vendredi, décembre 27, 2024
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Le président somalien veut amnistier les pirates et rebâtir l'Etat

Le président somalien veut amnistier les pirates et rebâtir l'Etat
Le président somalien Hassan Cheikh Mohamoud, élu il y a six mois, a révélé qu’il proposait une amnistie aux jeunes pirates pour les remettre dans le droit chemin, et il a détaillé ses projets ambitieux de « réparer l’Etat en faillite qu’est la Somalie », dans une interview exclusive à l’AFP.
« Nous négocions de façon indirecte avec les pirates par l’intermédiaire des notables » des villages côtiers, a déclaré le chef d’Etat. « Il faut en finir avec la piraterie », a ajouté ce président issu du mouvement associatif, dont l’élection par le Parlement en septembre dernier a soulevé un espoir sans précédent de normalisation, dans ce pays livré à la guerre civile depuis deux décennies.
Hassan Cheikh Mohamoud compte solliciter la communauté internationale pour l’aider à « offrir un moyen différent de gagner leur vie » aux quelques centaines de jeunes Somaliens actuellement enrôlés chez les pirates.
 

Le président somalien veut amnistier les pirates et rebâtir l'Etat
« Le problème est celui des chefs (pirates). Certains ont été inculpés, et (l’organisation de coopération policière internationale) Interpol est à leur poursuite (…) aussi nous ne négocions pas avec eux, nous ne leur offrons pas d’amnistie. L’amnistie est pour les jeunes », a-t-il précisé.
Profitant de l’absence d’Etat de droit en Somalie, la piraterie a prospéré depuis le milieu des années 2000, même si le phénomène a marqué un coup d’arrêt l’an dernier en raison du déploiement d’une armada de guerre internationale dans le golfe d’Aden et de la présence de gardes armés sur les bateaux marchands.
Dans sa résidence présidentielle, la « Villa Somalia » aux rondeurs Art Déco héritée de la colonisation italienne, Hassan Cheikh Mohamoud a invité un journaliste de l’AFP à partager un petit déjeuner de travail mercredi avec ses conseillers, avant d’accorder une interview.
Il faut cependant franchir une demi-douzaine de barrages et laisser son téléphone portable et tout objet électronique hors de la résidence, avant d’accéder à l’homme que les insurgés islamistes shebab ont tenté de tuer dans une attaque kamikaze dès le surlendemain de son élection.
« Je sens et je sais que je cours un risque (…) Des millions de Somaliens ont été tués au cours des 22 dernières années et je suis un Somalien parmi d’autres, relativise cet homme de 57 ans de taille relativement petite, visage rond, sourire avenant, petite barbe et fine moustache. « Je sais que mon heure viendra, mais d’ici là, je fais ce que je peux », sourit-il.
« Cadeau » de 200.000 dollars
Dans un pays jugé parmi les plus corrompus au monde, Hassan Cheikh raconte aussi comment quelques hommes d’affaires sont venus lui proposer, peu après son élection surprise, 200.000 dollars « à utiliser à sa discrétion ». Il leur a poliment demandé « s’ils verraient un problème à déposer la somme à la Banque centrale sous leur nom », ce qu’ils ont accepté, raconte-t-il, ravi.
En revanche, la condamnation ce mois-ci d’une Somalienne ayant accusé devant un journaliste des membres de forces somaliennes de l’avoir violée met visiblement mal à l’aise le président.
« Cela me fait très mal d’entendre qu’une femme somalienne a été violée », dit-il. Tout en se refusant à commenter une décision de justice, il souligne qu’il « dirige un Etat aux capacités très limitées », que « la justice fait partie d’un tout qui est la Somalie », et qu’à cet égard « elle demeure faible ».
Assis à côté du drapeau somalien — étoile blanche sur fond bleu azur — le chef d’Etat souligne que sa priorité est de reconstruire un vrai Etat, alors que de large parts du pays, aux mains de milices, échappent à son contrôle, sans parler des régions rurales du sud encore aux mains des islamistes liés à Al-Qaïda.
Aussi demande-t-il que « toute aide, même s’il s’agit d’une aide d’urgence, incorpore un élément en vue de la construction de l’Etat ».
Dans la même quête de légitimité, ce Somalien qui n’a jamais tiré un coup de fusil demande la levée de l’embargo international de ventes d’armes envers son gouvernement, une demande à propos de laquelle l’ONU devrait faire un geste prochainement. « Nous ne pouvons pas bâtir des forces de sécurité opérationnelles sans levée de cet embargo ».
Le nouveau président somalien fait à ce jour l’unanimité ou presque dans les milieux diplomatiques, qui n’étaient pas loin auparavant de désespérer de la Somalie.
« C’est la première fois qu’un président somalien n’est pas seulement intéressé à sa survie politique, mais soucieux de s’adresser au pays », relève l’envoyé spécial de l’Union européenne en Somalie Michele Cervone d’Urso, qui pense même que « la Somalie peut pour la première fois devenir un modèle, car la dynamique engagée est très positive ». 

AFP 

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