Ansar Dine, l’un des groupes islamistes contrôlant le nord du Mali, a commencé dimanche à Ouagadougou ses discussions avec la médiation burkinabè, qui le pousse à rompre avec Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), en pleine préparation d’une intervention armée africaine.
L’heure du choix approche pour le groupe du charismatique Iyad Ag Ghaly, surtout composé de Touareg maliens comme lui et devenu depuis sept mois l’une des forces occupant le Nord malien, avec ses alliés jihadistes Aqmi et Mujao (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest).
Une délégation du groupe arrivée vendredi à Ouagadougou et conduite par Algabass Ag Intalla, un élu du nord du Mali, a commencé en fin de journée à son hôtel un entretien avec Djibrill Bassolé, le chef de la diplomatie du président burkinabè Blaise Compaoré.
M. Intalla a indiqué à l’AFP avant la rencontre qu’il allait remettre à M. Bassolé un « message » pour M. Compaoré, médiateur dans la crise malienne au nom de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), contenant les « revendications » du groupe.
Le représentant islamiste a dit avoir rencontré samedi soir le ministre malien des Affaires étrangères Tiéman Coulibaly, arrivé samedi et reparti dimanche, sans vouloir en dire davantage. Il y a eu des « discussions », a confirmé une source proche de la médiation, sans plus de détails.
M. Compaoré doit recevoir plus tard les émissaires islamistes, qui comme Aqmi et le Mujao appliquent dans leurs zones la charia (loi islamique) dans sa version la plus rigoriste.
Samedi, M. Bassolé a rappelé « les exigences de la Cédéao »: Ansar Dine (Défenseur de l’islam) doit se démarquer « de la terreur et du crime organisé », c’est-à-dire rompre avec Aqmi et le Mujao, responsables notamment de rapts dans la région, et rentrer dans le « processus de dialogue politique » destiné à rétablir l’unité du Mali. La question de la charia n’est pas pour l’heure évoquée publiquement.
« Ansar Dine est indépendant de tout autre groupe », a assuré à l’AFP Algabass Ag Intalla, affirmant que son mouvement « est prêt à négocier pour qu’il y ait la paix ». « On fait tout pour éviter une intervention » armée, a-t-il ajouté.
Pression de l’Algérie
Pays incontournable pour une solution à cette crise qui fait craindre à toute la région l’enracinement d’un foyer de « terroristes » dans le nord du Mali, l’Algérie exerce les mêmes pressions sur Ansar Dine.
Le groupe d’Iyad Ag Ghaly négocie à Alger un lâchage d’Aqmi, a rapporté dimanche le quotidien algérien francophone El-Watan, citant « une source proche du dossier » et confirmant la présence sur place d’une autre délégation d’Ansar Dine, alors que les autorités algériennes gardent le silence.
« Les pourparlers se sont intensifiés et il n’est pas exclu que cela débouche rapidement sur une prise de distance publique par rapport à Aqmi et au Mujao », selon la source non identifiée par le quotidien algérien.
Comme le Burkina Faso, l’Algérie a toujours marqué sa forte préférence pour une solution négociée passant notamment par une inclusion d’Ansar Dine, sans écarter en dernier ressort une intervention militaire.
L’option militaire se précise d’ailleurs: des experts internationaux travaillent depuis le 30 octobre à Bamako sur le « concept d’opération » d’une intervention militaire dans le nord du Mali.
Le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté le 12 octobre une résolution préparant le déploiement d’une force de quelque 3.000 hommes au Mali, qui serait soutenue sur le plan logistique par la France et les Etats-Unis, et a donné jusqu’au 26 novembre à la Cédéao pour préciser ses plans.