Des dizaines de personnes ont péri jeudi dans les violences en Syrie, où la révolte réprimée dans le sang entre vendredi dans son 16e mois avec des manifestations massives prévues contre le régime.
Amnesty International, une organisation de défense des droits de l’Homme basée à Londres, a accusé le régime de Bachar al-Assad de commettre des « crimes contre l’humanité » afin de se venger des communautés soupçonnées de soutenir les insurgés en Syrie où rien ne présage d’une fin rapide du conflit.
Comme tous les vendredis depuis le début de la contestation le 15 mars 2011, les militants anti-régime ont appelé à des manifestations massives, cette fois-ci sous le slogan « Toujours prêts à la forte mobilisation » pour signifier que la révolte populaire ne s’essoufle point malgré la répression.
Ces manifestations doivent commencer après la prière hebdomadaire musulmane de midi à la sortie des mosquées, malgré le déploiement important des forces de sécurité.
Jeudi, deux voitures piégées ont explosé, l’une a endommagé le mausolée de Zeinab, l’un des lieux les plus sacrés de l’islam chiite près de Damas, faisant 14 blessés, et l’autre a visé un poste de contrôle de l’armée à Idleb (nord-ouest) tuant et blessant plusieurs soldats, selon une ONG syrienne.
Selon des militants cités par l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), l’attentat près de Damas visait un bâtiment de la Sécurité, à 50 mètres du mausolée.
Les observateurs à Haffé
Ailleurs dans le pays, au moins 52 personnes -33 civils, six insurgés et 13 soldats- ont péri dans les assauts et les bombardements des troupes régulières contre plusieurs villes rebelles en vue de les reprendre, et dans les combats entre soldats et insurgés, a ajouté l’OSDH.
Les régions de Homs (centre), Deraa (sud), Damas, Alep (nord), Deir Ezzor (est) et Idleb ont été la cible de violents pilonnages et le théâtre d’affrontements, a dit cette ONG qui se base sur les témoignages d’un important réseau de militants sur place. L’armée assiège plusieurs de ces localités.
Selon l’OSDH, 2.300 personnes ont été tuées en un mois (13 mai au 13 juin), témoignant de l’intensification des violences. En 15 mois, plus de 14.400 personnes ont trouvé la mort, toujours selon l’ONG.
L’OSDH a critiqué les observateurs de l’ONU, déployés en Syrie pour surveiller une trêve inexistante, en affirmant qu’ils « ne bougent qu’après la prise d’une ville par les troupes comme à Haffé », localité de la province de Lattaquié (nord-ouest) tombée mercredi après huit jours de pilonnage intensif.
Une équipe de huit observateurs s’y est rendue jeudi. Les bâtiments publics, de même que plusieurs magasins et voitures ont été incendiés et détruits, selon un correspondant de l’AFP voyageant avec eux.
Les rares signes de vie dans les rues étaient quelques propriétaires de magasins qui tentaient de déblayer les gravats et de réparer les dégâts.
« Une forte odeur de mort était dans l’air », écrit la Mission d’observation de l’ONU dans un communiqué. « Les archives ont été brûlées, les magasins pillés et incendiés et des maisons apparaissaient avoir été fouillées avec les portes laissées ouvertes. Et il semble que des combats se déroulaient encore dans certains secteurs de la ville ».
Cela faisait une semaine que les observateurs essayaient de se rendre dans cette localité où selon les médias officiels, ils vont « inspecter le vandalisme et la destruction causés par les terroristes », terme utilisé par les autorités pour désigner opposants et rebelles. L’OSDH avait évoqué un repli stratégique des rebelles pour épargner les civils. L’ONU et les Etats-Unis avaient réclamé un accès à Haffé, redoutant un nouveau massacre. Crimes contre l’humanité Face à l’escalade, Amnesty International a affirmé avoir des preuves récentes que des soldats avaient traîné des civils hors de chez eux pour les tuer, y compris des enfants. L’ONG a recueilli les témoignages d’habitants dans 23 villes et villages et conclu que les forces et milices gouvernementales étaient coupables de « sérieuses entorses au droit humanitaire international, allant jusqu’aux crimes contre l’humanité et aux crimes de guerre », selon Donatella Rovera, spécialiste à Amnesty pour les situations de crise. Elle a souligné que ces exactions « mettent en lumière la nécessité urgente d’une action internationale décisive ». Malgré l’escalade, Occidentaux et Russes, alliés du régime syrien, restent divisés sur les moyens de résoudre la crise en Syrie qualifiée par l’ONU et la France de « guerre civile ». De son côté, des représentants de différents courants de l’opposition syrienne se réuniront vendredi et samedi à Istanbul pour discuter des moyens de surmonter eux aussi leurs divisions. Enfin, le voyage du pape Benoît XVI au Liban est toujours prévu et se prépare activement malgré la crise syrienne, a indiqué le porte-parole du Saint-Siège à la suite d’informations des incertitudes sur sa tenue. |
AFP |