L’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo, acquitté mardi d’accusations de crimes contre l’humanité, sera maintenu en détention à la Cour pénale internationale (CPI) au moins jusqu’au 1er février, ont annoncé les juges vendredi.
A la majorité, les juges de la chambre d’appel ont décidé « que M. Laurent Gbagbo et M. Charles Blé Goudé (ex-chef du mouvement des Jeunes patriotes) resteront en détention » dans l’attente d’une décision sur l’appel introduit par le procureur contre leur mise en liberté immédiate, a déclaré la CPI dans un communiqué.
La chambre d’appel « a programmé une audience, le 1er février 2019, pour entendre d’autres arguments sur cet appel », a précisé la Cour basée à La Haye.
Après cette audience, les juges décideront soit de maintenir les deux hommes en détention jusqu’à un éventuel procès en appel sur leur acquittement, soit de leur accorder une liberté conditionnelle ou inconditionnelle. Aucun détail n’a été donné sur la date de leur décision.
Dans un document public, l’accusation a déjà annoncé « son intention de faire appel » de la décision d’acquittement de Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé. Cette démarche distincte pourrait prendre des mois.
En première instance, les juges avaient ordonné la mise en liberté immédiate de MM. Gbagbo et Blé Goudé suite à leur acquittement retentissant mardi, constatant « qu’il n’y avait pas de circonstances exceptionnelles » qui justifient de les maintenir en détention.
Cette mise en liberté a cependant été suspendue mercredi soir suite à un appel de l’accusation.
En détention depuis plus de sept ans, Laurent Gbagbo était jugé pour des crimes commis pendant la crise de 2010-2011, née de son refus de céder le pouvoir à son rival, l’actuel président ivoirien Alassane Ouattara.
Il avait finalement été arrêté en avril 2011 par les forces du président Ouattara, soutenues par l’ONU et la France. Il est le premier ancien chef d’État à avoir été remis à la CPI.
– Elections à venir –
Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé étaient accusés de quatre chefs de crimes contre l’humanité: meurtres, viols, persécutions et autres actes inhumains, pour lesquels ils ont toujours plaidé non coupable.
Pour les procureurs, il existe un « risque concret » que MM. Gbagbo et Blé Goudé ne comparaissent pas devant la Cour si leur présence est requise dans le futur.
Les deux hommes ont « suffisamment de moyens et de sympathisants pour les aider à éviter la juridiction de la Cour », avaient-ils avancé.
L’annonce de l’acquittement de l’ancien président ivoirien avait provoqué des scènes de liesse chez ses partisans en Côte d’Ivoire mais aussi un appel des autorités à « garder de la compassion pour les victimes ».
Marie Laurence Gbagbo, la fille de Laurent Gbagbo, avait évoqué mercredi un retour en Côte d’Ivoire dans le cas de sa mise en liberté. « C’est l’espoir et le plan », avait-elle expliqué à l’AFP devant la CPI.
En Côte d’Ivoire, M. Gbagbo est toujours sous le coup d’une condamnation à 20 ans de prison qui date de janvier 2018 pour crimes économiques. Il est cependant peu probable que la police ivoirienne tente de l’arrêter s’il retourne dans le pays.
« La décision de revenir » dans le pays « lui appartient », avait annoncé mercredi le gouvernement ivoirien.
L’acquittement de M. Gbagbo intervient à une période sensible pour la Côte d’Ivoire, à l’approche des élections de 2020 visant à élire un successeur au président Ouattara, qui a annoncé ne pas se représenter après deux mandats de cinq ans.