A trois jours de législatives cruciales en Grèce, l’affrontement entre la Nouvelle-Démocratie (ND) à droite et la coalition de la gauche radicale Syriza est à son comble sur fond de menaces de la sortie de ce pays de la zone euro s’il ne respecte pas ses engagements d’assainissement de son économie.
En campagne électorale depuis deux mois, avec un premier scrutin le 6 mai qui n’a pas permis d’aboutir à la formation d’un gouvernement, la Grèce, le grand malade de l’Europe, inquiète la zone euro, qui attend la constitution, le plus tôt possible, d’une équipe gouvernementale capable de poursuivre le plan de rigueur, dicté par les créanciers, l’UE et FMI.
A la une de la presse grecque jeudi, figuraient les déclarations du président français François Hollande qui a mis les points sur les i, en laissant entrouverte la porte à la renégociation du plan de rigueur, tout en mettant en garde les Grecs contre une sortie de la zone euro en cas de non respect de leurs engagements.
« L’interview de M. Hollande à la télévision grecque est très importante pour l’opinion publique grecque » a commenté l’analyste politique Georges Séfertzis, interrogé par l’AFP.
Réduire les mesures d’austérité
En effet, pour les deux adversaires dont les partis sont au coude à coude, Antonis Samaras, chef de la ND, 61 ans, et Alexis Tsipras, du Syriza, 37 ans, « la renégociation » de ce plan de rigueur est une condition sine qua non de la sortie de leur pays de la crise.
Cette renégociation vise surtout à réduire les mesures d’austérité, imposées depuis 2010, année du déclenchement de la crise de la dette, qui ont conduit à l’aggravation de la récession, le recul du PIB ayant été de 6,9% en 2011.
Tant M. Samaras que M. Tsipras misent sur « un changement » des politiques d’austérité en Europe, qui n’ont pas abouti à endiguer la crise, l’Espagne en étant le plus récent exemple, rappelle le chef du Syriza.
Ce dernier affiche un discours antirigueur beaucoup plus dur que celui de M. Samaras, qui se veut le garant du « maintien du pays dans la zone euro » et de la « stabilité », affirmant que le programme de la gauche radicale conduit à « la catastrophe ».
Accusant M. Tsipras de vouloir « dénoncer unilatéralement le mémorandum (plan de rigueur, ndlr) et « donc, de conduire le pays (à un retour) à la drachme (la monnaie nationale, ndlr) », M. Samaras a assuré mercredi au cours d’une conférence de presse que son parti était « la seule force capable de former un gouvernement ».
« Les enjeux de ces élections sont clairs : euro ou drachme, gouvernement de coalition ou non gouvernement ? », a lancé M. Samaras. Pour ajouter qu' »un retour à la drachme » contraindrait la Grèce à subir « dix mémorandum ».
M. Tsipras, qui avait jeudi soir son dernier rendez-vous électoral dans le centre d’Athènes, rétorque qu’il va « tout faire pour maintenir le pays dans l’euro ».
Mercredi soir, il a assuré à la télévision publique Net, que sa première tâche, en cas de victoire aux législatives, serait d' »exploiter jusqu’au sommet européen du 28 mai un délai crucial de 10 jours pour mener une véritable et rude négociation dans le champ européen ».
La Bourse optimiste
Tablant pour sa part sur une victoire de la droite et la formation d’un gouvernement sous la houlette de la Nouvelle démocratie, la Bourse d’Athènes s’est envolée jeudi, en terminant sur un bond de 10,12%, tirée par la forte hausse (23,5%) des valeurs bancaires.
Selon l’analyste financier de Proton Bank Vassilis Kararizos, « ce bond résulte de rumeurs sur une avance préélectorale de la droite Nouvelle-Démocratie et le fait que la Bourse était particulièrement sous pression ces derniers jours ».
Sur la base des derniers sondages officiels publiés il y a quinze jours, aucun parti ne pouvait prétendre à la majorité absolue, mais la Bourse s’est nourrie de sondages officieux et impubliables qui circulent sous le manteau, tant au siège des partis qu’au siège des grandes banques.
Dans l’immédiat, M. Tsipras continue de ne voir que deux solutions : « soit un gouvernement ayant comme noyau la droite, soit la gauche », excluant toute coopération avec les conservateurs ou les socialistes du Pasok.
Arrivant à la troisième place après une défaite historique le 6 mai, le Pasok (socialiste) est considéré comme l’artisan des négociations du plan de rigueur après deux ans passés au pouvoir.
Leur chef Evangélos Vénizélos, ex-ministre des Finances, a appelé mercredi au cours de son dernier rassemblement électoral à Athènes, à « un gouvernement d’union nationale » pour sortir de l’impasse.
M. Samaras, qui clôt sa campagne vendredi soir par un discours en plein air devant le Parlement à Athènes, est également en faveur d’un gouvernement d’union nationale, dans le cas où il n’obtiendrait pas la majorité absolue dimanche.
AFP