Pour «Youss» comme certains l’appellent, la vie de rappeur n’a pas été un long fleuve tranquille; rien ne prédisait que c’était écrit d’avance. De Kinshasa où il est né à Paris et sa banlieue où il passe beaucoup de temps, il a dû se forger, se former sur le macadam des Sound Systems, des scènes underground et des «posses» (ndlr groupe) voilà près de deux décennies. A force de travail, d’abnégation, de sacrifice et de persévérance, Youssoupha a gravi étapes par étapes les escaliers qui mènent à la reconnaissance dans le milieu Rap et l’estime du grand public. Aujourd’hui avec son troisième album intitulé
«Noir Désir» sorti depuis janvier, le fils de Tabu Ley fait partie des meilleurs artistes français du moment. L’album de la consécration? On peut sans doute l’affirmer au regard des critiques positives et des ventes excellentes réalisées sans l’aide des Majors de l’industrie musicale. Et pour celui qui n’avait jamais entendu de rap français, cet album de Youss est une invitation à la découverte de ce qui se fait de bon dans ce style de musique. Loin du cliché largement répandu du rap Game ou du fantasme de rappeur- gangster, avec
Youssoupha, on assiste à un rap intelligent, conscient qui éveille à la fois la conscience et la curiosité par l’imagination créatrice et pleine de sens de son génial compositeur. «Noir Désir» se compose de 18 titres dont plusieurs captent notre attention notamment «Dreamin’»en featuring avec Indila, ou «histoires vraies» avec Corneille et «Espérance de vie» surtout qui pousse à la méditation. Entre envolée lyrique, musique entraînante ou mélancolique, paroles fortes et séduisantes, le «Prim’s parolier» (ndlr un autre pseudo de l’artiste) déploie son artillerie poétique. Amateur de bons mots, de flow et de rimes vous êtes servis. Harmonies entre style et poésie vous conduisent à travers des séquences musicales où se mêlent son hardcore, mélodie douce et même une expérimentale combinaison rumba-rap avec son père Tabu Ley dans la chanson «Les disques de mon père».
De ce père artiste musicien congolais qui fut le premier africain à jouer et remplir la mythique salle de l’Olympia en 1970, Youssoupha en digne fils, quarante deux années après a réussi à en assumer l’héritage artistiquement. Lors de son tout premier concert en ce lieu et en faisant salle comble en Mai dernier, il a repris fièrement le flambeau. Dans quelques mois, précisément le 8 Novembre il s’apprête à relever un autre challenge, celui de s’attaquer au Zénith avec son groupe le Geste Band au grand complet. Une occasion pour lui d’écrire une autre page de son histoire à lui sans être un avatar de son père.
Boni NIANGORAN