La principale organisation chrétienne du Nigeria a accusé mardi les islamistes de Boko Haram d’avoir « déclaré la guerre » aux chrétiens dans le nord du pays, où de nouvelles violences ont fait au moins 43 morts depuis lundi.
Deux jours après les attentats qui ont visé trois églises dans l’Etat de Kaduna (nord) et que Boko Haram a revendiqué, l’Association chrétienne du Nigeria a dénoncé un « nettoyage religieux systématique » et « des indications claires » que le groupe islamiste a déclaré « la guerre aux chrétiens et au christianisme ».
« Depuis le début de ces actes terroristes, le président Goodluck Jonathan n’a rien fait qui puisse nous rassurer que la fin de cette série d’attentats et d’attaques armées est en vue », a accusé l’organisation chrétienne.
« Au contraire, ses déclarations après chacune de ces attaques et tueries (…) semblent avoir scellé la faiblesse de sa présidence et l’escalade des actes terroristes », s’est-elle indignée.
Dimanche, des attentats ont visé trois églises à Kaduna et Zaria, les deux principales villes de l’Etat de Kaduna, et provoqué des représailles de jeunes chrétiens, dont le bilan officiel est de 52 morts et 150 blessés. Boko Haram a revendiqué ces attaques.
Après les représailles menées le jour même par des jeunes chrétiens, ce sont des musulmans, pour la plupart des familles des victimes de ces lynchages, qui ont laissé éclater leur colère après avoir été refoulés de la morgue sans avoir pu récupérer les corps de leurs proches, selon des habitants du quartier musulman de Tudun Wada.
« Des magasins appartenant à des chrétiens ont été incendiés, et des chrétiens ont été pris à partie », a raconté un témoin, Habibu Ladan, précisant que des soldats s’étaient rapidement déployés dans la zone.
Au moins neuf personnes ont été tuées depuis lundi dans ces nouvelles émeutes, a précisé un porte-parole de l’hôpital catholique St Gerard, Sunday John Ali.
Le couvre-feu de 24 heures instauré dimanche dans tout l’Etat de Kaduna après les attentats, a été réimposé pour 24 heures « en raison des nouveaux défis à la sécurité ».
Kaduna et sa région ont été par le passé le théâtre de vagues de violences inter-communautaires, avec notamment près de 500 morts lors de l’élection présidentielle de 2011.
Plus au nord-est du pays, à Damaturu, capitale de l’Etat de Yobe, au moins 34 personnes ont été tuées depuis lundi dans des affrontements entre forces de sécurité et présumés islamistes, selon une source hospitalière.
« Nous avons au moins 34 cadavres à la morgue (…), ce bilan pourrait augmenter », a déclaré à l’AFP un responsable hospitalier. Les autorités locales ont décrété mardi un couvre-feu de 24 heures dans Damaturu.
Les affrontements ont fait trois tués parmi les forces de l’ordre, selon le chef de la police locale, Patrick Egbuniwe. « Des patrouilles sont dans les rues. Nous avons perdu trois hommes et quatre ont été blessés », a-t-il déclaré.
Les habitants sont restés mardi confinés dans leurs maisons, alors que les rues de la ville restaient trop dangereuses pour y permettre la libre circulation des services de secours.
Damaturu avait été en novembre 2011 la cible d’attaques coordonnées de Boko Haram, qui avaient fait près de 150 tués. En décembre, la ville avait été le théâtre de nouvelles attaques des islamistes, suivies par une violente répression des forces de sécurité.
A Abuja, la capitale fédérale, le vice-président Namadi Sambo a rencontré les principaux responsables de la sécurité du pays.
Les députés nigérians ont décidé mardi soir d’inviter le président Goodluck Jonathan à venir les informer de la situation sécuritaire.
Boko Haram multiplie depuis mi-2009 les attentats, notamment dans les villes du nord, qui ont fait plus d’un millier
de morts. Ces attaques visent essentiellement les membres des forces de sécurité, les responsables gouvernementaux et les lieux de culte chrétiens.
Pays le plus peuplé d’Afrique avec quelque 160 millions d’habitants, le Nigeria est divisé entre un nord majoritairement musulman et un sud à dominante chrétienne plus riche grâce au pétrole. Il est régulièrement le théâtre de sanglantes violences inter-communautaires, notamment entre chrétiens et musulmans.
AFP