En dépit du fait qu’il figure parmi la trentaine de pays ayant fondé l’Organisation de l’unité africaine (OUA) le 25 mai 1963 à Addis-Abeba, le Maroc s’est retiré de cette organisation en 1984 pour protester contre l’admission en son sein de la République arabe sahraouie démocratique (RASD), qui lui dispute la souveraineté sur le Sahara Occidental, ancienne colonie espagnole, sous contrôle de Rabat depuis 1975.
Depuis sa position demeure inchangée vis-à-vis de l’instance panafricaine, dissoute et remplacée en 2002 par l’Union Africaine (UA).
«Depuis son départ de l’OUA, le Maroc a paradoxalement renforcé ses liens avec le continent africain en privilégiant le partenariat économique et l’union économique» rappelle cependant Le Matin du Sahara, porte-parole officieux du Palais.
Le problème de l’intangibilité des frontières
Au début des années 60, deux groupes qui devaient fonder l’OUA débattaient sur la question des frontières.
Celui dit de Casablanca rassemblait des Etats comme le Maroc, l’Egypte, le Mali, la Guinée, le Ghana et l’Algérie (encore en guerre avec la France), et celui dit de Monrovia, réunissait des Etats comme l’Ethiopie, la Libye, la Tunisie, le Libéria, le Nigéria, le Togo et la Sierra-Leone.
Le royaume soulevait déjà le problème du statut du Sahara Occidental alors sous administration espagnole, mais aussi de l’enclave d’Ifni (rattachée au Maroc en 1969) ainsi que des présides espagnols, dont les plus connus sont les enclaves de Ceuta et Melilla.
A l’époque, le Maroc ne reconnaissait pas non plus l’indépendance de la Mauritanie acquise en 1960, qui selon lui faisait partie du «Grand Maroc», démembré par la colonisation. Un autre point d’achoppement était celui de sa frontière avec l’Algérie qui avait donné lieu à la Guerre des Sables en octobre 1963.
Un des premiers principes adoptés par l’OUA portait sur l’intangibilité des frontières héritées du colonialisme.
Membre fondateur de l’OUA en 1963 à Addis Abbeba, le Maroc avait posé comme condition sin qua non sa réserve sur ce principe concernant les territoires qu’il considérait comme marocains et encore sous occupation coloniale étrangère.
Le royaume n’avait adhéré à la charte de l’OUA. qu’après avoir exprimé par écrit ses réserves marquant les limites de son adhésion à l’organisation.
La RASD comme point de rupture
L’OUA, qui a avalisé l’admission de la RASD en tant que 51ème membre en 1984, a pour le Maroc, violé sa propre charte.
La position marocaine se fonde sur l’article 4 de l’organisation qui énonce que «chaque Etat africain indépendant et souverain peut devenir membre de l’organisation». L’attitude hostile au Maroc du Secrétaire général de l’OUA de l’époque, le Togolais Edem Kodjo, expliquerait en partie la position africaine défavorable au Maroc.
Le 12 novembre 1984, pendant trois heures, pour la première et dernière fois, le Maroc et la RASD ont siégé ensemble. C’était lors du 20e sommet de l’OUA à Addis-Abeba.
«À 17 h 50, la délégation sahraouie, conduite par son président, Mohamed Abdelaziz, fait son entrée dans la salle des séances de l’Africa Hall et prend place entre ses pairs du Rwanda et de São Tomé e Príncipe. La délégation marocaine, conduite par le conseiller du roi Hassan II, Ahmed Réda Guédira, s’installe derrière son pupitre. Après l’ordre du jour, le Maroc demande la parole. Guédira donne alors, sur un ton très calme, lecture d’un message du roi Hassan II: «Voilà, et je le déplore, l’heure de nous séparer. En attendant des jours plus sages, nous vous disons adieu et nous vous souhaitons bonne chance avec votre nouveau partenaire» relate Jeune Afrique qui retrace les tractations ayant abouti à l’admission de la RASD depuis le sommet de Tripoli en 1982.
L’Union Africaine est depuis divisée.
Les pays qui refusent de reconnaître la RASD parmi lesquels la Tunisie ou la Guinée, souhaitent le retour du Maroc au sein de l’organisation. Pour les autres, Rabat paie le prix de ses tergiversations dans ses négociations avec le Front Polisario, refusant en cela le principe de l’auto-détermination des peuples au profit d’une autonomie du territoire sous souveraineté marocaine.
Depuis 1984, plus de trente pays dans le monde, dont les Seychelles, le Malawi, le Bénin ou encore le Tchad,
sont revenus sur leur reconnaissance de la RASD.
Ali Amar