Dans l’est de la République démocratique du Congo, les rebelles du M-23 avancent vers Goma, la capitale de la province du Nord Kivu, avec l’objectif avoué d’encercler la ville tenue par l’armée régulière pour la faire tomber comme un fruit mur.
A quelques journalistes dont un reporter de l’AFP qui ont pu se rendre dans la zone ce weekend, le chef des opérations des rebelles pour le secteur, le colonel Innocent Kayima, a expliqué que l’intention du M23 était d’aller jusqu’a Kibumba, dernière agglomération sur la route de Goma où se trouve encore positionnée l’armée régulière congolaise, les FARDC.
Cette localité est présentée par un diplomate occidental à Kinshasa comme le « dernier verrou » vers Goma.
De là, assure le colonel Kayima, « nous encerclerons la ville (Goma) et nous démoraliserons les forces jusqu’a ce qu’elles s’en aillent ». « Nous prendrons la ville sans tirer », a-t-il assuré.
Place forte des forces armées de la RDC dans l’est du pays, il parait toutefois improbable que Goma soit abandonnée à son sort. D’autant qu’elle abrite des milliers de civils venus s’y réfugier et que de nombreuses troupes des Nations unies y assurent leur sécurité.
Mardi dernier, pour protéger les populations qui fuyaient les combats, des hélicoptères d’attaque des Nations unies sont intervenus contre la rébellion.
Ce weekend, Kibumba était défendue par six chars et un lance-roquettes multiples des forces de Kinshasa. Mais les rebelles n’étaient qu’à cinq km de là et, après s’être entendus au téléphone avec eux, les journalistes ont rejoint les premières lignes du M-23.
« Nous avançons petit à petit vers Kibumba », a affirmé le colonel Albert Kahalaha un déserteur de l’armée régulière passé en mai dernier dans l’autre camp.
Vêtus d’uniformes disparates de l’armée régulière sans aucun signe de grade, les hommes du M-23 sont positionnées de part et d’autre de la route sans autres armes lourdes que des mortiers de 60 mm, portables à dos d’homme, en place avec des caisses d’obus à proximité.
Les combats qui durent depuis mai restent intermittents et dans les zones dont le M-23 s’est emparé la vie reprend lentement son cours.
A Rutshuru, un bourg au nord de Kibumba tenu par la rébellion, un obus de mortier ou une grenade tirée par un fusil est bien tombé dimanche en fin d’après-midi sur une case vide qui a été détruite. Mais dans la matinée, une messe avait été célébrée, des civils étaient présents dans les rues, le coiffeur ouvert.
Dans le centre, les rebelles s’activaient à préparer la nourriture dans de grandes bassines. Des petits groupes électrogènes permettaient à chacun de recharger sa radio ou sontélephone portable.
Lors des combats de la semaine précédente, un pylône de transmission téléphonique a été touché, perturbant les communications. Un autre réseau en a profité et, quelques heures plus tard, après un changement de puces électroniques, les communications avaient repris normalement dans la ville.
Des combats plus durs au nord.
Plus au nord, l’atmosphère est tendue.
Les journalistes ont pu gagner le village de Madango, à une trentaine de kilomètres de Rutshuru. Là, un responsable militaire des rebelles, le colonel Justin Mahizi, leur a interdit d’aller plus loin prétextant la dureté des combats.
Selon lui, les FARDC en se retirant ont tué plusieurs personnes et ont jeté leurs corps dans la rivière. Dans un ravin gisent deux hommes aux mains liées, tués par les FARDC selon le M-23.
Sur la route vers le lieu-dit Mayamoto, en limite du parc naturel des Virunga, un gros camion de travaux publics a brûlé avec toute sa cargaison d’armes et les munitions ont explosé.
Selon le M-23, les FARDC l’ont réquisitionné avec son chauffeur, y ont entassé des armes des munitions et du matériel de transmission mais, devant l’avancée du M-23, les soldats y ont mis le feu et ont tué le chauffeur.
Aucune voiture ne circule. Selon un officier, les combats sont difficiles.
Les rebelles, que le Rwanda voisin est largement accusé d’aider bien qu’il s’en défende, affirment avoir récupèré leurs armes sur l’ennemi. Les obus sont dans des caisses et les bandes de mitrailleuses encore rangées dans leur emballage.
Les responsables nient absolument tout approvisionnement rwandais, même si des sources occidentales à Kinshasa ont évoqué des livraisons le week-end précédent.
Tous parlent le Swahili, généralement utilisé dans l’est du pays et dans les pays de la région, ainsi que le Kinyarwanda, la langue nationale rwandaise. Un peu d’anglais et un peu de français aussi.
Le M-23 a été formé par des membres d’une ancienne rébellion qui avaient été intégrés dans l’armée régulière en 2009 mais qui se sont mutinés en mai et ont repris les armes contre les FARDC.
AFP