Plusieurs dizaines de milliers de Vénézuéliens vêtus de rouge ont envahi jeudi le centre-ville de Caracas pour exprimer leur soutien au président Hugo Chavez, hospitalisé à Cuba depuis un mois et dans l’incapacité de prêter serment ce 10 janvier comme prévu par la Constitution après sa réélection en octobre.
Des images aériennes de la télévision ont notamment montré une véritable marée écarlate progresser sur plusieurs artères du centre, dont l’avenue Urdaneta. Selon des journalistes de l’AFP la plupart des manifestants portaient tee-shirts, des casquettes et des drapeaux de la couleur du parti socialiste au pouvoir.
Autour du palais présidentiel de Miraflores, les petites rues du centre historique étaient totalement engorgées et inaccessibles. Ce « grand rassemblement populaire » a été convoqué par le gouvernement pour célébrer le début du nouveau mandat du président, opéré pour la quatrième fois d’un cancer le 11 décembre à La Havane et invisible depuis.
Le rassemblement se déroulait dans une ambiance bon enfant, en présence de nombreuses personnes âgées et de femmes portant leurs bébés, alors qu’étaient brandis de très nombreux drapeaux vénézuéliens et portraits du « comandante ».
« Le peuple est avec lui, nous qui l’aimons serons toujours préparés à sortir dans la rue pour le soutenir », a affirmé à l’AFP Aceros, jeune « chaviste » de 23 ans venu de l’Etat de Guarico, dans le centre du pays.
« Je serais aussi venu si Chavez avait prêté serment aujourd’hui. Son absence ne change rien. Nous le portons dans notre coeur », déclarait de son côté à l’AFP Luis Brito, un professeur de 60 ans venu de Puerto la Cruz, à environ 200 km à l’est de la capitale.
« Nous allons prêter serment avec cette Constitution. C’est un jour historique, parce que commence le mandat 2013-2019 » du président, avait déclaré mercredi soir le vice-président Nicolas Maduro, à qui Hugo Chavez a confié une partie de ses pouvoirs avant de quitter le pays le 10 décembre dernier.
Trois chefs d’Etat de pays amis doivent assister à cette manifestation : le Bolivien Evo Morales, le Nicaraguayen Daniel Ortega et l’Uruguayen José Mujica. Un « acte officiel » avec des discours est prévu près de la présidence dans l’après-midi.
Dans la matinée, M. Maduro a présidé une réunion avec les représentants de 22 pays de l’Alliance bolivarienne pour les Amériques (Alba) et du programme de coopération énergétique Petrocaribe, qui ont manifesté, selon M. Maduro, leur « solidarité totale et absolue » avec le président Chavez.
Mercredi soir, le bras de fer entre le gouvernement et l’opposition, qui protestait contre le « vide institutionnel » provoqué par l’absence du président, a quasiment pris fin lorsque l’opposant principal, Henrique Capriles, a annoncé qu’il acceptait le feu vert donné plus tôt dans la journée par le Tribunal suprême de justice (TSJ) à un report de l’investiture.
« Maintenant c’est à vous, M. Maduro, que revient la responsabilité d’assumer votre charge et de gouverner », a déclaré M. Capriles, tout en estimant que les « instances ne doivent pas répondre aux intérêts d’un parti », visant indirectement le TSJ, souvent décrié pour ses décisions favorables au gouvernement.
La juridiction suprême a considéré que la prestation de serment du président, réélu en octobre, « pourrait intervenir à une date postérieure au 10 janvier devant le TSJ », et que son gouvernement et le vice-président resteraient en fonctions au-delà de cette date.
Mercredi, en marge du rassemblement du centre-ville, plusieurs députés de la principale coalition de l’opposition, la Table de l’unité démocratique (MUD), ont appelé à leur tour à une « démonstration de force » le 23 janvier à Caracas « pour le rétablissement de la défense de la Constitution » après la décision du TSJ.
Cet appel n’avait toutefois pas encore été repris par les ténors de l’opposition, Henrique Capriles et le chef de la MUD, Ramon Guillermo Aveledo.
M. Capriles, battu par Hugo Chavez à la présidentielle d’octobre, a affirmé mercredi qu’il n’avait pas demandé à ses partisans de manifester jeudi pour ne pas provoquer de violences.
Le Venezuela se trouve dans une situation inédite dans son histoire avec cette absence annoncée du président, au pouvoir depuis 1999, pour cette cérémonie d’investiture.
Le gouvernement a confirmé mardi que le président socialiste, âgé de 58 ans, dont l’état de santé continue de susciter l’inquiétude, resterait à la Havane jeudi sur recommandation de ses médecins après avoir été victime d’une « grave infection pulmonaire », comme l’a révélé un communiqué des autorités lundi.
L’Assemblée, dominée par le Parti socialiste uni du Venezuela (PSUV) d’Hugo Chavez, a voté mardi une résolution accordant au président « tout le temps nécessaire pour se soigner ».
La nature et la localisation exactes de son cancer sont tenues secrètes par les autorités.
AFP