Rétablissement de la sécurité, réconciliation nationale, reconstruction, retour des réfugiés et de l’administration dans le Nord, élections: après la guerre, de nombreux défis attendent le Mali, mais les acteurs politiques se déclarent dans l’ensemble optimistes pour l’avenir.
« On n’est plus très loin de la libération du territoire, même s’il faut être conscients que nous aurons une période d’instabilité dans certaines régions du pays. Mais il y a aujourd’hui plus de raisons d’être optimiste que d’être pessimiste », déclare à l’AFP l’ex-ministre malien Tiebilé Dramé.
Selon M. Dramé, un des responsables d’une coalition de partis opposés aux putschistes ayant renversé le président Amadou Toumani Touré (ATT) en mars 2012, « il y aura d’énormes défis à relever mais l’extraordinaire solidarité internationale qui a été exprimée » au Mali « est un motif de satisfaction et d’encouragement ».
Il faudrait toutefois, insiste-t-il, « un dialogue inter-Maliens » à engager dès maintenant puis, à la fin de la guerre, « des états-généraux de la Nation » qui conduiraient aux élections, les « deux volets essentiels du processus politique ».
L’année 2012 a vu le Mali plonger dans une crise sans précédent: attaques lancées en janvier contre l’armée, suivies du coup d’Etat le 22 mars qui a précipité la chute des régions du Nord aux mains de groupes armés, dont des islamistes liés à Al-Qaïda, qui ont y commis de nombreuses exactions.
Depuis trois semaines, l’armée française et l’armée malienne mènent avec succès pour l’instant une opération d’envergure pour en chasser les groupes islamistes armés, qui ont évincé sur le terrain leurs ex-alliés rebelles touareg.
Une force africaine est également en cours de déploiement au Mali, qui devra à terme pendre le relais de l’armée française.
Une conférence des donateurs organisée le 29 janvier a permis de recueillir plus de 455 millions de dollars (338 millions d’euros pour les besoins militaires et humanitaires du pays, selon l’Union africaine (UA).
Après la guerre, il y aura « beaucoup de choses à faire, parce que le problème du Mali est d’abord un problème de développement. Il faudra penser à la reconstruction et au développement de l’ensemble des régions, pas seulement de celles du Nord », analyse Madou Diallo, professeur de droit international à l’Université de Bamako.
« L’espoir est permis »
« Mais l’espoir est permis, avec l’implication des Français » sur le terrain « et la conférence des bailleurs de fonds », ajoute-t-il
Parmi les défis à relever, figurent le rétablissement de la sécurité et de l’administration dans les zones qui étaient occupées par les jihadistes, le retour et la réinstallation des déplacés et réfugiés – près de 400.000 personnes ont fui leurs domiciles en un an – et l’organisation d’élections générales pour installer de nouveaux dirigeants, mettant ainsi fin à la transition mise en place après le putsch qui a déstabilisé les institutions.
Des négociations devront aussi s’engager avec des groupes armés qui rejettent « le terrorisme » et la partition du pays, en particulier la rébellion touareg du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA), qui figurant dans une « feuille de route » pour l’après-guerre que viennent de voter les députés.
Le président par intérim Dioncounda Traoré a affirmé qu’il souhaitait organiser les élections si possible « avant le 31 juillet ».
« Les contraintes temporelles sont arithmétiquement jouables. Avant juillet, l’Administration peut être remise en place, les réfugiés et déplacés peuvent retourner chez eux. Tout le processus électoral peut être mis en place », affirme Boubacar Touré, du Rassemblement pour le Mali (RPM, de l’ex-Premier ministre Ibrahim Boubacar Keïta).
Madou Diallo met cependant en garde contre un scrutin à la saison des pluies (de juin à octobre), pendant laquelle de nombreuses localités rurales sont difficilement accessibles.
Seule voix discordante sur l’avenir politique du pays, Younouss Hamèye Dicko, responsable d’une coalition favorable aux putschistes et opposée aux autorités de transition, ironise sur « des miracles » annoncées.
« Je ne vois pas comment, d’ici à juillet, on peut tenir des élections. (…) L’administration n’est pas encore redéployée sur le terrain, les réfugiés et déplacés ne sont pas encore de retour, le tissu social n’est pas encore recousu et la paix n’est pas encore assurée. Donc, j’ai un doute scientifique », dit-il.
AFP