Le projet Central African Backbone (CAB-Congo), dans sa 1ère phase, a interconnecté le Congo au Gabon, en avril 2018, en fibre optique. Le projet va lancer 2ème phase, qui vise à interconnecter le Congo au Cameroun et à la République centrafricaine, dont les travaux vont démarrer cette année.
La République du Congo, à travers cette 2ème phase du projet CAB, avec l’appui financier de la Banque Africaine de Développement (BAD), devrait contribuer à l’intégration régionale en matière du numérique et au développement des technologies de l’information et de la communication, également à la création d’emplois.
Pour y parvenir, le Congo, par l’entremise du ministère des postes, des télécommunications et de l’économie numérique, a lancé, en juin 2018, deux appels d’offres internationaux, ayant connu la soumission de près de 17 sociétés. Dans l’optique de mettre la bonne gouvernance et la transparence au cœur de cette 2ème phase, avant de procéder au dépouillement des offres de soumission, le projet CAB-Congo s’est fait le devoir d’organiser un voyage sur le terrain, afin que chaque société soumissionnaire puisse mesurer l’ampleur des travaux à réaliser, une fois le marché attribué.
Au terme de la visite du site, la cellule de passation des marchés publics du projet Central African Backbone, composante Congo, a procédé, le jeudi 30 août 2018, à Brazzaville à l’ouverture des dossiers de soumission aux appels d’offres internationaux pour la construction des infrastructures à fibre optique permettant l’interconnexion du Congo au Cameroun et à la Centrafrique, en lot unique. Sur les 17 sociétés en lice, après examen des dossiers, deux entreprises ont gagné le marché : les sociétés CCSI pour la construction en génie civile de deux réseaux et Huawei pour la fourniture, l’installation et la mise en service des équipements de transmission, d’un système de supervision et des équipements d’énergie-climatisation.
Ce financement de la Banque Africaine de Développement (BAD), servira à réaliser, par le biais du projet CAB-Congo, les travaux de mise en œuvre des infrastructures à fibre optique d’interconnexion avec le Cameroun et la République Centrafricaine (RCA). L’interconnexion entre le Congo et la RCA se fera par voie fluviale, au Nord du Congo, notamment dans le département de la Likouala, et celle du Congo et le Cameroun sera construite par voie terrestre via le département de la Sangha.
La nature des travaux
La 2ème phase du projet CAB se fera entrois étapes distinctes : l’édification des deux réseaux, de construction d’un réseau sous-fluvial en fibre optique entre le Congo et la RCA, à partir de la Sangha, couplés avec la fourniture et la pose sous-fluviale de la fibre optique et de construction des sites techniques sur l’axe Pokola-Ouesso-Kabo-Bomassa-Bayanga et Salo en RCA. Pour l’interconnexion avec le Cameroun, il s’agira, concrètement, des mêmes types de travaux y compris ceux de la fourniture et de la pose terrestre de la fibre optique, construction des sites techniques sur l’axe Ouesso-Sembe, Souanké et Ntam, à la frontière du Cameroun.
Au cours de cette 2ème phase du projet CAB, il est prévu, par ailleurs, la construction du DATA CENTER national ou centre des données, d’une technopole ; la mise en place d’un certain nombre d’applications et services des TIC, l’appui institutionnel, entre autres à l’autorité de régulation des postes et des communications électroniques (ARPCE), à l’Institut national des aveugles du Congo (INAC), à l’institut des jeunes sourds du Congo et à l’Université Marien Ngouabi.
Ces travaux, à réaliser en 4 ans, sont évalués à la somme de 66,4 millions d’euros, soit 79% comme appui de la Banque Africaine de Développement (BAD) et 21% du Congo. Un financement décroché par le ministre Léon Juste Ibombo, dès son arrivée à la tête du ministère des Postes, des télécommunications et de l’économie numérique. Le démarrage des travaux, pour la liaison Congo-Cameroun est prévu pour le mois de septembre courant. Tandis que la date reste encore à fixer pour la construction du réseau en fibre optique Congo-RCA.
Ces deux interconnexions, une fois réalisées, à la suite de celle avec le Gabon, au-delà du fait qu’elles fourniront une sortie internationale supplémentaire en plus de celle du câble Wacs, accélèreront le processus d’intégration régionale. En effet, la plus-value découlant de ces interconnexions, c’est entre autres la transmission de données d’un pays de la sous-région à un autre, sans passer par les câbles sous-marins internationaux; l’augmentation du taux de pénétration de l’internet à haut débit dans ces Etats et la dissémination de la connectivité internationale sur l’ensemble du territoire des pays concernés.
Autant dire que le Congo, engagé dans la voie de la diversification de son économie, disposera, grâce à ces interconnexions, de l’opportunité d’augmenter, sensiblement, ses recettes fiscales et de réduire, considérablement, le coût de transactions économiques et sociales, de désenclaver numériquement les zones rurales traversées par la fibre optique, promouvoir l’intégration régionale par l’entremise d’une infrastructure à fibre optique, l’accès aux pays limitrophes et la création d’opportunités d’emplois pour les jeunes, en particulier.
Un bond considérable pour le Congo de s’arrimer au développement de l’économie numérique, tel que préconiser par le chef de l’Etat congolais, Denis Sassou-N’Guesso, dans son programme de gouvernement « La Marche vers le Développement ».
Le risque du retrait de l’appui financier de la BAD
La 2ème phase du projet CAB bénéficie d’un appui financier de la Banque Africaine de Développement à hauteur de 79% du montant global. Au-delà de la participation congolaise au projet, estimée à 21%, la volonté politique devrait s’exprimer.
Or, à ce jour, il se dresse certaines difficultés de nature à entraver l’exécution harmonieuse de cette 2ème phase. L’une des difficultés à signaler porte sur la mise à disposition du projet CAB, par les autorités congolaises, d’un terrain pour la construction du Data-center ou Centre des données. Certaines sources soutiennent qu’au lieu de l’octroi, on exigerait au projet CAB l’achat de ce terrain. Une exigence à laquelle ni le projet CAB, ni la BAD ne pourrait souscrire; puisque ne figurant pas dans son cahier de charges. Le bénéficiaire, qui est l’Etat congolais devrait penser à concéder un terrain au projet CAB pour réaliser à bon escient ses objectifs. Car l’implantation du Datacenter permettra au Congo de domicilier sur place, dans le pays, les données.
Le Data center est l’un des éléments nécessaires au traitement et stockage des données numériques. Il est Indispensable à Internet ; pour ce qu’est de la sécurité et la protection des informations. C’est le lieu physique qui contient les serveurs informatiques de stockage des données numériques. Avec le Datacenter, les données du Congo ne seront plus stoker dans les autres pays.
Une autre difficulté, l’accord sur les exonérations. En effet, la logistique pouvant faciliter le début effectif de cette 2ème phase ne bénéficie jusqu’à ce jour d’aucune exonération de la part du gouvernement, alors que la BAD, qui est la grande pourvoyeuse de ce projet, ne prend pas en compte les taxes et autres droits fiscaux-douaniers du pays bénéficiaire : le Congo. A titre d’exemple, les véhicules achetés par le projet CAB pour la mise en œuvre effective de cette 2ème phase sont en souffrance au port autonome de Pointe Noire, à cause du manque des exonérations sur les frais de dédouanement et autres taxes portuaires.
Face à cette situation, qui empiète déjà sur le démarrage effectif du projet, la BAD, le bailleur principal, menacerait de retirer son financement du projet. Ce qui, de toute évidence, devrait interpeler les décideurs. Ils doivent mesurer l’importance du projet, dans sa 2ème phase et se mettre réellement à l’ouvrage.
Wilfrid LAWILLA, paru dans le Diasporas-News n°106 Mai 2019