mercredi, avril 24, 2024
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Guinée : Alpha Condé, stop ou encore ?

Toute la Guinée reste suspendue aux lèvres de son chef de l’Etat, Alpha Condé. Fera-t-il changer la constitution afin de se présenter à la présidentielle de 2020 ? Beaucoup, à l’instar du principal opposant Cellou Dalein Diallo pensent que oui. Le principal intéressé, lui, continue de laisser planer le doute. Jusqu’à quand ?

Répondant récemment aux questions de Radio France internationale, l’opposant numéro un en Guinée a été cash au sujet d’un éventuel mandat d’Alpha Condé. Extrait. « Le président Mahamadou Issoufou du Niger, lorsqu’on l’interroge, est catégorique. Il dit qu’il ne modifiera pas la Constitution. Au terme de son second mandat, il partira et organisera des élections transparentes. C’est ce qu’on aurait voulu entendre de monsieur Alpha Condé. Mais dès qu’on lui pose la question, il s’énerve. Il dit que c’est le peuple qui décidera le moment venu. Cette ambiguïté est de nature à susciter chez nous beaucoup d’inquiétudes. Il y a beaucoup d’autres faits : il y a ses lieutenants qui disent, il faut qu’on le laisse finir son travail. Il a entamé beaucoup de projets. Il faut qu’il les inaugure. Aujourd’hui, ce n’est un secret pour personne que monsieur Alpha Condé veut un troisième mandat ». Droit dans ses bottes, Cellou Dalein Diallo croit même connaître le plan de son rival. « Il semble que l’option, c’est de faire valider une nouvelle Constitution et l’entrée dans une nouvelle République, de n’être plus lié par les dispositions de l’ancienne Constitution qui avait instauré le verrou au niveau de la limitation des mandats ».

Réponse du berger à la bergère, Alpha Condé de passage à Abidjan, dans le cadre d’une visite officielle de trois jours (25, 26, 27 avril), a remis les points sur les i. « Il y a un débat en Guinée. Moi j’observe (…) Ce qui est évident, c’est que le peuple guinéen est un peuple souverain, (…) qu’on ne peut pas empêcher le peuple de s’exprimer s’il le souhaite ». Cela suffira-t-il pour rassurer ? Pas sûr.

En attendant, il est important de retenir qu’en 2020, Alpha Condé aura achevé son second mandat, le dernier selon la Constitution. Et comme pour anticiper toute tentative de nouvelle candidature, les principaux partis d’opposition guinéens, ainsi que des associations de la société civile et des syndicats se dressent. Ils ont créé le 03 avril une coalition, baptisée Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), pour empêcher Alpha Condé de briguer un troisième quinquennat en 2020. Pour l’instant en tout cas, le premier président guinéen démocratiquement élu (tous les autres présidents étaient jusque-là autoritaires) n’a guère retouché la Constitution. Sauf que la sortie de l’ambassadeur de Russie à Conakry, suggérant d’amender la Constitution pour permettre au Chef de l’Etat de briguer un troisième mandat, fait jaser.

Le député Sidya Touré qui préside l’Union des Forces Républicaines (UFR), la deuxième force de l’opposition à l’Assemblée nationale, promet de se battre pour empêcher une probable imposture d’Alpha Condé. En feu, il commence par critiquer les actions d’Alpha Condé en révélant qu’« il finance beaucoup d’associations, beaucoup de personnalités, des artistes. Et tout ceci, pour organiser dans les quartiers, dans les villes de l’intérieur des mouvements tendant à faire croire qu’il s’agit d’une demande populaire ». Puis de rappeler au Chef d’état guinéen son bilan qu’il juge médiocre. « En 9 ans de mandat, nous n’avons pas d’électricité. On a dépensé trois milliards dans ce secteur et il n’y a pas une seule ville de Guinée qui soit fournie en électricité 24 heures sur 24. Nous n’avons pas d’eau. Nous n’avons pas d’assainissement. Nous n’avons pas une seule université pendant ces 9 ans de construite. Ensuite, on  n’a pas un seul hôpital qui a été construit. On ne peut pas vous montrer 200, 300 kilomètres de routes qui ont été réalisées pendant ces 9 années. Nous estimons que le mandat était de 10 ans et qu’il doit être achevé en 2020 ».

De leur côté, dans cette ambiance morose, les médias guinéens subissent un vrai tour de vis.

Qu’on se souvienne, en avril 2017 déjà, à la faveur d’une visite en France, Alpha Condé s’était montré clair quant à ses projets constitutionnels en déclarant au journal Libération « Arrêtons avec cette vision dogmatique de savoir si la bonne chose est un, deux ou trois mandats. Cela dépend de chaque pays et de la volonté du peuple ». Les prochains mois s’annoncent chauds en Guinée…

Guy-Florentin Yameogo, paru dans le Diasporas-News n°106 Mai 2019

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