Le procureur général égyptien Abdel Meguid Mahmoud a été maintenu samedi à son poste, à l’issue d’une rencontre avec le président Mohamed Morsi qui avait tenté de le limoger deux jours auparavant, provoquant une nouvelle crise en Egypte.
Le chef d’Etat a démis jeudi M. Mahmoud, le nommant ambassadeur au Vatican, une décision qui avait ravivé les tensions entre les juges nommés sous le régime du président déchu Hosni Moubarak et M. Morsi, qui a tenté en vain de rétablir le Parlement dominé par les islamistes mais dissous par décision de justice.
Aussitôt après l’annonce de son limogeage, le procureur général avait déclaré qu’il restait à son poste, affirmant que « selon la loi, un membre du corps judiciaire ne peut pas être démis par le pouvoir exécutif ».
Samedi, il a affirmé à la presse avoir rencontré le président Morsi, à l’initiative de ce dernier, ainsi que le vice-président Mahmoud Mekki, « et nous avons convenu que je restais à mon poste puisque je le souhaitais ».
De son côté, M. Mekki a évoqué lors d’une conférence de presse « un malentendu », « la présidence avait été informée que le procureur avait accepté de quitter son poste, c’est pour cela qu’il a été nommé ambassadeur au Vatican ».
« L’indépendance du pouvoir judiciaire est un objectif essentiel » pour la présidence, a-t-il assuré accusant « certaines forces politiques » qu’il n’a pas identifiées de « chercher à entraîner le pouvoir judiciaire dans la bataille politique ».
Vendredi, le procureur général avait affirmé dans un communiqué avoir reçu des « menaces directes et indirectes » de hauts responsables le poussant à accepter son limogeage.
Séparation des pouvoirs
L’institution judiciaire s’était, elle, rangée aux côtés de M. Mahmoud au nom de « la souveraineté de la Loi et du principe de séparation des pouvoirs », avait expliqué Ahmed al-Zind, à la tête du Club des juges, au quotidien Al-Ahram de vendredi.
Le Club des juges s’était vivement opposé à l’élection en juin de M. Morsi, qui avait appelé à rejuger M. Moubarak et les responsables de son régime pour la mort de près de 850 personnes lors du soulèvement de janvier-février 2011.
La décision de limoger le procureur général est intervenue après l’acquittement mercredi de figures du régime Moubarak, accusées d’avoir envoyé des hommes de main à dos de chameau pour attaquer les manifestants place Tahrir l’an dernier en pleine révolte.
M. Mahmoud était accusé par plusieurs militants de continuer à soutenir le régime Moubarak et d’avoir été à l’origine de l’insuffisance des preuves présentées par le parquet dans les procès de responsables accusés d’implication dans la mort de manifestants lors de la révolte anti-Moubarak en 2011.
M. Moubarak et son ministre de l’Intérieur Habib al-Adly ont été condamnés à la prison à vie en juin, mais six hauts responsables de la sécurité ainsi que de nombreux policiers ont été acquittés.
Des partisans du président Morsi réclamant un nouveau procès pour les anciens responsables acquittés ont manifesté vendredi place Tahrir au Caire. Des heurts les ont opposés à des militants qui réclamaient la formation d’une nouvelle commission constituante, actuellement dominée par les islamistes.
Les heurts ont fait 121 blessés selon le ministère de la Santé. Trois bus des Frères musulmans et du Parti de la liberté et la justice (PLJ), émanant de la confrérie, ont été incendiés.
Les partis libéraux, de gauche et les mouvements de jeunes ont dénoncé samedi « des tentatives d’intimidation et de répression exercées par le pouvoir à l’encontre de l’opposition ». Dans un communiqué, ils font porter aux « Frères musulmans et leur parti l’entière responsabilité des violences ».
Le PLJ a dit de son côté avoir « respecté le caractère pacifique des manifestations », accusant « certains d’avoir incité les jeunes manifestants contre le PLJ et les Frères musulmans ».
AFP