« Sur les trois dernières décennies, les investissements nationaux dans l’agriculture ont été réduits ainsi que l’aide officielle au développement et des millions de petits producteurs ont dû se battre pour s’adapter aux variations du climat, du marché et des prix », a insisté le directeur général de la FAO José Graziano da Silva en lançant la Journée mondiale de l’alimentation, dédiée cette année à la célébration du modèle coopératif.
L’Assemblée générale des Nations unies a consacré 2012 comme l’Année des Coopératives dans le monde et « ce modèle peut aider les petits producteurs à surmonter leurs difficultés », alors que la hausse continue des prix agricoles depuis 2007 ne leur a pas bénéficié, a insisté le patron brésilien de l’Organisation des Nations unies pour l’Agriculture et l’alimentation (FAO).
Selon les dernières statistiques publiées la semaine dernière par la FAO, 870 millions d’humains ont encore faim dans le monde et ce chiffre a cessé de baisser depuis 2007, en corrélation directe avec la fièvre des marchés.
Il a même continué d’augmenter en Afrique et au Proche-Orient, où 83 millions de mal nourris de plus qu’en 1990 ont été dénombrés: « Nous ne pouvons tolérer ça dans un monde de richesses où la production est suffisante pour tous », a estimé M. Graziano Da Silva.
« L’espérance que la flambée des prix en 2007-2008 permettrait aux petits producteurs de sortir de la pauvreté ne s’est pas réalisée », a-t-il noté alors que les prix des céréales de base ont enregistré une nouvelle hausse ces derniers mois, sous l’effet de la pire sécheresse qu’aient connue les Etats-Unis en 60 ans, néfaste aux cultures.
Selon Action contre la Faim, « environ 100 millions de personnes supplémentaires sont devenues sous-alimentées suite aux hausses des prix alimentaires depuis 2008 ». C’est d’ailleurs depuis cette date, poursuit l’organisation non gouvernementale, que la faim a cessé de reculer dans le monde alors qu’elle avait fortement baissé depuis les années 1990.
« En matière de faim, le seul chiffre acceptable c’est zéro », a renchéri la directrice du Programme alimentaire mondial (PAM) Ertharin Cousin, en écho au défi « Faim Zéro » lancé en juillet à Rio par le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon.
« Depuis la crise alimentaire de 2007-2008, de nombreux pays ont renouvelé leurs engagements à éradiquer la faim dans le monde mais dans certains cas, les promesses sont restées lettre morte », a déploré M. Graziano da Silva.
« Les coopératives détiennent sans doute les clés pour nourrir le monde mais les gouvernements aussi, avec la société civile et le secteur privé ».
Selon Luc Guyau, le président indépendant du Conseil de la FAO, la part des investissements agricoles dans le monde a plongé en vingt ans, passant « de 20% de l’aide totale dans les années 80 à 4% aujourd’hui ».
Les ONG s’alarment déjà, en ces temps de récession, d’une possible réduction de l’aide alimentaire. Ainsi l’Union européenne débat actuellement de la reconduction de son enveloppe de 3,5 milliards d’euros sur sept ans, qui pourrait être réduite à 2,5 mds pour la prochaine période 2014-2020, selon un conseiller européen.
Les marchés agricoles et leur volatilité devaient faire l’objet d’une table-ronde à haut niveau, mardi au siège de la FAO à Rome, en présence d’une quarantaine de pays, dont une vingtaine de ministres sous la présidence du ministre français de l’Agriculture Stéphane Le Foll.
AFP