La justice administrative égyptienne a ordonné mercredi l’annulation des législatives controversées prévues à partir du 22 avril, mettant en difficulté le pouvoir du président islamiste Mohamed Morsi.
La présidence a réagi dans un bref communiqué, se contentant de dire qu’elle « respectait » le jugement et « réaffirmait son respect pour la Constitution, l’état de droit et la séparation des pouvoirs », sans clairement préciser si elle allait faire appel de cette décision ou pas.
Ce jugement relance les incertitudes politiques dans un pays qui peine toujours à se stabiliser deux ans après la chute de Hosni Moubarak.
M. Morsi avait convoqué ces élections le mois dernier par décret, mais le tribunal administratif du Caire a jugé que la procédure suivie par le Sénat, dominé par les islamistes et chargé de la loi électorale, n’était pas valide, la législation en question n’ayant pas été renvoyée devant la Haute cour constitutionnelle pour un avis définitif.
Le tribunal a donc décidé d’annuler le décret de M. Morsi et d’arrêter la préparation du scrutin, que la majeure partie de l’opposition avait prévu de boycotter, ainsi que de renvoyer la loi électorale devant la Haute cour constitutionnelle.
Les législatives devaient commencer le 22 avril et s’étaler sur deux mois, afin de désigner une nouvelle Assemblée (chambre basse), après la dissolution de la précédente en juin 2012.
Mais plusieurs opposants avaient déjà mis en cause leur transparence et le moment choisi pour les organiser, estimant que le pays était trop divisé pour qu’elles se tiennent dans le calme.
La principale coalition de l’opposition, le Front du salut national (FSN), avait annoncé qu’elle allait boycotter les législatives en raison notamment du manque de garanties pour leur régularité.
Le coordinateur du FSN, le Prix Nobel de la paix Mohamed ElBaradei, avait dénoncé une « supercherie » et laissé entendre que le scrutin pourrait être truqué comme sous le règne du président Hosni Moubarak, mais cette fois-ci au profit des partisans de M. Morsi.
Un autre opposant, l’islamiste modéré Abdel Moneim Aboul Foutouh, candidat malchanceux à la présidence l’an dernier, avait toutefois fait savoir que son parti se lancerait dans la bataille législative.
Les Frères musulmans, dont est issu le président Morsi, ont assuré « respecter la décision de la cour administrative de stopper l’élection et de renvoyer le dossier devant la Cour constitutionnelle ».
La décision du tribunal met M. Morsi dans une situation difficile.
Le président a, à plusieurs reprises, affirmé que des élections mettraient le pays sur le chemin de la stabilité, écartant les critiques sur le moment choisi pour les organiser.
Les Frères musulmans et les salafistes dominaient la précédente Assemblée, élue à l’hiver 2011/2012 et dissoute en juin de l’année dernière par la cour constitutionnelle, à l’époque où le pays était dirigé par un conseil militaire.
L’Egypte traverse actuellement une nouvelle phase troublée de sa difficile transition politique depuis la chute de M. Moubarak sous la pression d’une révolte populaire.
Le pays est parcouru de manifestations parfois violentes visant le pouvoir islamiste, accusé de chercher à accaparer les leviers du pouvoir, ou provoquées par l’aggravation de la situation économique et sociale.
La tension est particulièrement vive à Port-Saïd. Le procès d’un drame du football survenu l’an dernier dans cette ville du nord-est du pays provoque des affrontements meurtriers entre la population et la police depuis plusieurs semaines.
Le chef des services de sécurité locaux, Mohsen Radi, a été relevé de ses fonctions mercredi et transféré au Caire, une décision visant manifestement à chercher à apaiser la situation dans cette ville située sur le canal de Suez.
AFP