Le camp du chef de l’Etat sortant Macky Sall a revendiqué dans la nuit de dimanche à lundi sa victoire dès le premier tour de la présidentielle au Sénégal, un résultat que ses deux principaux rivaux avaient contesté par avance.
Face à Macky Sall, 56 ans, largement en tête dans de nombreux bureaux de vote selon de premiers résultats parcellaires égrenés par les médias locaux, seuls l’ancien Premier ministre Idrissa Seck, 59 ans, et le député « antisystème » et ex-inspecteur des impôts Ousmane Sonko, 44 ans, paraissaient en mesure de se qualifier pour un éventuel second tour.
Mais quelques heures après la fermeture des bureaux, la coalition présidentielle, par la voix du Premier ministre Mahammed Boun Abdallah Dionne, se déclarait en mesure de revendiquer la victoire.
« Les résultats compilés nous disent aujourd’hui qu’il nous faut féliciter le président Macky Sall pour sa réélection », a déclaré M. Dionne, pronostiquant un résultat final d' »au moins 57% » des suffrages.
Les résultats officiels des commissions de recensement des votes doivent être publiés dans chaque département avant mardi à midi, puis seront proclamés à l’échelle du pays par la Commission nationale de recensement au plus tard vendredi à minuit.
Un éventuel second tour, compte tenu des délais légaux de proclamation, de possibles contestations et de la campagne, se tiendrait vraisemblablement le 24 mars.
Au siège de la coalition présidentielle à Dakar, l’annonce de M. Dionne, créditant Macky Sall d’une victoire dans toutes les régions du pays, à une exception près, a déclenché des vivats.
S’exprimant moins d’une heure plus tôt lors d’une conférence de presse conjointe, les deux principaux rivaux de Macky Sall avaient mis en garde le pouvoir contre toute proclamation prématurée de victoire.
« A ce stade, un deuxième tour s’annonce », a déclaré Idrissa Seck, candidat pour la troisième fois à l’élection présidentielle.
« Dans l’état actuel du dépouillement, aucun candidat, je dis bien aucun candidat, moi y compris, ne peut se proclamer vainqueur de l’élection présidentielle », a déclaré à ses côté le député Ousmane Sonko.
– Forte affluence –
Les deux autres candidats de l’opposition, le président d’université privée Issa Sall, 63 ans, proche d’un mouvement religieux issu de la confrérie tidiane, et l’ex-ministre Madické Niang, 65 ans, apparaissaient très nettement distancés, selon les premiers résultats partiels.
Sur Twitter, Issa Sall a estimé que « le deuxième tour est acté », saluant « les performances d’Idrissa Seck et d’Ousmane Sonko ».
Macky Sall, qui a martelé pendant la campagne sa conviction de l’emporter au premier tour, avait axé son programme sur la poursuite sur les cinq prochaines années de son « Plan Sénégal émergent ».
Il était confronté à une concurrence inhabituellement dégarnie, avec seulement quatre rescapés du nouveau système de parrainages et des décisions judiciaires qui ont éliminé des rivaux de poids.
Pour la première fois depuis 1978, ni le Parti socialiste ni le parti de l’ex-président Abdoulaye Wade (2000-2012) ne présentaient leur propre candidat. Mais la famille libérale de M. Wade était particulièrement bien représentée, avec Macky Sall, Idrissa Seck et Madické Niang tous trois issus de sa formation.
L’opposition a dénoncé l’invalidation des candidatures de Karim Wade, fils et ancien ministre d’Abdoulaye Wade, et de Khalifa Sall, maire déchu de Dakar, tous deux frappés par des condamnations judiciaires, ainsi que le système de parrainages.
Idrissa Seck était apparu comme le principal bénéficiaire de cet écrémage puisque Khalifa Sall avait annoncé de sa prison lui apporter son soutien, et que la grande majorité des 20 recalés du parrainage s’étaient ralliés à lui.
L’affluence avait été forte dès l’ouverture des bureaux à Fatick (centre), où a voté Macky Sall, mais aussi à Thiès (ouest), où Idrissa Seck a accompli son devoir civique, et à Touba (centre), ville sainte de la confrérie mouride, où Madické Niang a tenu à faire la queue comme les autres électeurs.
Le scrutin s’est déroulé sans incident majeur, selon les différentes missions d’observation électorales, mais avant même la fermeture des bureaux, les camps d’Ousmane Sonko et d’Idrissa Seck ont dénoncé des « irrégularités ».
Malgré une longue tradition démocratique, au Sénégal les campagnes électorales sont souvent émaillées d’accusations de corruption, de désinformation et de violences.
Des affrontements ont fait deux morts le 11 février à Tambacounda (est) entre partisans de Macky Sall et d’Issa Sall. Dimanche, 8.000 policiers et gendarmes en tenue ainsi qu’un nombre indéterminé d’agents en civil étaient déployés, selon les autorités.