Obus de chars, lance-roquettes multiples, fusils de précision, M16 : dans la région de Gao (nord), l’armée malienne doit faire face à un ennemi autant, voire mieux équipé qu’elle, la principale menace restant, selon les militaires français, les engins explosifs artisanaux.
Alignés sur la base 1 de l’aéroport de Gao, aux côtés de fusils d’assauts américains M16, de fusils de précision de fabrication tchèque, et autres roquettes russes ou chinoises, des explosifs et des détonateurs mais aussi des uniformes de différents corps de l’armée malienne.
Pour le colonel-major Didier Dacko, commandant opérationnel de la zone, « l’impression qu’on a, c’est qu’eux et nous (armée malienne) avons quasiment les mêmes armes, sauf la troisième dimension, l’aviation, qu’ils n’ont pas ».
« Ils ont aussi des engins blindés, mais on s’est rendu compte qu’ils ne savaient pas les utiliser ou les réparer », relève-t-il.
« Ca nous donne une idée d’une armée, en fait des organisations qui ont les capacités d’une armée, la capacité de destruction d’une armée », a déclaré pour sa part le colonel Laurent Mariko, commandant de la zone de Gao, lors d’une présentation dimanche à la presse d’armements saisis depuis le 26 janvier, date de la reprise de la principale ville du nord du Mali aux islamistes armés qui l’occupaient depuis dix mois.
Ces armes, récupérées par les forces spéciales maliennes, l’armée française ou encore par des groupes de « jeunes patriotes », proviennent de « stocks de l’armée malienne -il y a eu des défections massives avec des capacités militaires-, mais aussi de la gendarmerie sénégalaise ou d’autres pays limitrophes », a indiqué le colonel Mariko.
Au milieu du stock d’armes, un panier de roquettes de fabrication russe, à monter sur hélicoptère, mais aussi des autocollants du drapeau des Emirats arabes unis, présentés par erreur à la presse comme « libyens ».
« La perfidie pour mode opératoire »
« Ils peuvent avoir subtilisé ces armements au niveau des structures militaires de leurs pays », estime le colonel-major Dacko. « On sait qu’il y a des Mauritaniens, des Nigériens, des Algériens parmi eux. Il peut aussi y avoir des Sénégalais même si on n’en a pas la preuve », ajoute-t-il
« Les pègres n’ont pas besoin de nationalité », assène le colonel Mariko, qui insiste sur « le caractère transnational de ces groupes » dont, dit-il, « le mode opératoire privilégié est la perfidie ».
Selon un haut responsable militaire malien, les éléments islamistes qui ont réussi à s’infiltrer jeudi dans la mairie et le palais de justice de Gao portaient, qui une veste d’uniforme malien, qui un pantalon d’uniforme.
Pour le colonel Mariko, la découverte de « déguisements » (uniformes de l’armée malienne, de la protection civile, casques de pompiers) prouve que « ces gens n’ont pas de signe distinctif et peuvent opérer partout ».
« On trouvera d’autres caches d’armes, on intervient sur indication ou après enquête », explique-t-il, soulignant que « la tâche n’est pas finie. On va élargir le périmètre sécuritaire ».
Les forces françaises s’inquiètent en particulier de la découverte d’IED (Improvised Explosive Device), qui étaient déjà leur cauchemar en Afghanistan. « Ce qui nous inquiète le plus ce sont les moyens artisanaux mis en oeuvre, avec les roquettes, notamment de 122 », déclare le colonel Denis Mistral.
Selon lui, « les groupes armés jihadistes arrivent à mettre en place des systèmes télécommandés avec des téléphones et ils le font pour faire peser une menace permanente sur la ville de Gao ».
« On cherche ces systèmes-là en permanence de manière à les détruire. On en a encore trouvé la nuit dernière. C’est une des choses difficiles à gérer », ajoute-t-il, soulignant qu' »il faut innover en permanence, de jour et de nuit, pour surprendre l’ennemi ».
Selon des sources militaires maliennes et françaises, plusieurs des éléments islamistes infiltrés jeudi au centre de Gao étaient porteurs de ceintures d’explosifs. Un IED avait été installé précisément à l’entrée des jardins de la mairie, mais les démineurs français ont découvert que son artificier n’avait pas eu le temps de l’activer.
AFP