Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a rejeté lundi l’idée de former un gouvernement de transition à l’expiration en octobre de son mandat, balayant une suggestion en ce sens de l’opposition, qui dit craindre une crise constitutionnelle.
Le deuxième pays le plus peuplé d’Afrique devait se rendre aux urnes en août, des élections nationales au cours desquelles Abiy Ahmed souhaitait se voir conforter pour mener à bien de nouvelles réformes politiques et économiques.
Mais la commission électorale a annoncé fin mars que l’épidémie de coronavirus rendait impossible l’organisation du scrutin à temps.
Par conséquent, les élections ne pourront advenir avant la fin du mandat des députés, qui expire début octobre, débouchant sur une situation délicate pour laquelle la Constitution n’offre pas de marche à suivre claire.
« Des gens peuvent proposer l’idée d’un gouvernement intérimaire et de transition mais sa mise en œuvre serait inconstitutionnelle », a déclaré lundi M. Abiy, prix Nobel de la paix 2019, lors d’une session de questions-réponses avec les parlementaires.
Il a également réitéré la volonté de son parti, le parti de la prospérité, de se soumettre aux électeurs.
« Nous voulons que les élections se tiennent. Le parti de la prospérité n’est pas un parti qui a peur des élections », a assuré le Premier ministre.
La chambre haute du Parlement devrait répondre prochainement aux recommandations que lui a formulé le Conseil éthiopien des questions constitutionnelles, qui a mené des auditions publiques le mois dernier.
Tandis que M. Abiy a évoqué lundi un possible délai « de quelques mois » avant les élections, la Commission électorale avait déclaré devant le Conseil qu’au moins 10 mois seraient nécessaires pour les préparer.
Lundi après-midi, la chaîne de télévision d’État de la région du Tigré (nord) rapportait que la présidente de la chambre haute du Parlement, Keria Ibrahim, avait démissionné, expliquant qu’elle ne souhaitait « pas travailler avec un groupe qui viole la Constitution et qui pratique la dictature ».
Keria Ibrahim est membre du Front de libération du peuple du Tigré, qui dominait la coalition au pouvoir avant l’arrivée d’Abiy Ahmed en 2018 et qui a depuis été marginalisé, jusqu’à officialiser sa rupture avec le Premier ministre l’année dernière.
D’autres membres de l’opposition ont accusé le Premier ministre de profiter de la pandémie de coronavirus pour rester au pouvoir.
Ils ont également demandé à être plus impliqués dans la recherche d’une issue, arguant qu’une consultation du Parlement est insuffisante, la majorité des députés soutenant le parti au pouvoir.
De son côté, M. Abiy a accusé l’opposition de chercher à exploiter l’incertitude créée par la pandémie afin de réclamer plus de pouvoir.
L’Éthiopie a annoncé son premier cas de Covid-19 mi-mars et dénombre actuellement 2.156 cas et 27 décès.
Près de la moitié de ces cas ont été enregistrés au cours des 10 derniers jours, conduisant le ministère de la Santé à « réitérer (son) appel à encore plus d’engagement collectif » afin de combattre la pandémie.