Emmanuel Macron a appelé jeudi « toutes les forces de la Nation » à se mobiliser pour éradiquer la grande pauvreté « en une génération », en présentant un plan qui ambitionne de « refonder l’Etat providence ».
« Nous nous sommes trop souvent habitués » au « scandale de la pauvreté », a déclaré le chef de l’Etat devant quelque 400 personnes au musée de l’Homme à Paris. Il faut donc « lancer un combat neuf, indispensable, vital pour notre pays, celui de décider résolument de ne plus oublier personne ».
Pour cela, il a multiplié les annonces dans un discours d’1h20, dont l’une des plus fortes est la création d’un revenu universel d’activité, qui « fusionne le plus grand nombre possible de prestations ». Il a également souhaité la mise en place d’un « service public de l’insertion » et annoncé une série d’aides destinées aux enfants et aux jeunes comme les repas à 1 euro dans les cantines.
Le coût de ces mesures a été évalué à huit milliards d’euros sur quatre ans, jusqu’à la fin du quinquennat, qui « sont entièrement financées » selon l’Elysée.
« Ce n’est pas un plan charité car il ne s’agit pas de permettre de vivre un tout petit peu mieux dans la pauvreté, il s’agit de sortir de la pauvreté », a insisté le président.
Mais l’opposition a dénoncé l’insuffisance des moyens et le flou sur la mise en oeuvre du plan. « A la politique des métaphores (…) nous préférons une politique d’action et de résultats », a réagi Laurence Sailliet (LR) tandis que Rachid Temal (PS) dénonçait « beaucoup de bonnes intentions et un catalogue à la Prévert », qui ne « compense pas les cadeaux faits aux plus riches », selon Julien Bayou (EELV).
En présentant lui-même la « stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté », Emmanuel Macron a cherché à briser l’image de « président des riches » qui a contribué à sa forte baisse dans les sondages.
Il a aussi donné des gages à l’aile gauche de sa majorité, qui appelait à un tournant social de la politique gouvernementale jugée trop libérale par certains élus.
Mais lui-même a rejeté toute idée de « tournant social », réaffirmant la cohérence de la politique menée depuis le début du quinquennat.
Il a d’ailleurs repris l’une de ses formules les plus polémiques, celle sur les « premiers de cordée », qu’il avait utilisée à l’automne 2017. « Personne n’est premier de cordée si le reste de la société ne suit pas », a-t-il souligné, en appelant « les premiers de cordée à ne pas oublier les derniers de cordée ».
La France comptait en 2016 quelque 8,8 millions de personnes pauvres, soit 14% de la population, selon l’Insee. Ce taux monte à 19,8% pour les moins de 18 ans.
Sont considérés comme pauvres celles et ceux qui perçoivent moins de 1.026 euros par mois (pour une personne seule), c’est-à-dire moins de 60% du revenu médian de la population.
– Repas à un euro –
Le plan s’appuie sur deux « piliers », la prévention de la précarité, notamment chez les plus jeunes, et l’aide à la réinsertion vers l’emploi.
Sur le premier volet, il prévoit notamment d’ouvrir davantage les crèches aux enfants de quartiers prioritaires ou défavorisés – via des bonus financiers aux collectivités -, de créer un fonds pour financer des petits-déjeuners dans les écoles prioritaires.
« L’accès à la cantine sera rendu plus universel en développant les repas à un euro », a précisé Emmanuel Macron.
Pour les jeunes, l’obligation de formation passera de 16 à 18 ans. Des moyens supplémentaires seront attribués aux missions locales pour qu’elles repèrent les décrocheurs du système scolaire et leur proposent des formations.
En outre, le dispositif « garantie jeune », pour les 16-25 ans les plus éloignés de l’emploi, sera étendu à « 500.000 jeunes avant la fin du quinquennat », contre 100.000 actuellement.
L’Etat veut par ailleurs trouver des solutions avec les départements pour prolonger le suivi des enfants de l’Aide sociale à l’enfance jusqu’à 21 ans.
En matière de santé, la CMU (couverture maladie universelle) sera étendue à plusieurs millions de personnes pour qu’elles bénéficient d’une complémentaire santé.
Concernant le « deuxième pilier », le président a annoncé « une loi en 2020 » pour créer « un revenu universel d’activité » dont « l’État sera entièrement responsable », précisant que ce revenu serait soumis à « des droits et des devoirs supplémentaires ». En contrepartie d’un « droit à être aidé et accompagné (…), nous veillerons à ce que les devoirs soient respectés » par les bénéficiaires.
Emmanuel Macron, qui s’était emporté en juin contre +le pognon de dingue+ que représentent les aides sociales, a en outre appelé à « repenser les minima sociaux », un véritable « maquis » selon lui. Cela impliquera que l’Etat s’engage aux côtés des « départements, des métropoles » pour mieux accompagner les personnes les plus éloignées de l’emploi, notamment bénéficiaires du RSA.
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