Un accord sur le futur gouvernement tunisien a été trouvé et sera finalement présenté vendredi, après un ultime report, a annoncé jeudi dans la nuit Ali Larayedh, chargé par le parti islamiste Ennahda de former une équipe à même de sortir la Tunisie d’une profonde crise politique.
« Après des négociations marathon, nous avons abouti à un accord sur un gouvernement, sur les aspects d’un programme politique qui détermine les principes, les priorités, les politiques et les engagements de ce gouvernement », a déclaré, de la présidence, le ministre sortant de l’Intérieur.
« On va apporter la touche finale demain (vendredi) matin pour présenter un dossier complet au président » Moncef Marzouki, a-t-il ajouté.
Quelques heures plus tôt, la présidence avait indiqué que M. Larayedh allait rendre publique dès jeudi la composition de son gouvernement, convoquant la presse à cet effet. Aucune explication n’a été donnée de ce énième report qui intervient après deux semaines de négociations tendues.
La promesse des islamistes de constituer une coalition élargie semblait cependant fortement compromise, les trois formations politiques approchées pour entre dans le gouvernement ayant annoncé leur retrait des pourparlers après deux semaines de tergiversations.
Ainsi, seule la coalition sortante – Ennahda et ses alliés laïques, le Congrès pour la république (CPR) du président Marzouki et Ettakatol – ont participé aux négociations de jeudi.
Le nouveau gouvernement comportera cependant des indépendants à des postes-clés, Ennahda ayant accepté fin février de confier les ministères régaliens (Intérieur, Justice, Affaires étrangères, Défense) à des personnalités apolitiques.
Ali Larayedh a été chargé le 22 février de former le gouvernement après la démission du Premier ministre Hamadi Jebali qui n’avait pu imposer à Ennahda la création d’une équipe de personnalités apolitiques pour sortir de la crise provoquée par le meurtre de l’opposant Chokri Belaïd le 6 février.
Le scénario d’un maintien de la majorité sortante avait été vivement critiqué par certains acteurs politiques dès jeudi après-midi.
« Il faut que M. Larayedh dise au peuple tunisien qu’il n’a pas réussi à élargir l’alliance, à réaliser un vrai consensus et il doit démissionner », avait estimé Mahmoud Baroudi, représentant de l’Alliance démocratique, l’une des formations politiques à avoir quitté les pourparlers.
Ennahda entretient des relations exécrables avec une large partie de l’opposition qui l’accuse de velléités hégémoniques et d’orchestrer une islamisation rampante de la société.
Une fois présenté au président, le gouvernement doit dans les trois jours être investi par l’Assemblée nationale constituante.
La Troïka, si elle est bel et bien maintenue, n’aura pas de mal à trouver la majorité de 109 députés nécessaire à la formation du gouvernement, mais elle serait insuffisante pour pouvoir définitivement régler la crise.
En effet, pour sortir de l’impasse, l’ANC doit adopter à la majorité des deux tiers une Constitution et ouvrir la voie à de nouvelles élections.
Or, Ennahda n’a pas trouvé, même avec ses alliés sortants, de compromis sur ce texte, en particulier sur la nature du futur régime politique en Tunisie.
Ce pays est aussi déstabilisé par des conflits sociaux à répétition, le chômage et la misère, causes majeures de la révolution de 2011 et qui continuent de faire des ravages.
De plus, il peine à juguler l’émergence de groupes islamistes radicaux violents, dont un a, selon les autorités, orchestré le meurtre de Chokri Belaïd.
AFP