Un des chefs de l’opposition togolaise, Jean-Pierre Fabre, a été inculpé avec un autre opposant dans l’affaire des incendies qui ont ravagé deux marchés du pays en janvier, a indiqué mercredi son avocat à l’AFP.
M. Fabre, qui avait été le principal opposant du président Faure Gnassingbé à la présidentielle de 2010, et Abass Kaboua ont été inculpés mardi de « complicité de destruction de biens publics et de groupement de malfaiteurs », a déclaré Me Dodji Apévon.
Il a précisé que les deux opposants n’avaient pas été placés sous mandat de dépôt et que leurs domiciles avaient été perquisitionnés.
Le procureur de la République Essolissam Poyodi a confirmé mercredi à l’AFP l’inculpation de M. Fabre.
MM. Fabre et Kaboua, respectivement président de l’Alliance nationale pour le changement (ANC) et du Mouvement des républicains centristes (MRC), sont tous deux membres du Collectif Sauvons le Togo (CST) qui réunit plusieurs partis d’opposition et des membres de la société civile togolaise.
Selon Me Apévon, les deux hommes ont « déclaré ne pas reconnaître les faits qui leur sont reprochés ».
« Je ne suis mêlé ni de près, ni de loin à ces incendies. C’est une volonté d’éliminer les opposants du paysage politique », a estimé M. Fabre, joint par l’AFP.
« Je ne dois pas quitter Lomé sans l’autorisation du juge. On m’interdit également de parler publiquement du dossier des incendies. Mais la lutte continue », a-t-il ajouté.
L’ANC doit prendre part aux élections législatives, initialement prévues en octobre et annoncées par M. Gnassingbé pour le premier trimestre 2013. Le scrutin a peu de chances d’avoir lieu avant fin mars.
Le principal marché de Lomé et le marché de Kara, à 420 km au nord de la capitale togolaise, avaient été ravagés en janvier par des incendies qui n’avaient pas fait de victime mais occasionné des pertes financières importantes –environ 6 milliards de FCFA (9 millions d’euros)– , selon les résultats d’une commission mise en place par le gouvernement.
Le gouvernement avait dénoncé des « actes criminels » et 31 personnes, pour la plupart des membres de l’opposition, ont été inculpées dans cette affaire.
Le 26 février, trois autres responsables du collectif Sauvons le Togo, Zeus Ajavon, Jil Benoît Afangbédji et Raphaël Kpandé-Adzaré avaient également été inculpés de « complicité de destruction de biens publics et de groupement de malfaiteurs ».
L’ancien Premier ministre togolais et responsable de l’opposition Agbéyomé Kodjo, inculpé et incarcéré mi-janvier, a été remis en liberté le 25 février.
Quelques partisans de l?opposition, qui avaient tenté de se rassembler devant la gendarmerie mardi soir lors de l?audition de MM. Fabre et Kaboua, ont été dispersés aux gaz lacrymogènes, ont indiqué à l?AFP des sources proches de la gendarmerie.
Le CST a manifesté à plusieurs reprises pour demander la libération des opposants arrêtés dans cette affaire et dénoncer une manipulation politique, dans un pays dirigé par la même famille depuis quatre décennies.
Il a organisé de nombreuses manifestations depuis juin, réclamant notamment des réformes électorales et le départ de M. Gnassingbé.
La crise économique et le déclin de la production de coton, ainsi que la stagnation de l’industrie du phosphate ont accru la grogne populaire dans ce pays ouest-africain de six millions d’habitants.
Il a été dirigé d’une main de fer par le général Gnassingbé Eyadéma de 1967 à sa mort en 2005. Porté au pouvoir par l’armée, son fils Faure Gnassingbé lui a succédé en 2005. Il a remporté en 2005 puis 2010 l’élection présidentielle dont les résultats ont été contestés par l’opposition. La prochaine présidentielle est prévue en 2015.
AFP