sur la région Asie-Pacifique, et à accélérer son intégration pour sortir de la crise.
C’est sur ce point que Mitt Romney pourrait infléchir la position américaine. Alors que le président démocrate a toujours plaidé contre des politiques d’austérité draconiennes, particulièrement auprès de la chancelière allemande Angela Merkel, le républicain serait probablement enclin à soutenir Berlin et à conforter le camp des durs de l’UE, selon Mme O’Donnell.
AFP