Les dirigeants des pays émergents des Brics se réunissent mardi et mercredi à Durban, en Afrique du Sud, avec au programme le partenariat avec l’Afrique et la création d’une banque de développement commune, qui leur permettrait de se passer de la Banque mondiale.
Les discussions de ce cinquième sommet annuel, réunissant Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud tourneront cette année autour du thème: « Les Brics et l’Afrique: un partenariat pour le développement, l’intégration et l’industrialisation ».
Derrière le discours politique unificateur, qui consiste à dire que les Brics doivent constituer une force économique et politique pour s’affranchir des puissances occidentales, se dissimulent cependant des appréhensions africaines.
« Si nous prenons le chemin d’un accord de libre échange, nous nous mettons à la merci d’un flux d’importations bon marché de Chine, qui ne sera pas bénéfique pour l’industrialisation de l’Afrique du Sud », note ainsi Nomaxabiso Majokweni, patron de BUSA, puissante organisation patronale sud-africaine, cité par les médias mardi.
La journée doit justement démarrer pour le président sud-africain Jacob Zuma par la réception à Pretoria de son homologue chinois Xi Jinping dans le cadre d’une visite d’Etat, avant que les deux hommes se rendent à Durban (est) où M. Zuma doit s’entretenir en particulier avec la Brésilienne Dilma Rousseff puis le Russe Vladimir Poutine.
C’est en fait l’implantation massive en Afrique de la Chine, le géant des Brics, qui pose question, certains estimant que la Chine n’est plus un pays émergent, et que ses relations économiques avec le continent s’apparentent désormais à une nouvelle forme de colonialisme.
Soucieux de leur indépendance, le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud, qui rassemblent 43% de la population et produisent le quart du produit intérieur brut (PIB) de la planète, veulent se doter d’institutions et mécanismes communs leur permettant de contourner un système mondial actuellement dominé par l’Occident, du Fonds monétaire international (FMI) à la Banque mondiale en passant par les agences de notation.
Le premier point sur leur agenda est la création d’une banque de développement chargée de financer des infrastructures, en s’affranchissant de l’avis de la Banque mondiale.
L’Afrique du Sud, petit poucet du groupe (avec un PIB de 390 milliards de dollars contre 8.250 milliards pour la Chine), milite pour accueillir le siège de cette banque. Dans l’espoir de financer son ambitieux programme d’infrastructures et plus généralement les projets de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC).
La presse rappelait mardi que le pays est nettement mieux placé que ses quatre partenaires en terme d’évaluation de son système d’audit et de reporting, et surtout que le secteur bancaire sud-africain est considéré comme nettement plus sain.
Citant un rapport annuel du Forum Economique Mondial portant sur 144 pays, le supplément économique du Star notait mardi que, « en terme de solidité des banques, l’Afrique du Sud arrive en seconde position derrière le Canada, alors que le Brésil est 14e, l’Inde 38e et la Russie 132e ».
La nouvelle banque devrait être dotée d’un capital de départ de 50 milliards de dollars, 10 milliards par pays. Une somme qui, a récemment souligné la Standard Bank sud-africaine, ne sera pas forcément évidente à réunir pour Pretoria, puisque ces 10 milliards de dollars représentent 2,5% de son PIB, contre 0,12% de celui de la Chine.
Les Brics pourraient aussi mettre en réserve une partie de leurs fabuleuses réserves de change –4.400 milliards de dollars, selon Pretoria, aux trois quarts détenus par Pékin– pour s’entraider en cas de choc conjoncturel. Le pot commun serait doté de 240 milliards de dollars, qui leur permettraient d’éviter un recours au FMI.
Les cinq pays ont aussi dans leurs cartons une agence de notation, un mécanisme de réassurance, un conseil d’entrepreneurs, une classification maison des universités… On évoque également un câble sous marin permettant de transmettre des données à haut débit du Brésil à la Russie via l’Afrique du Sud, l’Inde et la Chine, un projet à 1,2 milliard de dollars.
AFP