Le Mali a saisi l’Afrique de l’Ouest d’une demande d’appui pour sortir de la crise, perçue par beaucoup comme un pas important pour récupérer le nord du pays aux mains des islamistes, mais les autorités maliennes sont apparues prudentes sur la question du déploiement d’une force régionale.
« La phase des négociations précède toujours la phase militaire. Il y a des contacts qui sont en train de se nouer. Si, comme je l’espère, ces négociations aboutissaient à un résultat tangible, je pense qu’une intervention militaire serait sans objet », a déclaré à Abidjan le secrétaire général de la présidence malienne, Baba Berthé.
« En revanche, si les négociations en cours n’étaient pas concluantes, évidemment, il faudrait envisager cette option militaire qui va se dessiner », a-t-il ajouté, à l’issue d’une rencontre avec le chef de l’Etat ivoirien Alassane Ouattara, président en exercice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao).
La Cédéao prépare depuis plusieurs mois le déploiement au Mali d’une force de quelque 3.300 soldats, dont les contours demeurent flous. Elle avait précisé attendre une demande formelle de Bamako et un mandat du Conseil de sécurité de l’ONU.
Baba Berthé s’exprimait au lendemain de l’annonce par un diplomate français d’une demande « formelle » du président malien de transition, Dioncounda Traoré, pour une intervention militaire ouest-africaine pour reconquérir le nord du Mali, trois vastes régions depuis cinq mois aux mains des islamistes.
Jusqu’à mercredi soir, l’annonce de cette requête n’avait toutefois été confirmée à Bamako par aucune source jointe par l’AFP, ni à la présidence, ni dans le cabinet du Premier ministre, ni au sein du gouvernement.
Mais mercredi après-midi à Abidjan, le président intérimaire du Ghana, John Dramani Mahama, et M. Ouattara, se sont « félicités de l’évolution de la situation politique au Mali et ils ont exprimé leur appréciation de la requête des autorités maliennes adressée à la Cédéao pour l’envoi d’une force ouest-africaine au nord du Mali », selon un communiqué commun publié à l’issue de leur rencontre.
A Bamako, le Front uni pour la défense de la République et de la démocratie (FDR), coalition contre le coup d’Etat militaire du 22 mars au Mali, s’en est aussi réjoui, parlant d’une « décision courageuse ». Il a exhorté la Cédéao, l’Union africaine et l’ONU « à traiter rapidement » la demande malienne pour permettre de libérer le nord du Mali.
Le parti Solidarité africaine pour la démocratie et l’indépendance (Sadi), membre du front anti-putsch MP22, l’a, lui, dénoncée : « Nous ne sommes pas pour une intervention étrangère » mais pour « une libération du nord avec, au centre, nos forces armées, a affirmé un de ses responsables, Nouhoum Keïta.
Pour la France, « cette demande des autorités maliennes est une étape indispensable pour envisager l’appui international ».
A New York, le nouveau président du Conseil de sécurité, l’ambassadeur allemand Peter Wittig a indiqué qu’il revenait aux « acteurs africains », en particulier la Cédéao, de saisir le Conseil de l’envoi d’une force panafricaine et de lui fournir des précisions sur cette force.
Aucune précision n’a pu être obtenue par l’AFP sur la teneur de la demande du président malien, que Radio France Internationale (RFI) a indiqué s’être procurée.
Selon RFI, qui en cite des extraits, M. Traoré « demande un renforcement des capacités antiterroristes, par l’envoi d’un détachement de fonctionnaires de police et par l’envoi aussi d’équipements », mais aussi « un appui aérien et l’envoi de cinq bataillons à partir de la ligne de front qui +seront graduellement engagés pour contrôler les villes reconquises+ ».
Mi-août, l’armée malienne avait déjà prévenu que cette force régionale ne s’occuperait pas de la sécurité des institutions à Bamako et que, pour la reconquête du nord, « les autres viendront en appui, surtout en aviation, en logistique ».
Mercredi, un proche du capitaine Amadou Sanogo, le chef des putschistes du 22 mars, a rejeté toute idée de « troupes de la Cédéao » au Mali dans un entretien à RFI. L’armée malienne souhaite « un soutien logistique et du renseignement par rapport à la libération du nord », a dit ce proche, Bakary Mariko.
Parallèlement à la préparation de la force, la Cédéao a entamé des discussions avec certains des groupes armés présents à Kidal, Gao et Tombouctou (nord) pour résoudre la crise malienne née du putsch du 22 mars contre le président Amadou Toumani Touré (ATT), coup d’Etat ayant précipité la partition du pay
s.
Aujourd’hui, les islamistes extrémistes ont évincé leurs ex-alliés rebelles touareg et contrôlent tout le nord du Mali ainsi que Douentza, ville stratégique de la région de Mopti (centre) prise sans combat le 1er septembre.
Des armes de guerre achetées par le régime d’ATT à la Bulgarie, et arrivées à Conakry le 27 juillet, ont été retenues par la Guinée en accord avec la Cédéao, a indiqué mercredi à l’AFP le ministre guinéen délégué en charge de la Défense, Abdoul Kabélé Camara.
AFP