Slate-Afrique – Assiste-t-on à une réelle réconciliation en Côte d’Ivoire?
Gilles Olakounlé Yabi – Il est encore trop tôt pour espérer avoir des signes mesurables de cette réconciliation. La plus grande difficulté lorsqu’on parle de réconciliation c’est de pouvoir avoir des indicateurs, c’est-à dire comment est-ce qu’on la mesure. Comment est-ce qu’on arrive à savoir si des personnes qui ont nourri à un moment donné de la haine, dans un contexte politique particulier, ont changé. Comment savoir si les rancœurs s’apaisent. Tout cela est très difficile à mesurer. Mais ce qui semble évident, c’est que la crise post-électorale en Côte d’Ivoire est une crise dans la longue crise qu’a connu le pays depuis plus de dix ans. Donc, il ne faut pas espérer obtenir en cinq mois ou même en un an ou deux, une réconciliation ou des signes forts de réconciliation, alors qu’il a fallu plusieurs années pour déconstruire la société ivoirienne et mobiliser une partie de la société contre une autre.
SlateAfrique – Des Ivoiriens subissent-ils encore des exactions sur des bases politiques, ethniques ou religieuses?
G-Y – Je crois qu’il est important de savoir un peu plus précisément ce dont il est question, c’est-à-dire qui est ce qu’on entend réconcilier avec qui. Ce qui s’est passé en Côte d’Ivoire pendant la crise postélectorale était un affrontement entre des groupes identifiables pour des raisons politiques connues. Les agents de la violence pendant ces mois de crise n’étaient pas la population de manière générale ou des groupes ethniques qui se seraient mobilisés dans les quartiers pour en affronter d’autres. Ce qui s’est passé, c’est qu’il y a eu une élection présidentielle, puis un bras de fer entre les deux rivaux du second tour. La mobilisation politique s’étant faite depuis des années sur un certain nombre de thèmes, y compris sur l’appartenance ethnique, régionale voire de l’appartenance nationale, il y a eu une dimension communautaire dans les actes de violence. Mais ce qu’il ne faut pas oublier, c’est que ce sont des acteurs parfaitement conscients de ce qu’ils faisaient et qui avaient un agenda particulier, et non pas la population de manière générale, qui ont commis de graves violences. On n’est pas dans le cadre d’un conflit à dimension essentiellement ethnique mais dans celui d’un conflit politique mené par des acteurs politiques épaulés par des acteurs de la violence. C’est pour cela que la question de la réconciliation, il faudra la poser de manière très claire et ne pas oublier les responsabilités individuelles identifiables. Ce qui est également important, c’est de voir dans le processus de réconciliation pourquoi ceux qui n’étaient pas directement impliqués dans les luttes politiques n’ont pas pu empêcher que le pire arrive dans le pays, pourquoi aucune catégorie de la société civile ivoirienne n’a pu et su résister à la polarisation politique et au repli identitaire.
SlateAfrique – Des élections législatives sont annoncées en décembre 2011. Mais, un certain nombre d’observateurs se demandent si ce n’est pas trop tôt ou est-ce qu’il s’agit d’une exigence de la communauté internationale?
G-Y – Je crois que ce n’est pas un problème de date. Dès le début du processus électoral en Côte d’Ivoire, on a estimé qu’il fallait faire une élection présidentielle et dans la foulée, des législatives. Il ne faut pas oublier que la présidentielle devait avoir lieu initialement en octobre 2005 et qu’elle s’est tenue finalement en novembre 2010, et que toutes les institutions du pays avaient perdu leur légitimité y compris l’Assemblée Nationale. Le code électoral lorsqu’il a été amendé pour permettre la certification par les Nations unies, portait à la fois sur des élections présidentielles et législatives. Il y avait même la possibilité de les coupler, ce qui aurait peut-être permis de diminuer la tension puisqu’on aurait eu à la fois des appétits pour la présidence et des appétits individuels dans tous les camps politiques pour les postes de députés à l’Assemblée Nationale. Ce n’est pas le calendrier des élections législatives qui est essentiel. La vraie question consiste à savoir si on peut réunir les conditions de sécurité nécessaires pour organiser ces élections sur l’intégralité du territoire et si les conditions politiques permettront à toutes les forces de prendre part à ces élections. C’est pourquoi la participation du Front Populaire Ivoirien (FPI) et plus généralement des partis qui voudraient récupérer l’héritage politique de Laurent Gbagbo est importante. Cette participation constituerait un indicateur d’une forme de réconciliation sur le terrain politique et limiterait le risque toujours inhérent à l’exclusion d’une partie de la population de l’espace politique démocratique. Nous avons estimé dans le dernier rapport de l’International Crisis Group que le président Ouattara devrait s’investir personnellement pour que des forces politiques pro-Gbagbo participent à ces élections législatives. Il a récemment entrepris une démarche dans ce sens.
SlateAfrique – Il y a déjà des menaces de boycott du FPI. Si elles se concrétisent est-ce que cela pourrait avoir de graves conséquences dans le processus de réconciliation?
G-Y – Il serait dommageable pour le processus de réconciliation et plus généralement pour les perspectives de normalisation durable en Côte d’Ivoire que le FPI ne participe pas aux élections et qu’il n’y ait pas d’espace politique pour ceux qui veulent récupérer l’héritage politique de Gbagbo ou qui choisissent simplement de s’inscrire dans une opposition à Alassane Ouattara. L’enjeu actuel est aussi celui d’instaurer une vraie démocratie et cela passe par l’existence d’un parlement qui refléterait la diversité du pays. Il est donc effectivement important que le FPI participe à ces élections. Pour l’instant, ils n’ont pas annoncé un boycott mais ils ont suspendu leur participation à la commission électorale. Il y a eu une rencontre avec le président Ouattara. Il faut un cadre de discussion. Un certain nombre de préalables sont demandés par les cadres du FPI, y compris celui de la libération de Laurent Gbagbo. Il est peu probable que le pouvoir accède à ce type de demandes. Mais, si des gestes d’ouverture sont faits par le gouvernement et Alassane Ouattara, les ex-partisans de Gbagbo pourraient se remobiliser et participer aux élections. Le boycott peut encore être évité. Le parti de Ouattara en 2000 avait décidé de ne pas participer aux élections législatives et il a été exclu de l’espace politique et de l’Assemblée Nationale pendant des d’années. Alassane Ouattara a reconnu que c’était une erreur et qu’aujourd’hui, il s’agit pour le FPI de ne pas reproduire la même erreur. Créer les conditions d’une mobilisation des ex-partisans de Gbagbo dans la clandestinité ne serait pas une bonne idée.
SlateAfrique – Quel peut-être l’impact de l’action de la Cour Pénale Internationale vis-à-vis des partisans de Laurent Gbagbo et de ceux d’Alassane Ouattara. Des proches du président ne risquent-ils pas d’être placés sur la sellette par la justice internationale?
G-Y – C’est évident. Dès lors que le dossier est entre les mains de la Cour Pénale Internationale (CPI), il devra échapper aux considérations politiques ivoiriennes. Même si l’enquête devait porter seulement sur la période de crise postélectorale —la possibilité de remonter à 2002 n’a pas été exclue par les juges de la Cour—, il ne sera pas possible pour la CPI d’ignorer une partie des crimes, notamment ceux commis par les partisans armés d’Alassane Ouattara. Et cela va créer un certain nombre de difficultés pour le pouvoir de Ouattara. Mais, très vite Alassane Ouattara avait signifié sa volonté que les crimes les plus graves soient du ressort de la CPI. C’était le moyen pour lui et son gouvernement de ne pas être impliqué directement, ce qui serait inévitable dans le cas d’une procédure judiciaire nationale. L’appel à une juridiction internationale est a priori un gage d’indépendance et d’impartialité. La question du timing est importante. La Cour vient de décider d’ouvrir une enquête. Il y aura sans doute plusieurs visites des enquêteurs sur le terrain avant que la CPI n’adresse des demandes formelles au gouvernement pour envoyer à La Haye des personnes contre lesquelles des mandats d’arrêt internationaux auront été délivrés. La situation pourrait se compliquer à ce moment-là pour le président Ouattara. Je crois qu’il veut d’abord gérer les nombreuses priorités au niveau national et ensuite, en fonction du contexte interne et international, gérer les contradictions et les menaces qui vont apparaître à la suite de l’enquête de la CPI.
SlateAfrique – Alassane Ouattara peut-il se permettre de lâcher ceux qui l’ont soutenu. N’y a-t-il pas des risques de représailles des chefs militaires?
G-Y – Des risques politiques sont présents et même des risques sécuritaires, dans la mesure où ceux qui concrètement pourraient être visés par les mandats de la Cour sont d’anciens chefs des Forces nouvelles. Certains d’entre eux ont depuis été nommés à des postes de responsabilité au sein des forces de sécurité, y compris dans des unités particulières comme la garde républicaine et le groupe de sécurité de la présidence de la République. Donc, cela va poser des problèmes. Pour l’instant, Ouattara avance dans la mise en place de nouvelles forces de défense et de sécurité avec l’idée de la réunification des ex-Forces nouvelles et des ex-forces loyalistes sous Gbagbo. Lorsque la CPI finira son enquête et identifiera les responsables présumés des crimes relevant de sa compétence, Ouattara aura du mal à revenir sur les engagements clairs qu’il a pris. Il espère sans doute que son régime sera plus solidement installé et qu’il pourra donc à ce moment-là prendre des décisions difficiles, comme celle de lâcher un certain nombre d’ex-chefs de la rébellion.
SlateAfrique – Ouattara lui-même ne peut-il pas être tenu responsable pour un certain nombre d’exactions étant donné que le président de la République est chef de l’Armée?
G-Y – Théoriquement on ne peut pas exclure cette possibilité dans la mesure où il a affirmé cette position de chef suprême des forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI) qu’il a créées par décret avant même qu’il ne soit installé par le Conseil constitutionnel en mai 2011. Ce sera à la CPI de définir les niveaux de responsabilité dans la chaîne de commandement des FRCI. Toute la question sera de savoir s’il avait réellement une autorité sur les troupes des FRCI qui ont commis des crimes graves dans certaines localités. Et quelle était la capacité des responsables politiques d’empêcher ces crimes ou de les faire arrêter dès qu’ils en ont eu connaissance.
Propos recueillis par Pierre Cherruau
A lire la deuxième partie de l’interview
Gilles Olakounlé Yabi – Il est encore trop tôt pour espérer avoir des signes mesurables de cette réconciliation. La plus grande difficulté lorsqu’on parle de réconciliation c’est de pouvoir avoir des indicateurs, c’est-à dire comment est-ce qu’on la mesure. Comment est-ce qu’on arrive à savoir si des personnes qui ont nourri à un moment donné de la haine, dans un contexte politique particulier, ont changé. Comment savoir si les rancœurs s’apaisent. Tout cela est très difficile à mesurer. Mais ce qui semble évident, c’est que la crise post-électorale en Côte d’Ivoire est une crise dans la longue crise qu’a connu le pays depuis plus de dix ans. Donc, il ne faut pas espérer obtenir en cinq mois ou même en un an ou deux, une réconciliation ou des signes forts de réconciliation, alors qu’il a fallu plusieurs années pour déconstruire la société ivoirienne et mobiliser une partie de la société contre une autre.
SlateAfrique – Des Ivoiriens subissent-ils encore des exactions sur des bases politiques, ethniques ou religieuses?
G-Y – Je crois qu’il est important de savoir un peu plus précisément ce dont il est question, c’est-à-dire qui est ce qu’on entend réconcilier avec qui. Ce qui s’est passé en Côte d’Ivoire pendant la crise postélectorale était un affrontement entre des groupes identifiables pour des raisons politiques connues. Les agents de la violence pendant ces mois de crise n’étaient pas la population de manière générale ou des groupes ethniques qui se seraient mobilisés dans les quartiers pour en affronter d’autres. Ce qui s’est passé, c’est qu’il y a eu une élection présidentielle, puis un bras de fer entre les deux rivaux du second tour. La mobilisation politique s’étant faite depuis des années sur un certain nombre de thèmes, y compris sur l’appartenance ethnique, régionale voire de l’appartenance nationale, il y a eu une dimension communautaire dans les actes de violence. Mais ce qu’il ne faut pas oublier, c’est que ce sont des acteurs parfaitement conscients de ce qu’ils faisaient et qui avaient un agenda particulier, et non pas la population de manière générale, qui ont commis de graves violences. On n’est pas dans le cadre d’un conflit à dimension essentiellement ethnique mais dans celui d’un conflit politique mené par des acteurs politiques épaulés par des acteurs de la violence. C’est pour cela que la question de la réconciliation, il faudra la poser de manière très claire et ne pas oublier les responsabilités individuelles identifiables. Ce qui est également important, c’est de voir dans le processus de réconciliation pourquoi ceux qui n’étaient pas directement impliqués dans les luttes politiques n’ont pas pu empêcher que le pire arrive dans le pays, pourquoi aucune catégorie de la société civile ivoirienne n’a pu et su résister à la polarisation politique et au repli identitaire.
SlateAfrique – Des élections législatives sont annoncées en décembre 2011. Mais, un certain nombre d’observateurs se demandent si ce n’est pas trop tôt ou est-ce qu’il s’agit d’une exigence de la communauté internationale?
G-Y – Je crois que ce n’est pas un problème de date. Dès le début du processus électoral en Côte d’Ivoire, on a estimé qu’il fallait faire une élection présidentielle et dans la foulée, des législatives. Il ne faut pas oublier que la présidentielle devait avoir lieu initialement en octobre 2005 et qu’elle s’est tenue finalement en novembre 2010, et que toutes les institutions du pays avaient perdu leur légitimité y compris l’Assemblée Nationale. Le code électoral lorsqu’il a été amendé pour permettre la certification par les Nations unies, portait à la fois sur des élections présidentielles et législatives. Il y avait même la possibilité de les coupler, ce qui aurait peut-être permis de diminuer la tension puisqu’on aurait eu à la fois des appétits pour la présidence et des appétits individuels dans tous les camps politiques pour les postes de députés à l’Assemblée Nationale. Ce n’est pas le calendrier des élections législatives qui est essentiel. La vraie question consiste à savoir si on peut réunir les conditions de sécurité nécessaires pour organiser ces élections sur l’intégralité du territoire et si les conditions politiques permettront à toutes les forces de prendre part à ces élections. C’est pourquoi la participation du Front Populaire Ivoirien (FPI) et plus généralement des partis qui voudraient récupérer l’héritage politique de Laurent Gbagbo est importante. Cette participation constituerait un indicateur d’une forme de réconciliation sur le terrain politique et limiterait le risque toujours inhérent à l’exclusion d’une partie de la population de l’espace politique démocratique. Nous avons estimé dans le dernier rapport de l’International Crisis Group que le président Ouattara devrait s’investir personnellement pour que des forces politiques pro-Gbagbo participent à ces élections législatives. Il a récemment entrepris une démarche dans ce sens.
SlateAfrique – Il y a déjà des menaces de boycott du FPI. Si elles se concrétisent est-ce que cela pourrait avoir de graves conséquences dans le processus de réconciliation?
G-Y – Il serait dommageable pour le processus de réconciliation et plus généralement pour les perspectives de normalisation durable en Côte d’Ivoire que le FPI ne participe pas aux élections et qu’il n’y ait pas d’espace politique pour ceux qui veulent récupérer l’héritage politique de Gbagbo ou qui choisissent simplement de s’inscrire dans une opposition à Alassane Ouattara. L’enjeu actuel est aussi celui d’instaurer une vraie démocratie et cela passe par l’existence d’un parlement qui refléterait la diversité du pays. Il est donc effectivement important que le FPI participe à ces élections. Pour l’instant, ils n’ont pas annoncé un boycott mais ils ont suspendu leur participation à la commission électorale. Il y a eu une rencontre avec le président Ouattara. Il faut un cadre de discussion. Un certain nombre de préalables sont demandés par les cadres du FPI, y compris celui de la libération de Laurent Gbagbo. Il est peu probable que le pouvoir accède à ce type de demandes. Mais, si des gestes d’ouverture sont faits par le gouvernement et Alassane Ouattara, les ex-partisans de Gbagbo pourraient se remobiliser et participer aux élections. Le boycott peut encore être évité. Le parti de Ouattara en 2000 avait décidé de ne pas participer aux élections législatives et il a été exclu de l’espace politique et de l’Assemblée Nationale pendant des d’années. Alassane Ouattara a reconnu que c’était une erreur et qu’aujourd’hui, il s’agit pour le FPI de ne pas reproduire la même erreur. Créer les conditions d’une mobilisation des ex-partisans de Gbagbo dans la clandestinité ne serait pas une bonne idée.
SlateAfrique – Quel peut-être l’impact de l’action de la Cour Pénale Internationale vis-à-vis des partisans de Laurent Gbagbo et de ceux d’Alassane Ouattara. Des proches du président ne risquent-ils pas d’être placés sur la sellette par la justice internationale?
G-Y – C’est évident. Dès lors que le dossier est entre les mains de la Cour Pénale Internationale (CPI), il devra échapper aux considérations politiques ivoiriennes. Même si l’enquête devait porter seulement sur la période de crise postélectorale —la possibilité de remonter à 2002 n’a pas été exclue par les juges de la Cour—, il ne sera pas possible pour la CPI d’ignorer une partie des crimes, notamment ceux commis par les partisans armés d’Alassane Ouattara. Et cela va créer un certain nombre de difficultés pour le pouvoir de Ouattara. Mais, très vite Alassane Ouattara avait signifié sa volonté que les crimes les plus graves soient du ressort de la CPI. C’était le moyen pour lui et son gouvernement de ne pas être impliqué directement, ce qui serait inévitable dans le cas d’une procédure judiciaire nationale. L’appel à une juridiction internationale est a priori un gage d’indépendance et d’impartialité. La question du timing est importante. La Cour vient de décider d’ouvrir une enquête. Il y aura sans doute plusieurs visites des enquêteurs sur le terrain avant que la CPI n’adresse des demandes formelles au gouvernement pour envoyer à La Haye des personnes contre lesquelles des mandats d’arrêt internationaux auront été délivrés. La situation pourrait se compliquer à ce moment-là pour le président Ouattara. Je crois qu’il veut d’abord gérer les nombreuses priorités au niveau national et ensuite, en fonction du contexte interne et international, gérer les contradictions et les menaces qui vont apparaître à la suite de l’enquête de la CPI.
SlateAfrique – Alassane Ouattara peut-il se permettre de lâcher ceux qui l’ont soutenu. N’y a-t-il pas des risques de représailles des chefs militaires?
G-Y – Des risques politiques sont présents et même des risques sécuritaires, dans la mesure où ceux qui concrètement pourraient être visés par les mandats de la Cour sont d’anciens chefs des Forces nouvelles. Certains d’entre eux ont depuis été nommés à des postes de responsabilité au sein des forces de sécurité, y compris dans des unités particulières comme la garde républicaine et le groupe de sécurité de la présidence de la République. Donc, cela va poser des problèmes. Pour l’instant, Ouattara avance dans la mise en place de nouvelles forces de défense et de sécurité avec l’idée de la réunification des ex-Forces nouvelles et des ex-forces loyalistes sous Gbagbo. Lorsque la CPI finira son enquête et identifiera les responsables présumés des crimes relevant de sa compétence, Ouattara aura du mal à revenir sur les engagements clairs qu’il a pris. Il espère sans doute que son régime sera plus solidement installé et qu’il pourra donc à ce moment-là prendre des décisions difficiles, comme celle de lâcher un certain nombre d’ex-chefs de la rébellion.
SlateAfrique – Ouattara lui-même ne peut-il pas être tenu responsable pour un certain nombre d’exactions étant donné que le président de la République est chef de l’Armée?
G-Y – Théoriquement on ne peut pas exclure cette possibilité dans la mesure où il a affirmé cette position de chef suprême des forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI) qu’il a créées par décret avant même qu’il ne soit installé par le Conseil constitutionnel en mai 2011. Ce sera à la CPI de définir les niveaux de responsabilité dans la chaîne de commandement des FRCI. Toute la question sera de savoir s’il avait réellement une autorité sur les troupes des FRCI qui ont commis des crimes graves dans certaines localités. Et quelle était la capacité des responsables politiques d’empêcher ces crimes ou de les faire arrêter dès qu’ils en ont eu connaissance.
Propos recueillis par Pierre Cherruau
A lire la deuxième partie de l’interview
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