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SIAF: Interview de Malado KABA « NOUS VOULONS FAIRE DES FEMMES DES CAPITAINES D’INDUSTRIE »

La lumineuse Malado KABA, ex-ministre guinéenne de l’économie et des finances de 2016 à 2018, était panéliste sur le thème de « l’analyse approfondie de la problématique hommes-femmes en Afrique Francophone ». Aujourd’hui directrice-associée d’un fond d’investissement, d’un cabinet conseil (FALEME CONSEILS) et membre du conseil consultatif de l’African Women Leadership Found, elle a bien voulu partager avec nous sa nouvelle expérience et revenir sur son parcours.

Diasporas-News : Pourquoi un plaidoyer pour les femmes? Avez-vous l’impression qu’il reste des pesanteurs pour les mettre en lumière?

Malado KABA : Si nous voulons vraiment transformer notre beau continent, il va falloir impliquer la moitié ou plus de celles qu’on a tendance à exclure: les femmes. La raison simple est qu’elles sont le socle de la famille, de l’éducation et de la santé des enfants. Quand une femme prospère c’est un atout pour la famille, la communauté et la nation. Une femme sur quatre en Afrique crée ou gère sa propre entreprise. C’est l’un des taux les plus élevés au monde. On sait également que sur notre continent les femmes détiennent près de la moitié des entreprises existantes. Cela dénote d’un dynamisme qu’on ne peut feindre d’ignorer. Malheureusement, les pesanteurs socioculturelles font que les femmes ont moins accès aux financements. Elles sont moins outillées à la gestion administrative et financière tout ça les confine dans des entreprises qui restent individuelles, dans du micro. Or, l’ambition du fond que j’aie rejoint l’an dernier est de les faire émerger, croître pour être des capitaines d’industries. L’autre résultat recherché est de promouvoir la diversité car les femmes ne sont pas assez nombreuses dans les conseils d’administration. Une implication plus grande de leur part permet d’avoir des structures publiques ou privées qui réussissent mieux y compris sur le chiffres d’affaires. C’est aussi une question de survie des entreprises. L’autre aspect est de pousser les femmes à investir les échelons les plus élevés dans les entreprises privées mais aussi le secteur public. Il faut que les choses changent.

D-N : Comment y parvenir?

M.K. : Les femmes se structurent en Côte d’Ivoire, au Sénégal, en Guinée et partout ailleurs. En étant ensemble, en se fédérant, en étant solidaires, elles feront bouger les lignes sur le plan économique politique et social (…) Elles doivent s’intéresser à la politique publique que mènent nos États et les réformes car elles peuvent en bénéficier. On peut utiliser la commande publique pour maximiser le recours à des prestataires de services et des fournisseurs qui soient des entreprises dirigées par des femmes.

D-N : Vous étiez ministre de l’économie et des finances, pourquoi n’avoir pas mis tout cela en œuvre?

M.K. : Vous savez quand on est ministre de l’économie et des finances, on regarde les choses du point de vue très macro-économique. Même si cela a un impact sur les femmes. Mon action n’a pas été directe, mais indirecte. Je suis arrivée en poste deux années après la crise d’Ebola. Notre économie était à terre. En 2016, en mettant en œuvre les réformes engagées par nos prédécesseurs, notre taux de croissance a atteint 10,5%. En 2017, il était à 13%.Sur les trois dernières années, nous sommes entre 8,5 et 9%. C’est extrêmement important. Nous avons aussi maîtrisé notre inflation qui était à 20% il y a dix ans ; nous sommes en deçà de 10%, le cap que nous nous étions fixés. Le déficit public en excédent budgétaire, la maitrise du taux de change…

D-N : Concrètement pour les femmes… ?

M.K. : Vous savez quand l’inflation est élevée c’est un impôt qui touche les couches les plus vulnérables dont les femmes. J’ai conduit beaucoup de réformes qui visent à la transparence de notre administration pour la rendre plus efficace. Je l’ai expliqué aux femmes entrepreneures. Je les rencontre dans des sessions de coaching. Je veux les aider à se fédérer, je m’investis sur la cause des femmes. J’ai une vision plus large pour avoir fait les deux côtés que sont le gouvernemental et les partenaires de sorte à pousser le gouvernement à accélérer les réformes.

Propos recueillis à Bamako par Georges-Eden BOBIA paru dans le Diasporas-News n°105 d’Avril 2019

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